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11/05/2009

Lendemains de finale à Rennes.

J’étais samedi 9 mai à Rennes pour poursuivre la campagne électorale monarchiste : en cette « journée de l’Europe », il faut bien avouer que c’était plutôt la finale de la coupe de France de balle-au-pied entre deux clubs bretons qui passionnait les passants… Ainsi, entre le gros titre sportif du quotidien « Ouest-France » qui éclipsait largement les autres, et en particulier celui sur l’Europe, et la décoration des commerces et des rues aux couleurs noires et rouges (celles du Stade rennais), sans oublier les groupes de jeunes gens qui, bière à la main, chantaient (parfois horriblement faux…) la gloire et la victoire espérée de l’équipe rennaise, donnée favorite, tout rappelait la rencontre du soir et les espérances du public rennais, apparemment fondées si l’on en croyait la « logique sportive » et l’opinion commune : mais, là encore, « sondage n’est pas suffrage », et l’on connaît la suite et la victoire de Guingamp, petite ville de moins de 8.000 âmes, ancrée dans le monde rural. Certains ont d’ailleurs voulu voir dans cette finale entre Bretons une sorte d’affrontement entre monde urbain et monde rural, ce qui me semble un peu exagéré, même si les propos de certains Rennais, au soir de la défaite, s’en prenaient aux « ploucs » de Guingamp, renvoyé alors à son statut de petite ville « de campagne »…

 

Autant la journée avait été belle et l’ambiance sympathique dans les rues de la capitale de Bretagne, autant la nuit, elle, ressembla à une mauvaise fête : ainsi, en parcourant le centre-ville dimanche matin, j’ai constaté les dégâts, et ils étaient impressionnants… De la place des Lices à la place Sainte-Anne, il n’y avait pas un centimètre carré sans débris de verre, de cannettes, voire de fusées et de plastique brûlé, vestiges des désordres de la nuit. Les éboueurs, fatalistes, regardaient la scène sans beaucoup d’étonnement mais avec un certain agacement, et le ballet des camions de nettoyage semblait presque impuissant devant le gâchis.

 

En fait, ce qui est le plus gênant, c’est que cette scène n’est pas inédite à Rennes et, qu’au bout du compte, cela ne donne pas de la ville une image très positive ni, parfois, très rassurante… Cela gâche la fête et l’on sait trop bien que les attitudes de « quelques uns » (parfois nombreux…) peuvent avoir des conséquences tragiques, voire mortelles. J’y vois aussi la marque d’un certain ennui d’une partie de la jeunesse, pourtant culturellement éduquée et susceptible de réflexion, mais qui est livrée à elle-même, à une forme d’individualisme (mais « de masse ») qui, poussé à l’extrême, confine à un nihilisme dangereux, même s’il est, sans doute, passager : est-ce là un des aspects de « la société distractionnaire » que moquait Philippe Muray ? Ce n’est pas impossible. Ce n’est pas forcément rassurant…

 

Que l’on ne se méprenne pas sur mes propos : je ne dis pas que la fête mène forcément aux excès et, d’ailleurs, les excès ne sont pas tous de même nature, ni même forcément condamnables. Je me méfie de ceux qui voudraient tout encadrer de la vie humaine ! La liberté, après tout, ne se renifle pas, elle se respire, comme j’ai coutume de le dire. Mais l’individualisme, s’il est désormais une donnée fondamentale de notre société (ce que l’on peut regretter et que l’on peut combattre, mais c’est un fait qu’il est délicat de nier), doit être, pour ne pas devenir destructeur, surplombé par une autorité légitime, susceptible d’incarner, non « le premier des individualistes », mais « le bien commun », c’est-à-dire ce qui est la possibilité et l’équilibre des sociétés humaines, ce qui permet de ne pas oublier les autres et d’activer les solidarités concrètes. En somme, il n’y a de libertés pratiques et publiques que si la « loi de la jungle » ne domine pas les rapports humains : il est toujours temps de le rappeler…

 

06/05/2009

Que veulent les royalistes ?

