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10/09/2018

La sauvegarde nécessaire du patrimoine français.

Le Loto du patrimoine se déroule cette semaine et devrait rapporter environ 15 à 20 millions d'euros pour participer à la restauration de 270 sites en péril : cela peut sembler dérisoire au regard des enjeux et de l'importance de ce qui fait nos paysages historiques et l'identité de la France tout autant que sa mémoire vive. Mais, même si les sommes restent beaucoup trop modestes, c'est toujours mieux que rien et, surtout, c'est l'occasion de mettre en valeur quelques éléments de la richesse française et de sa civilisation bimillénaire, et de rappeler à nos contemporains que nous sommes des héritiers, que nous le voulions ou non.

 

Cette opération intervient au moment où le Brésil pleure son patrimoine détruit lors de l'incendie de l'ancien palais impérial devenu Musée national à Rio de Janeiro. « Créé en 1818 par le roi portugais João VI, il abritait notamment le squelette de Luzia, plus ancien humain découvert dans le pays, datant d'environ 11.000 ans », rapporte Le Pélerin dans son édition du 6 septembre, et environ 20 millions de pièces conservées en cet endroit ont disparu en une seule nuit, n'en laissant que cendres et regrets, colère aussi. Les raisons qui expliquent, non pas l'incendie mais son ampleur et ses conséquences dévastatrices, sont éminemment politiques, comme « les coupes budgétaires décidées par le gouvernement libéral et affectant, entre autres, l'entretien du bâtiment ». Cela doit nous alerter sur la précarité de ce qui est face aux événements toujours possibles de l'incendie, du vandalisme ou du vol, et nous inciter à prendre quelques précautions et quelques initiatives pour préserver, entretenir et, surtout, valoriser ce que nous possédons comme patrimoine physique, mais sans jamais négliger « l'esprit des choses », ce patrimoine immatériel et symbolique qui donne du sens aux monuments et aux objets d'hier et d'avant-hier.

 

Dans cette période de mondialisation qui tend à uniformiser les pensées et à dénier les identités particulières des États pour imposer un modèle à la fois mondial (société de consommation ; libre-échange ; primat de l'économie ; multiculturalisme ; etc.) et communautariste (religieux ou ethnique), la préservation du patrimoine français va bien au-delà de la seule protection des vieilles pierres ou des ensembles admirables : il s'agit de sauvegarder et d'entretenir ce qui nous mène de la terre au ciel, nos racines, variées, familiales et provinciales, et ce tronc commun qui se nourrit de toutes et les réunit toutes, la nation française, lui même décoré et enrichi d'influences diverses et parfois extérieures, au fil d'une histoire qui n'est pas finie.

 

Il y a un « devoir de patrimoine », qui doit permettre à la mémoire de se perpétuer sans être un carcan mais bien plutôt « la possibilité d'un destin ». Si chacun de nous, et aussi tous les amoureux de la France et de ses mille couleurs, de la Bretagne à l'Alsace, de la Provence au pays d'Ouche, de Paris à Lancieux, peuvent être les gardiens attentifs et attentionnés de ce riche patrimoine, il appartient à l’État de jouer son rôle historique et politique qui est de garantir sa bonne santé et sa transmission aux générations futures, non en organisant tout et en intervenant partout mais en mobilisant les énergies disponibles et en appelant les capitaux et le mécénat là où c'est possible, et en n'hésitant pas à mettre la main à la poche quand cela est nécessaire, comme le firent les rois qui se sont succédé depuis François Ier, puis les quelques présidents soucieux d'art et de mémoire, comme MM. de Gaulle et Pompidou, entre autres. M. Macron, qui inaugura son règne quinquennal dans la cour du Louvre royal, ne doit pas oublier que le décor de sa victoire doit aussi à ce lointain passé qui, en définitive, n'est jamais complètement dépassé, source d'une mémoire active et encore vive d'une réflexion politique qui pose le temps comme un élément fondateur de toute puissance pérenne et visible.

 

L’État ne doit pas être un simple organe d'administration économique, comme le souhaiteraient les adeptes d'un libéralisme oublieux du Bien commun et partagé ; il se doit d'être le protecteur des arts et des pierres qui fondent la nation, avant que d'en être le financier ultime si besoin est. Cela implique aussi de ne pas laisser le passé nous commander mais d'en préserver les fondations solides sans lesquelles il n'est pas d'avenir souverain possible : la France n'est pas, ne doit pas être un musée. Mais elle doit être elle-même, libre, dans une logique permanente de « tradition critique » et de « fidélité créatrice ». Le bon usage de notre riche patrimoine peut en être une illustration utile et, en tout cas, nécessaire : oublier cela serait, non seulement un risque pour la pérennité de ce qui est, mais un péril pour ce que nous sommes au regard du monde et de l'histoire...

