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31/01/2022

La lutte contre la pauvreté, grande oubliée de la République contemporaine.

 

L’élection présidentielle est l’occasion de tirer un bilan du quinquennat de M. Macron, au-delà des effets d’annonce et des fumées de la communication, et la Fédération protestante de France n’a pas manqué à cet exercice qui n’est pas que comptable. Cela est d’autant plus intéressant que cette Fédération se veut une « vigie de la République » et qu’elle donne, pourtant, de nombreux arguments qui paraissent parfois moins républicains que leur affirmation précédente pourrait le laisser croire… Bien sûr (si je puis dire, au regard de ses engagements précédents dans le temps), elle prône un accueil des migrants qui, à bien les lire, confine à une forme de fatalisme : celui-ci, à se croire généreux, n’en est pas moins démagogique, voire dangereux si l’accueil n’est pas accompagné d’une véritable politique de francisation des nouveaux arrivants et non d’une simple « insertion » dans la société de consommation, si vide de sens qu’elle nourrit d’abord, aujourd’hui, les appétits, et les rancœurs quand ces derniers ne sont pas assouvis… « L’acceptation de l’altérité », vantée par la Fédération, ne doit pas être l’excuse du renoncement à faire valoir quelques valeurs du pays d’accueil, et je crains qu’elle ne s’accompagne, en fait, d’un déni de réalité et d’une incapacité à réenraciner les déracinés accueillis, comme si « l’ouverture aux autres » empêchait de penser les cadres solides d’un accueil circonstancié et les limites, nécessaires, à l’altérité venue d’ailleurs. Cette position « ouverte » de la Fédération protestante paraît aussi un peu étrange, au regard du jacobinisme ancien de la République dont elle se réclame, jacobinisme dont les provinces de France eurent tant à souffrir : doit-on rappeler, une fois de plus, comment la République, en sa logique centralisatrice et unitariste (uniformisatrice, en somme), a nié, longtemps, la pluralité des peuples de France au nom d’une formule d’« unité et indivisibilité » guère respectueuse de « l’altérité » des provinciaux, pourtant Français, selon les endroits considérés, depuis bien des siècles ? Il est fort regrettable que la Fédération protestante semble ne rien dire de ce qui fait la nation française, non pas en « grands principes » mais en histoire et en civilisation, et qu’elle « oublie », dans le même mouvement, cette attitude déplorable de la République face aux identités provinciales, ces marques immémoriales de la pluralité française (une formule d’ailleurs préférable à une « altérité » aux contours trop incertains pour être vraiment honnêtes)…

 

Il est un autre thème abordé par la Fédération qui mérite l’attention et un certain accord de ma part : celui sur la pauvreté, un sujet fort peu abordé dans cette campagne présidentielle et qui, pourtant, n’est pas mineur, loin de là ! En 2014, lors de ma campagne européenne sous la bannière de l’Alliance Royale, j’en avais fait un point fort et incontournable de mon message royaliste, sans grand succès d’ailleurs : la pauvreté n’intéresse pas, sans doute parce qu’elle inquiète, et les électeurs ne se déterminent pas sur ce thème, faute de croire que les politiques puissent résoudre cette grande question autrement que par quelques pansements ou le recours aux associations charitables telles que le Secours catholique ou les Restos du cœur. Et pourtant ! Je crois qu’il y a un devoir de l’Etat de prendre soin des pauvres, non par l’assistanat, un piège coûteux et peu efficace, mais par la lutte contre les causes de la pauvreté contrainte et par le soutien aux initiatives sociales, locales ou (et, parfois) professionnelles, qui peuvent assurer un meilleur partage des produits du travail et de la richesse et une meilleure intégration sociale de tous, quelles que soient leur fonction productive dans la Cité. Or, en ce domaine, le quinquennat de M. Macron n’a guère été convaincant, comme le souligne avec raison la Fédération protestante, citée dans un article du Figaro de ce lundi 31 janvier : « En cinq ans, le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté a augmenté », touchant 15 % de la population, soit près de 10 millions de personnes, « alors qu’Emmanuel Macron s’était engagé à ce que plus personne ne dorme dans la rue ». » Bien sûr, la crise sanitaire n’a pas forcément arrangé les choses, mais il faut reconnaître aussi que le libéralisme premier du président et de la République qui, depuis plus de quarante ans, a renoncé à développer une stratégie politique digne de ce nom contre les nouvelles précarités, peut expliquer ce désintérêt pour une cause qui ne mobilise pas les foules, de plus en plus inscrites dans une logique d’individualisme « de masse ».

