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18/08/2023

Le petit poussin brise sa coquille...

 

Le temps des vacances est le temps des lectures autant que des relectures, et la préparation d’un texte ou d’une conférence les oriente sans totalement les contraindre, la période des congés offrant quelques possibilités de vagabondages livresques autant que de rêveries intellectuelles qu’il s’agit ensuite de ramener à la raison sans se défaire de leur originelle et possible passion… Une prochaine intervention sur le thème du souci environnemental et de la réponse écologique-royale devant les étudiants de l’Université d’été royaliste de l’Action française (le fameux Camp Maxime Real del Sarte, ouvert chaque été depuis 1953…) m’a ainsi permis de sortir quelques ouvrages de ma bibliothèque (la verticale comme l’horizontale) et de replonger aussi dans les articles de quelques revues et collections, comme celles de Limite et de La Décroissance, par exemple, mais aussi du Paysan biologiste, moins connue et plus ancienne, dans laquelle il m’arrive de croiser quelques signatures réputées royalistes. Après tout, l’écologie, avant même d’entrer dans le vocabulaire politique, a souvent été une préoccupation de ceux qui souhaitaient la pérennisation de la magistrature suprême de l’État à travers la succession naturelle du père au fils (dans le cas français et sans préjuger d’évolutions prochaines sur le sexe des futurs monarques, suivant l’exemple des monarchies européennes), mode de désignation politique qui peut apparaître comme la plus simple et la plus naturelle. De plus, les royalistes français ont toujours relié très fortement les notions d’héritage avec la mention de l’héritier, comme le clamait l’Action française : « Sauvegarder l’héritage, ramener l’héritier », ce dernier étant la condition institutionnelle de la préservation du premier…

 

Dans toute la littérature royaliste d’un Maurras, il est un texte qui m’apparaît, sans qu’il ait été ainsi compris par ses propres lecteurs, comme une sorte de manifeste d’écologie humaine : c’est « l’inégalité protectrice », rédigé en 1937, mais pensé bien avant, sans nul doute. Je l’ai lu en 1981, sous la forme d’une petite brochure à la couverture orange publiée par La Documentation Royaliste de Tours, et ses premières lignes sont souvent répétées comme une sorte de mantra ou de signe de reconnaissance par les militants d’AF ou par les « anciens du 10 » (1) : « Le petit poussin brise sa coquille et se met à courir. Peu de chose lui manque pour crier : « Je suis libre »… Mais le petit homme ? Au petit homme, il manque tout. Bien avant de courir, il a besoin d’être tiré de sa mère, lavé, couvert, nourri. Avant d’être instruit des premiers pas, des premiers mots, il doit être gardé de risques mortels. Le peu qu’il a d’instinct est impuissant à lui procurer les soins nécessaires, il faut qu’il les reçoive, tout ordonnés, d’autrui. » En quelques mots, Maurras cerne la condition humaine et nous rappelle que nous sommes, humains issus d’humains, dépendants d’une nature qui, malgré toutes les technologies possibles, inventées et inventables, ne peut être niée, au risque de violer notre propre humanité qui est, aussi, humilité devant ce qui est avant même que, nous, nous soyons. L’écologie, quand elle s’intéresse à l’homme-type, ne peut négliger ces éléments, et c’est pour cela que les tentatives d’imposer une notion de l’homme « seul maître de lui-même, de son être et de son destin, indépendamment de tous les autres et de tout passé » sont la négation de la nature humaine, et de la nature elle-même (2). Non que nous ne soyons aussi des êtres de culture, possibles créateurs et fondateurs (cela est aussi dans notre… nature !), capables de penser par soi-même et possiblement libres sans être contraints d’user de toutes les formes de liberté que notre nature nous autorise et que notre héritage culturel et notre pensée autonome, individuelle, nous permettent ; mais il importe de nous souvenir d’où nous venons, naturellement parlant, et de nous méfier des constructions intellectuelles ou, même, scientifiques qui oublieraient les conditions premières de la vie et de sa transmission ou voudraient les réduire à une simple opération technique entre les mains de quelques démiurges égotistes ou de grandes sociétés « philanthropiques » du type GAFAM… Cela explique pourquoi je suis fondamentalement hostile aux manipulations génétiques, mentales mais aussi parfois sociétales qui, en voulant s’émanciper de la condition humaine et de ses contraintes (qui peuvent être des limites, sinon infranchissables, du moins utiles pour que la vie en société ne soit pas la lutte de tous contre tous, de chacun contre chacun), en viennent à nier l’humanité même et la possibilité de ses amitiés… En somme, à artificialiser l’homme quand il s’agit, plutôt, de l’instruire, le cultiver, le construire au sens noble du terme.