 

 

 

 

04/07/2012

Les mausolées de Tombouctou.

La destruction par des salafistes maliens des mausolées et des anciennes mosquées de Tombouctou soulève l'indignation en France comme dans de nombreux pays africains et musulmans, et beaucoup y voient une marque d'obscurantisme, ce qu'elle est indéniablement, sans aller plus loin ni dans la mémoire ni dans la réflexion. Or, pratiquement au même moment, des promoteurs, pour « débloquer » un chantier gêné par des recherches archéologiques, faisaient détruire à coup de bulldozers les vestiges du port phénicien de Beyrouth, au Liban, ce qui n'a guère provoqué de débat et a juste coûté à l'entreprise dévastatrice une amende équivalente à environ 50.000 euros, somme absolument dérisoire au regard de celles engagées pour le chantier des promoteurs et de ce que va leur rapporter, par mètre carré, le lieu ainsi « libéré » d'une histoire encombrante... Que valent 3.000 ans d'histoire face aux centaines de millions d'euros que va rapporter ce chantier aux financiers et aux constructeurs ? Ainsi, l'avidité libérale peut être aussi vandalisatrice que la fureur islamiste !

 

Un article fort intéressant paru dans Libération, mardi 3 juillet 2012, tente d'expliquer les motivations des destructeurs de Tombouctou et rappelle qu'elles sont identiques à celles des talibans qui, en mars 2001, ont détruit à l'explosif les bouddhas de Bamiyan et brûlé environ 55.000 livres rares à Kaboul : « ce crime [ en Afghanistan] ne résulte nullement d'un coup de folie. Il avait été totalement prémédité, ayant même fait l'objet de discussions au sein de la Choura (grand conseil) qui regroupe les chefs du mouvement. (...) La destruction des bouddhas de Bamiyan s'inscrit dans la droite ligne d'un courant iconoclaste qui existe depuis la naissance de l'islam. Il se fonde notamment sur une sourate du Coran exhortant les fidèles à guerroyer les statues, assimilées à des idoles. (...) En Afghanistan, les mausolées des saints avaient été ostracisés par les talibans mais pas détruits. A Tombouctou, Ansar ed-Dine les a détruits purement et simplement, le culte des saints étant assimilé à de la superstition. » La destruction des tombeaux et la dispersion des ossements par les fondamentalistes apparaît, aux yeux des salafistes, comme un acte profondément religieux de « purification » et, au-delà, de volonté de rompre avec un « passé impie », avec ce qui représente pour eux une hérésie inacceptable au regard de la foi qu'ils prétendent incarner le plus concrètement possible...

 

Ce n'est pas une attitude réservée aux fondamentalistes salafistes, et l'histoire même de notre pays nous le confirme aisément, comme ces propos du républicain révolutionnaire Rabaut Saint-Etienne qui déclarait « Notre histoire n'est pas notre code » et ajoutait, comme l'a rappelé Alain Finkielkraut devant les élèves de Polytechnique à l'automne 2011 : « Tous les établissements en France couronnent le malheur du peuple. Pour le rendre heureux, il faut le renouveler, changer ses idées, changer ses lois, changer ses mœurs, changer les hommes, changer les choses, changer les mots... Tout détruire ; oui, tout détruire puisque tout est à recréer. ». Cette double politique de la purification et de l'amnésie organisée, au nom du monde à construire et de la pureté, révolutionnaire ou religieuse, est effectivement et forcément destructrice, et porte en elle ce que nous appelons vandalisme : la Révolution française, d’ailleurs, fut sans doute la période la plus iconoclaste de toute l'histoire de France du dernier millénaire, voire au-delà, et notre patrimoine en porte encore les stigmates. ou en rapporte le souvenir à travers son étude... Lorsque la République, par la voie de la Convention, décide de s'en prendre aux tombeaux des rois à Saint-Denis ou que les sans-culottes de Quimper dévastent la cathédrale Saint-Corentin tout en profanant les tombes qui s'y trouvent et en brandissant les crânes ainsi découverts au bout de piques, c'est toujours la même logique qui est à l’œuvre !