 

Mais ce scandale social de la paupérisation contemporaine est-il si étonnant, au regard de l’histoire de la République qui, en définitive, n’a été « sociale » qu’en de courts moments (février 1848 ; 1936 ; 1944-45 ; etc.), et cela malgré la volonté de quelques uns qui, en fait, n’étaient pas tous républicains : Louis Blanc, socialiste, ou Albert de Mun, royaliste et catholique fervent, Jean Jaurès, Léon Blum, mais aussi le général de Gaulle, lecteur du théoricien royaliste du corporatisme La Tour du Pin, et catholique exigeant pour qui les devoirs sociaux des plus aisés prévalaient sur leurs droits économiques… La République n’a jamais été spontanément sociale, et elle ne l’est jamais restée longtemps… En revanche, elle a fondé un « État-providence » qui pensait régler par l’assistanat légalisé ce qu’elle n’avait pas le courage d’affronter par la volonté politique. La Fédération protestante le reconnaît implicitement quand elle déclare que « la fraternité désigne la promesse la plus délaissée de notre devise républicaine »… Délaissée aussi par les candidats de 2022, semble-t-il…

 

Doit-on attendre l’instauration d’une nouvelle Monarchie en France pour agir contre le paupérisme et le précariat ? Non, évidemment non ! Mais il est absolument désespérant tout autant que révélateur que les 10 millions de Français (dont nombre sont aussi de « nouveaux venus ») touchés par la pauvreté contrainte et le précariat n’aient aucun « porte-parole » en ces temps de présidentielle. Et pourtant ! Ne négligeons pas la phrase célèbre de Georges Bernanos, ce royaliste intraitable et en colère permanente contre les injustices de son temps : « Le pas des mendiants fera trembler le monde ! » Cette citation, que feu François-Régis Hutin répétait régulièrement dans ses éditoriaux du quotidien Ouest-France jadis, devrait alerter ceux qui prétendent aujourd’hui au fauteuil élyséen : oublier les pauvres (au sens de ceux qui se trouvent en dessous du seuil de pauvreté), dont nombre sont des travailleurs mal payés ou de petits artisans rejetés des métropoles mondialisées aux loyers trop élevés pour leur entreprise, c’est maintenir une insécurité et une injustice sociales qui peuvent, si l’on n’y apporte que des réponses méprisantes ou incomplètes, susciter de nouvelles colères et de nouvelles révoltes telles celles des Gilets jaunes en 2018, ou celles des banlieues déshéritées et trop souvent communautarisées (le communautarisme étant une mauvaise et dangereuse réponse au dilettantisme social de la République et à l’absence d’âme de la société de consommation) en 2005.

 

 

 

 

 

Post-scriptum : la critique est facile, mais l’art est difficile, dit-on avec une certaine raison. Un prochain article évoquera donc quelques propositions, que je fais suivant une logique royaliste sociale, sur les moyens d’atténuer les précarités contemporaines. Ce ne sont pas des solutions miraculeuses, mais quelques idées qui peuvent aider à la résolution de certaines situations de pauvreté contrainte. Ce combat, difficile, n’est pas vain et il est une pierre nécessaire dans la construction de la non moins nécessaire justice sociale sans laquelle il n’y a pas de société apaisée à long terme.

 

 

 

 

23/11/2016

Messieurs les candidats, pensez aux pauvres.

La question de la pauvreté contrainte est un sujet qui ne me laisse pas indifférent, et cela depuis fort longtemps, sans doute aussi parce que, en d'autres temps, j'en ai personnellement connu quelques aspects et quelques légères morsures... Lors des dernières élections européennes, au printemps 2014 et sous les couleurs de L’Alliance Royale, j'en avais même fait un de mes principaux thèmes de campagne, à la fois pour sensibiliser les électeurs à cette question toujours pendante mais souvent occultée, et pour proposer quelques pistes pour faire reculer cette insécurité sociale qui ronge nos sociétés et les affaiblit. Mais c'est un thème qui n'est pas assez électoralement porteur, sans doute, pour que les partis politiques et leurs dirigeants s'y intéressent, et il semble être « abandonné » aux associations comme le Secours catholique ou les Restos du cœur qui font, d'ailleurs, un travail important pour soulager, autant que faire se peut, la misère dans nos villes. Les royalistes du Groupe d'Action Royaliste, quant à eux, organisent régulièrement des « Soupes du Roi », et cela depuis presque dix ans, fidèles à leurs prédécesseurs du début XXe siècle mais aussi des siècles précédents, gardant en mémoire que, au Moyen âge, le Roi était « le père des pauvres ».