Malgré leurs différences et leur diversité, on peut évoquer quelques idées dans lesquelles peuvent se reconnaître la plupart des royalistes :

 

-          L’attachement à la nation française et à son indépendance diplomatique, c’est-à-dire au refus de l’alignement systématique sur les Etats-Unis, alignement qui caractérise trop fréquemment les autres Etats d’Europe. Cela entraîne une certaine méfiance à l’égard de « l’Europe légale », celle de la Commission de Bruxelles et des eurocrates. Les royalistes sont, avec des nuances diverses, pour une Europe qui prenne en compte les nations, soit dans le cadre d’une Confédération (refus du « fédéralisme européen » ou de « l’Europe fédérale ») des Etats d’Europe, soit dans le cadre d’une Europe des cercles concentriques (un noyau dur constitué par quelques Etats-moteurs et une organisation de l’UE organisée en cercles concentriques selon le degré d’intégration des Etats dans les politiques communes de l’UE).

 

-          La volonté d’une instauration royale pour rendre à la France sa « tête » et sa « liberté d’Etat », sa souveraineté : c’est le cœur même de l’idéal royaliste, la monarchie royale « à la française » n’étant que le moyen institutionnel politique pour permettre au pays et à ses citoyens (et non-citoyens, ou citoyens en devenir) « d’être et de durer au monde ». L’instauration d’une Nouvelle Monarchie doit être, dans les années qui suivent l’acte d’instauration, légitimée par trois principes majeurs : 1 : unité nationale sur le plan intérieur comme en diplomatie, et fédératrice des « provinces unies de France »; 2 : souci environnemental ; 3 : justice sociale.

 

 

-          Une large décentralisation pour permettre une meilleure « respiration des communautés » (famille, commune, région, entreprise, etc.) et rendre leurs « pouvoirs » (libertés concrètes d’agir sur leur environnement social et politique proche) aux corps sociaux et aux personnes : c’est l’une des bases du combat royaliste qui peut se résumer selon la vieille formule : « L’autorité au sommet, les libertés à la base » ou « Sub rege, rei publicae » (Sous le roi, les libertés publiques). C’est aussi l’application politique du principe de subsidiarité. Le roi est juste le trait d’union entre les provinces, il est l’incarnation de l’unité nationale par delà les différences communautaires, provinciales ou religieuses : Louis XVI, d’ailleurs, s’adressait aux peuples de France (au pluriel)…

 

-          Une politique d’écologie durable qui n’est possible que par l’existence d’un « Etat durable », c’est-à-dire inscrit dans la durée et la permanence, la continuité, Etat qui ne peut être que la Monarchie à transmission héréditaire.

 

 

                                                                                                                 

04/05/2009

Ce 1er mai, à Paris...

J’étais à Paris dans l’après-midi du 1er mai, non loin du grand défilé syndical, et je profitais de mon passage dans la capitale pour glisser sous les vitrines des commerces des tracts monarchistes intitulés « La crise n’est pas une fatalité » et publiés par le Groupe d’Action Royaliste. J’en accrochais aussi quelques uns au pare-brise des voitures garées près du boulevard Saint-Germain, et quelques autocollants de l’Alliance Royale fleurissaient sur les lampadaires que je croisais… Après-midi ordinaire d’un militant royaliste !

 

Profitant de quelques rayons de soleil, je m’attardais ensuite à une terrasse de café, boulevard Saint-Michel, le titre de « L’Action Française » bien en évidence sur la table : « Contre les nouveaux privilégiés, une révolution royale ! ». Celui-ci m’a valu quelques regards étonnés tandis que, à quelques centaines de mètres de là, ma fidèle « roycomobile » subissait (sans que je le sache évidemment alors) la dégradation de sa décoration fleurdelysée par quelques mains indélicates…

 

En même temps que je sirotais mon café, j’écoutais les propos de mes voisins des tables proches, propos à la fois peu amènes à l’égard de M. Sarkozy, président qui, s’étant privé par son activisme du traditionnel fusible institutionnel qu’est généralement le premier ministre, focalise toutes les peurs et les ressentiments. La colère de mes voisins qui arboraient moult autocollants revendicatifs et partisans était à la fois sonore et… impuissante : en effet, ce qui m’a marqué, en cette heure de repos et d’écoute (le café est le parlement du peuple, disait Balzac, ce monarchiste subtil), c’est une sorte de fatalisme colérique assez étrange.