 

Mais aujourd'hui, nos pays, pourtant éloignés des fureurs maliennes, sont-ils à l'abri d'une telle politique dévastatrice ? Au regard des programmes scolaires et des manuels d'histoire, mais aussi d'une idéologie dominante qui impose une sorte de repentance permanente et ne raisonne plus qu'en termes de « droits de l'homme » au risque de ne pas comprendre notre histoire réelle, nos nations, aussi anciennes soient-elles, risquent l'amnésie et sont menacées de voir s'effacer des pans entiers de ce qui forme, en définitive, notre « vivre-ensemble ». Le risque n'est pas moindre que celui des destructions de Tombouctou : il s'agit ici, avec une société de consommation qui réduit tout à la marchandise ou indexe la liberté individuelle à la valeur financière, d'un effacement silencieux de nos « mausolées de la mémoire » au profit d'un individualisme consumériste, d'une immédiateté de la jouissance qui n'est rien d'autre qu'une forme d'addiction à la possession, à « l'avoir » au détriment de « l'être ». Il serait périlleux de négliger cette tendance lourde de nos propres sociétés trop communicantes « ici et maintenant » pour savoir encore transmettre à travers les générations qui se succèdent… La transmission prendra d’autres voies, faut-il espérer !

 

Quant à la situation au Mali, il ne faut pas se leurrer : malgré les rodomontades de l’UNESCO et des autorités légales de ce pays, Tombouctou, « la perle de l'islam », va sans doute perdre la plupart de ses trésors architecturaux et, au-delà des tombeaux et des mosquées, l'inquiétude concerne désormais les bibliothèques et les milliers de manuscrits multiséculaires qui risquent, eux aussi, de faire les frais de la rigueur doctrinale des salafistes... Quelques uns seront sauvés, certes, et, l'histoire ne s'arrêtant jamais, d'autres seront écrits et s'ajouteront à leur tour aux trésors de l'humanité, montrant par là-même la victoire constante de la vie sur les idéologies mortifères... Il y aura aussi, comme dans le roman d'anticipation de Ray Bradbury, « Fahrenheit 451 », des hommes et des femmes qui se transmettront les trésors d'hier par le souvenir et la parole...

 

Mais, pour l'heure, quel désastre et quelle pitié ! Cela doit nous inciter, nous-mêmes, à cultiver notre patrimoine, à l'entretenir, à le vivre sans exclusive, au-delà des illusions et des loisirs de la société de consommation : un arbre ne monte haut sans risquer la chute lors des tempêtes que lorsque ses racines sont profondes...

 

23/11/2010

Raisons pour la Monarchie.

Cette année, j’ai accepté de faire quelques cercles d’études et réunions dans le cadre du Groupe d’Action Royaliste auquel je participe, pas autant que je voudrai, malheureusement, faute de temps. Ainsi, le Cercle Lutétia (cercle d’études mensuel du GAR francilien) a débuté dimanche 21 novembre son cycle d’études de l’année par une approche générale des raisons pour la Monarchie, éternelles et contemporaines. Voici un bref résumé, évidemment bien incomplet, de mon propos.

 

Les raisons de notre royalisme plongent leurs racines dans l’histoire politique et nationale mais aussi dans l’étude des réalités contemporaines, au-delà des idéologies dominantes.

 

La comparaison des régimes politiques français sur le long terme est un argument fort pour la Monarchie, mais pas forcément suffisant dans le cadre du combat politique, souvent plus « immédiat » et plus concret : « les rois ont fait la France » est une formule dont la véracité n’échappe à personne aujourd’hui. Mais ce sont d’autres arguments, parfois « éternels » ceux-là aussi, qui marquent plus nettement les esprits : la transmission héréditaire de la magistrature suprême de l’Etat fonde et permet l’indépendance de l’Etat souverain, car la naissance, contrairement aux élections, ne s’achète pas et ne dépend pas des puissances susceptibles de financer des campagnes électorales de plus en plus coûteuses.

 

La Monarchie rend aussi possible, par son mode de transmission, l’unité du pays, au-delà des différences respectées et respectables, provinciales, professionnelles, religieuses ou politiques, et au-delà des générations qui se suivent et qui, chacune, sont marquées par leur mode de vie et de pensée propre.

 

Mais il y a des arguments qui sont, aujourd’hui, plus parlants peut-être encore, comme le fait que l’inscription dans le temps de la Monarchie, à travers les rois qui se succèdent de père en fils, permet une longue mémoire et impose au monarque de se projeter le plus loin possible dans l’avenir : cela fait du roi une personne d’Etat plus concernée encore que les autres (qui occupent des sièges parlementaires ou ministériels, par exemple) par les problèmes de préservation environnementale et planétaire…

 

De plus, à l’heure où l’austérité frappe notre société comme les autres sociétés européennes, la Monarchie apparaît désormais d’un moindre coût par rapport à la présidence dispendieuse d’un Nicolas Sarkozy : l’entretien de la Monarchie britannique, par exemple, coûte 75 centimes d’euros au contribuable britannique tandis qu’elle rapporte au pays environ 600 millions d’euros chaque année !

 

Toutes ces raisons et beaucoup d’autres encore seront développées lors des prochaines séances du Cercle Lutétia.