 

Le combat politique et en particulier royaliste est aussi un combat pour l’homme, au-delà de la seule dimension institutionnelle. Certains ont pu parler jadis d’une anthropolitique maurrassienne au regard du texte de « L’inégalité protectrice », lui-même inscrit dans un chapitre intitulé « La politique naturelle » de l’ouvrage de Maurras « Mes idées politiques » (3), mais nombre d’autres écrivains et intellectuels s’inscrivent dans cette même anthropolitique sans être maurrassiens : les écrits de Georges Bernanos regroupés dans « La France contre les robots », par exemple, ou ceux des Anglosaxons comme Huxley ou Orwell, voire Rowling, témoignent, par la voie littéraire, des mêmes préoccupations et d’une même appréhension de la condition humaine. Que ceux que je viens de citer, en particulier J.K. Rowling, soient aujourd’hui les cibles d’un courant d’effacement puissant aux États-Unis et relayé en France par quelques groupes artificialistes, en dit long sur les dangers qui menacent notre société ancienne, son esprit et les civilisations qui en sont issues, dont la civilisation française et ses cultures particulières…

 

 

 

 

 

 

Notes : (1) : Il s’agit de l’adresse, depuis 1950, du siège central de l’Action française : le 10, rue Croix-des-Petits-Champs…

 

(2) : Être « seul maître » ne peut exister, en définitive, qu’après cette transmission d’une génération à l’autre, d’une communauté (famille, tribu, nation, etc.) à l’individu qui, ensuite, peut vouloir s’en défaire (sans, d’ailleurs, pouvoir vraiment oublier tout ce qui a précédé…). Nous savons que les « enfants sauvages », quand est dépassé un certain nombre d’années sans éducation humaine, ne peuvent jamais rattraper les retards cognitifs et intellectuels, et cela quelles que soient leur bonne volonté et les efforts de leurs enseignants.

 

(3) : Tout cela n’est-il pas éminemment révélateur et symbolique de ce qu’est la nature même de la pensée maurrassienne ?

 

 

 

 

 

 

09/11/2011

La transmission héréditaire en monarchie.

De multiples questions sont posées au royaliste que je suis, en particulier sur ce que serait la Monarchie ré-instaurée, ou en quoi elle serait différente de l'actuel régime en place : il est vrai que, au début du quinquennat, certains voyaient en M. Sarkozy un monarque que, pourtant, il n'a jamais été ni ne peut prétendre être, au regard même de l'histoire et de la tradition monarchique française. La monocratie n'est pas la Monarchie !

 

Rappelons quelques éléments simples : tout d'abord et contrairement à ce que l'on pourrait croire par une trop rapide lecture des institutions, la Monarchie n’est pas forcément l’antithèse de tout ce qui fait une République aujourd’hui, bien sûr, mais elle a des fondations et souvent des fondements, des raisons d’être et d’agir différentes, ne serait-ce que par définition : quand la République (comprise ici dans un sens restrictif, historiquement et politiquement, et particulièrement dans notre pays) est « l’absence de Roi » (suivant la formule d’Anatole France), la Monarchie se caractérise, au regard du cas français et des exemples européens, par la règle de la transmission héréditaire de la magistrature suprême, du père au fils dans la meilleure configuration, règle résumée par deux formules que les légistes français ont souvent rappelée : « Le roi est mort, vive le roi ! » et « le roi ne meurt jamais », cette dernière formule rappelant que « l’Etat demeure toujours » (Louis XIV sur son lit de mort), au-delà de la mort physique de son dépositaire du moment.

 

Ce mode de transmission du Pouvoir est à la fois le plus simple, le plus naturel, mais aussi le plus contesté aujourd’hui dans notre société politique et par l’idéologie dominante d’un individualisme qui s’accommode mal d’une règle et d’une autorité qui lui échappent, celles-ci ne devant rien, dans leurs applications, à la volonté individuelle pure. Car le choix des électeurs n’est pour rien dans la montée sur « la première place », symbolisée longtemps par le trône, d’un homme qui s’est apparemment juste donné la peine de naître, et de « naître roi » avant que de le devenir concrètement, statutairement, politiquement. La naissance est à la fois l’argument fort et même principiel des monarchies, et son handicap dans l’Opinion publique : mais il est la base de l’autorité monarchique.