 

Pourtant, la pauvreté n’est pas un sujet mineur en France et les récents chiffres donnés par le Secours catholique la semaine dernière font plutôt froid dans le dos : « En 2000, on comptait 7,8 millions de personnes pauvres ; on en recense 8,8 millions aujourd’hui. Parmi ces personnes, entre 4 et 4,5 millions sont des jeunes de moins de 30 ans, ce qui devrait nous interpeller concernant l’impact de la pauvreté sur l’avenir de notre société », explique son secrétaire général Bernard Thibaud dans les colonnes de La Croix du jeudi 17 novembre dernier. Sans oublier que, selon Eurostat, 21,2 % des enfants de France sont menacés de pauvreté…

 

Bien sûr, il y a toujours eu des pauvres depuis que les sociétés humaines existent, mais elle est scandaleuse aujourd’hui au regard de toutes les richesses naturelles que nous exploitons et de toutes celles qui envahissent nos sociétés au risque de l’engloutir sous une débauche de produits marchands souvent inutiles : la démesure est dans cette invasion des objets qui semble nous faire oublier notre prochain, notre voisin.

 

Le politique ne peut ignorer ceux qui souffrent de « n’avoir pas assez » quand d’autres consomment sans compter. Il ne s’agit pas de dénoncer la richesse mais plutôt la démesure et l’égoïsme, et de rappeler, comme le fait régulièrement le pape François à la suite de tant d’autres princes de l’Eglise, la valeur du partage.

 

J’espère que cette question de la pauvreté contrainte sera abordée dans les prochains débats présidentiels, mais, au regard des jeux médiatiques actuels, je crains que cela ne soit pas le cas : « cachez ces pauvres que je ne saurais voir »… J’entends même quelques uns dire qu’en parler serait faire du « populisme » ! C’est dans ce genre de réaction stupide que l’on mesure le grand écart qu’il y a entre des élites mondialisées et le commun des mortels, mais aussi cette absence de compassion à l’égard des « perdants de la mondialisation » : est-ce la (triste) victoire de Benjamin Franklin ? Je préfère, en bon Français, l’exemple de saint Martin de Tours, de celui qui n’hésita pas à couper son manteau pour en donner la moitié à un malheureux transi de froid, un soir d’hiver de l’an 334… Et les candidats de 2017 pourraient bien y trouver quelque source d’une inspiration sociale bienvenue en ces temps d’incertitude…

 

 

 

03/09/2014

Un président d'hypocrisie...

 

Cela aurait pu rester de l'ordre de l'intime et du ressentiment que l'on n'exprime pas « chez ces gens-là », comme dirait Brel, sur la scène publique, mais, en cette ère de démocratisation à outrance et de transparence obligatoire (« quand on n'a rien à se reprocher, pourquoi ne pas tout dire et montrer les choses ? », dit-on...), les frontières entre vie privée et vie publique semblent irrémédiablement condamnées à tomber : d'ailleurs, elles sont d'abord détruites de l'intérieur, par ceux-là mêmes qui devraient être les « gardiens des secrets », des leurs comme de ceux de leurs proches. Il n'y a plus guère que les monarques qui, en somme, savent garder ceux qu'on leur confie : depuis 1952, date de sa montée sur le trône, la reine Elisabeth a reçu toutes les confidences politiques de ses premiers ministres, de Churchill à Cameron, et elle n'en a jamais rien dit, et chaque premier ministre de Sa Majesté sait que, par principe même, la souveraine ne livrera jamais à la presse ou à un livre de souvenirs le moindre détail de ses rencontres hebdomadaires avec le Chef du gouvernement britannique. Il en va de même en Espagne et en Belgique, monarchies constitutionnelles voisines géographiques de notre République des « révélations »...

 

Ainsi, Valérie Trierweiler, ex-compagne de l'actuel président, a commis un livre que l'on peut résumer par le titre d'une nouvelle de Barbey d'Aurevilly : « la Vengeance d'une femme. », et qui apparaît aussi comme un documentaire, avec tous les risques de désinformation et de manipulation que cet exercice journalistique peut engendrer, au plus proche de la magistrature suprême de l'Etat. On peut n'apprécier ni l'auteur ni le déballage de secrets d'alcôve et ne pas vouloir participer non plus au lynchage médiatique et politique de cette femme qui a eu le malheur de croire, avant les électeurs de la présidentielle de 2012, en un homme qui semble bien avoir trompé l'une et les autres... Personnellement, je suis assez agacé par ces courtisans du Président qui, après s'être jadis inclinés devant celle qui faisait office de Première dame (certains lui devant leur fortune politique, voire ministérielle, preuve que le mélange des genres n'a pas attendu sa répudiation présidentielle pour être pratiqué...), la traitent désormais comme la pire des traînées, manquant à tous leurs devoirs de réserve (et de galanterie) dans certains cas, ou montrant une « indéfectible » - je préfère mettre le terme entre guillemets : les mêmes n'hésiteront sans doute pas, demain et avec un aplomb sans faille, à cracher sur celui dont ils astiquent aujourd'hui les pompes...- loyauté à M. Hollande, au cas où il y aurait encore quelques os à ronger du côté de l'Elysée.