 

Je m’explique : ces manifestants avaient marché, hurlé, tempêté ; ils s’étaient réconforté au milieu d’une foule colorée qui semblait agitée du même souffle, de la même houle, et pourtant, ils semblaient ne rien en attendre de plus, comme s’ils avaient accompli un rituel nécessaire et ordinaire, et qu’ils savaient que, « demain, rien n’aura changé »… Fatalisme étonnant et même surprenant à l’heure où les médias posaient la question d’un possible « Mai 2009 » !

 

Cela ne laisse d’être inquiétant, d’une certaine manière, car cette absence apparente de débouchés politique à la colère pourrait bien entraîner, au-delà de la « fatigue démocratique » évoquée par Bruno Frappat il y a quelques années déjà dans « La Croix », de cruelles épreuves pour nos sociétés. Les syndicats, trop souvent décrédibilisés (à tort ou à raison, la réponse n’est d’ailleurs pas si simple), mais aussi les partis, semblent désormais incapables de canaliser le lit d’un fleuve populaire dont la colère bouillonne et pourrait bien effondrer les digues du système démocratique classique, au risque, peut-être, d’une désespérance nihiliste sans retour.

 

« Tout est possible », mais il n’est pas certain que cela soit toujours pour le meilleur… Néanmoins, l’erreur serait de croire qu’il ne peut pas, aussi, en sortir du bon : au-delà des inquiétudes que j’exprime ici, je ne peux m’empêcher de penser qu’ « une autre voie » est possible et que le rôle politique, historique, des monarchistes est de « savoir prendre le taureau par les cornes » et d’avancer, à visage découvert, sur ce terrain social dangereux mais susceptible de « belles renaissances ». Les colères d’un Georges Bernanos, les fortes raisons d’un Thierry Maulnier ou, plus proche de nous, d’un Bertrand Renouvin, les éternels combats d’un René de La Tour du Pin  ou d’un Albert de Mun, tout cela n’a pas été vain et peut fournir, sinon de simples arguments, l’état d’esprit nécessaire pour comprendre la question sociale et, encore plus important, pour pouvoir la traiter, sans démagogie mais avec détermination, dans le sens de la toujours nécessaire justice (justesse, aussi) sociale. Justice sociale sans laquelle il n’est pas de société équilibrée et apaisée. Justice sociale que la République, celle issue du Fouquet’s et du règne des Nicolas Fouquet, semble négliger, particulièrement à la tête de l’Etat qui, pourtant, devrait être, sinon toujours exemplaire, du moins digne et arbitrale, protectrice des citoyens face aux excès de l’Economie sauvage.

 

Firmin Bacconnier, ce royaliste social aujourd’hui (à tort) bien oublié, résumait ses espérances par la formule : « La Monarchie sera populaire, ou elle ne sera pas ! ».

 

Les monarchistes n’ont pas vocation à sauvegarder les prébendes de ceux qui ont oublié leurs devoirs sociaux. Ni à tomber dans le piège égalitariste tout aussi scandaleux et, l’histoire l’a maintes fois prouvé, souvent malfaisant et terrible. Mais il leur appartient de rappeler que, comme le clame « La Royale », ce vieux chant royaliste d’Action Française : « le roi, seul fort, protégeait les petits ».

 

Un manifestant du 1er mai, voyant le titre « Une révolution royale ! » près de ma tasse presque vide, hocha la tête avec un sourire un peu las, semblant me dire silencieusement : « Après tout, pourquoi pas ? »… Sur le bitume parisien, le parfum d’une espérance, celle de Senlis…