 

En fait, la naissance, aujourd’hui comme hier et sans doute demain, échappe aux jeux de clientèle et de concurrence pour la magistrature suprême : le futur roi n’a pas choisi de « naître roi », mais il n’est pas libre, dans une Monarchie « à la française », de renoncer aux responsabilités que cela impose. A partir de sa naissance, alors que la vie suit son cours et avant que la mort ne « libère » le trône de son prédécesseur, souvent de son propre père, le Dauphin (puisque c’est ainsi qu’on le nomme en France) est entretenu dans cette ambiance particulière qui fait de lui celui qui « attend », sans être pressé (car un fils n’espère pas la mort de son père…), et qui est préparé (et se prépare) à la tâche politique de régner : il apprend le métier de roi sans savoir, d’ailleurs, s’il l’exercera un jour, mais plus encore, quand il l’exercera. Dans cette situation, aucun choix, ni pour le roi ni pour le Dauphin ! Mais, paradoxalement, c’est cette absence de choix, c’est le fait de s’en remettre à la nature et à la vie familiale, à la filiation, qui permet la plus grande liberté à la Monarchie, à la magistrature suprême de l’Etat en monarchie.

 

Certains, malicieusement, m'objecteront que le président actuel semble avoir poussé son fils à prendre des responsabilités politiques dans un réflexe dynastique qui pourrait se retrouver dans les arguments évoqués plus haut : mais, justement, il s'agit là, dans une République de plus en plus oligarchique, d'une tentation liée à une conception « clientéliste » et « privatisée » du Pouvoir et non à une notion de Pouvoir comme « service public ». Quand la République et la monocratie pensent d'abord à « se servir », la Monarchie est là, d'abord et par principe même,  « pour servir » : la nuance est d'importance...

 

23/11/2010

Raisons pour la Monarchie.

Cette année, j’ai accepté de faire quelques cercles d’études et réunions dans le cadre du Groupe d’Action Royaliste auquel je participe, pas autant que je voudrai, malheureusement, faute de temps. Ainsi, le Cercle Lutétia (cercle d’études mensuel du GAR francilien) a débuté dimanche 21 novembre son cycle d’études de l’année par une approche générale des raisons pour la Monarchie, éternelles et contemporaines. Voici un bref résumé, évidemment bien incomplet, de mon propos.

 

Les raisons de notre royalisme plongent leurs racines dans l’histoire politique et nationale mais aussi dans l’étude des réalités contemporaines, au-delà des idéologies dominantes.

 

La comparaison des régimes politiques français sur le long terme est un argument fort pour la Monarchie, mais pas forcément suffisant dans le cadre du combat politique, souvent plus « immédiat » et plus concret : « les rois ont fait la France » est une formule dont la véracité n’échappe à personne aujourd’hui. Mais ce sont d’autres arguments, parfois « éternels » ceux-là aussi, qui marquent plus nettement les esprits : la transmission héréditaire de la magistrature suprême de l’Etat fonde et permet l’indépendance de l’Etat souverain, car la naissance, contrairement aux élections, ne s’achète pas et ne dépend pas des puissances susceptibles de financer des campagnes électorales de plus en plus coûteuses.

 

La Monarchie rend aussi possible, par son mode de transmission, l’unité du pays, au-delà des différences respectées et respectables, provinciales, professionnelles, religieuses ou politiques, et au-delà des générations qui se suivent et qui, chacune, sont marquées par leur mode de vie et de pensée propre.

 

Mais il y a des arguments qui sont, aujourd’hui, plus parlants peut-être encore, comme le fait que l’inscription dans le temps de la Monarchie, à travers les rois qui se succèdent de père en fils, permet une longue mémoire et impose au monarque de se projeter le plus loin possible dans l’avenir : cela fait du roi une personne d’Etat plus concernée encore que les autres (qui occupent des sièges parlementaires ou ministériels, par exemple) par les problèmes de préservation environnementale et planétaire…

 

De plus, à l’heure où l’austérité frappe notre société comme les autres sociétés européennes, la Monarchie apparaît désormais d’un moindre coût par rapport à la présidence dispendieuse d’un Nicolas Sarkozy : l’entretien de la Monarchie britannique, par exemple, coûte 75 centimes d’euros au contribuable britannique tandis qu’elle rapporte au pays environ 600 millions d’euros chaque année !

 

Toutes ces raisons et beaucoup d’autres encore seront développées lors des prochaines séances du Cercle Lutétia.