 

Mais ce qui me frappe et me choque, c'est ce que l'ancienne favorite a révélé (vérité ou mensonge ? Le doute persiste, mais...) sur l'état d'esprit de son ancien amant à l'égard des pauvres : l'expression « Les sans-dents » prêtée à l'actuel Président est terrible, effroyable même ! Bien sûr, il ne sera sans doute jamais prouvé qu'il a prononcé cette formule, mais je sais trop bien que (sauf quelques notables exceptions) « chez ces gens-là », le mépris des pauvres est bien réel : j'aurai bien des anecdotes à raconter sur cela, en particulier sur ces gens de la « bonne Gauche », emplis de grands principes (y compris dans leurs livres, et je pourrai citer quelques noms un peu connus parmi ceux que j'ai cotoyés en d'autres temps...) et peu soucieux, une fois retournés à leurs foyers ou à leurs salons, de les mettre en pratique pour eux-mêmes. Cela fait partie de la nature humaine, dira-t-on, et ce n'est pas faux, sans doute : mais ce que je reproche à ces gens-là dont les dents rayent souvent le parquet et la langue humidifie les chaussures des Puissants, c'est leur grande hypocrisie ! Jusque là, j'avais tendance à accorder quelque sympathie (à défaut de crédit...) à l'homme Hollande, avec lequel il m'est arrivé une fois, dans les années 1990, de discuter de la situation des quartiers et des écoles des Mureaux, situation qu'il connaissait bien et qu'il regrettait, avec un certain fatalisme d'ailleurs : j'ai, ce jour de septembre 2014, l'impression fortement désagréable de m'être « fait avoir » (sentimentalement parlant, pas politiquement, bien sûr!), et j'en conçois, non de la surprise, mais bien plutôt de la colère !

 

En même temps, je ne me faisais guère d'illusions sur la réalité des discours comme celui du Bourget au début 2012 (celui qui fustige la Finance, discours dont j'avais salué, en son temps, le refus de céder aux féodalités de l'Argent ; discours qui, en soi, n'est pas foncièrement mauvais mais qui n'a été qu'un discours, justement, et un discours de candidat, destiné à s'attirer les bonnes grâces électorales ; un discours trompeur dont la forme, plutôt bienvenue, cachait un fond plus saumâtre : de quoi alimenter un peu plus ma méfiance à l'égard de la République électorale et de la démocratie « émotionnelle »...). Je sais trop bien aussi, en étudiant l'histoire politique et sociale des derniers siècles en France, que la Révolution a ouvert l'ère de l'Argent et de sa main-mise sur l'Etat et la politique, et que, dès ses débuts, elle a méprisé et écrasé les pauvres qu'elle a écartés de la citoyenneté tout en les privant des ressources que l'Eglise pouvait mettre à leur disposition : il faudra d'ailleurs, un jour, étudier comment le triomphe de la propriété privée inscrite dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen d'août 1789, a permis de marginaliser un peu plus les pauvres et de « légitimer » (sans légitimité ni justice...) la répression à leur égard quand ces derniers avaient le malheur de ne pas apprécier leur écrasement et de vouloir le faire savoir !

 

Pour en revenir à la formule supposée de M. Hollande, je peux ajouter que j'ai connu, aux Mureaux comme à Rennes, des pauvres qui, effectivement, n'avaient plus de dents : ils n'étaient pas tous vieux, loin de là, et ils semblaient accepter ce qui, pourtant, les empêchait souvent de se nourrir correctement et les forçait à avaler sans mâcher, avec des conséquences désastreuses sur leur santé générale. La formule hollandiste a au moins le mérite de nous rappeler que, malgré l'égalité gravée aux frontons de notre République cinquième du nom, nous ne sommes pas égaux devant la santé et devant l'accès aux soins, en particulier dentaires : malgré le droit de chacun d'être soigné en France, beaucoup de nos concitoyens n'osent plus franchir le seuil d'un cabinet médical ou dentaire, comme s'ils avaient renoncé, puisqu'ils sont financièrement démunis, à user de ce droit ! Certains semblent avoir intégré le discours officieux mais latent dans notre société de « gagneurs » que, si l'on est pauvre, c'est de sa faute et c'est une faute ! Discours terrible et trop souvent réducteur, qu'un Saint Louis a, d'avance, dénoncé en nommant les miséreux « Nos seigneurs les pauvres » et qui, à la suite du Christ selon les évangiles, lavaient les pieds de ces malheureux en s'inclinant devant eux...