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19/01/2011

La retraite à 67 ans ?

La réforme des retraites a été menée tambour battant l’automne dernier, relevant l’âge de la retraite à 62 ans malgré les protestations d’une partie conséquente de l’opinion publique, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, d’ailleurs. Mais il semble que cette réforme soit déjà obsolète si l’on en croit le gouvernement allemand qui, comme le rapporte les pages économie du « Figaro » du mercredi 19 janvier, souhaiterait « obtenir en échange [de son aide financière au fonds de secours européen aux pays en difficulté de la zone euro] que tous les pays de l’eurozone acceptent de repousser l’âge de la retraite à 67 ans ».

 

Cette proposition a été avancée il y a peu et cherche aussi à répondre à la montée des mécontentements en Allemagne : « Face aux responsables de la majorité parlementaire, le patron du groupe CDU du Bundestag, Volker Kauder, a lancé lundi soir [le 17 janvier] un ballon d’essai au nom de la chancelière, rapporte le quotidien [Financial Times Deutschland]. « Nous voulons imposer des standards communs pour toute l’Europe », a-t-il ainsi affirmé en citant l’exemple du frein à la dette, puis celui de la retraite à 67 ans, adoptée par l’Allemagne. » Le gouvernement allemand souhaite d’ailleurs que les décisions soient prises d’ici le Conseil européen de mars prochain…

 

Ainsi, au nom de la sauvegarde de la monnaie unique, mais aussi de la « nécessaire harmonisation européenne », le gouvernement français pourrait, dans quelques mois, se dire obligé de relever à nouveau, à peine la réforme des retraites de l’automne entrée en application, l’âge légal de départ à la retraite ! Car refuser ce que l’on pourrait sans exagération qualifier de « diktat » allemand, nous expliquera alors le gouvernement, pourrait entraîner des conséquences graves pour l’euro, voire pour l’Union européenne, et risquerait d’isoler la France en Europe…

 

D’ailleurs, que risque le gouvernement de la République ? La contestation de la réforme des retraites, cet automne, a épuisé les syndicats et les protestataires sans faire céder d’un pouce le Pouvoir en place. Et « l’Europe » est devenue une « fatalité » que les Français sont tenus d’accepter, au nom d’un obligatoire « sens de l’histoire » dont on sait pourtant qu’il n’existe pas, ou, en tout cas, qu’il n’est pas (si l’on croit qu’il en existe un, ce qui n’est pas mon cas), loin s’en faut, « sens unique ».

 

Eh bien non, mille fois non ! La France ne doit pas, cette fois-ci, céder aux injonctions de Berlin, même au nom de la pseudo « solidarité européenne » (sic !) dont on sait qu’elle est si peu sensible au sort des plus faibles.

 

Il va bien falloir forcer les gouvernements et les institutions de l’Union européenne à réfléchir à d’autres pistes que celles qui consistent à toujours « taper » sur les travailleurs et sur les classes moyennes et populaires ! Et, s’il est des efforts nécessaires, qu’ils soient répartis entre tous, en tenant compte de ce qui est tout aussi nécessaire, la justice sociale !

 

 

 

Jean Dutourd, ce royaliste.

 Lundi soir, je flânais dans Paris, des journaux pleins les bras et le nez au vent, le sacré-coeur chouan en épinglette sur mon manteau et, comme d'habitude, mes pas m'ont mené chez Boulinier, vaste débarras de livres, disques et films dans lequel il m'est arrivé plus d'une fois de trouver quelques raretés et pépites, autant livresques que cinématographiques. Pour une fois, j'ai été raisonnable, n'achetant qu'un vieux livre de Stéphane Bern des années 80 intitulé « L'Europe des rois », au demeurant très instructif malgré son ancienneté (relative), pour la somme modique d'un euro !

 

Parmi les autres livres en rayon, « Le feld-maréchal von Bonaparte », de Jean Dutourd : un livre que j'ai lu lorsqu'il est paru au milieu des années 90, un véritable brûlot « contre-révolutionnaire » sous la forme d'une uchronie mais aussi un essai qui remettait en valeur la monarchie et son oeuvre comparées aux régimes qui suivirent. Négligemment, je me suis mis à feuilleter cet ouvrage, m'arrêtant sur quelques passages qu'il serait utile de rappeler aux « oublieux » de notre histoire ou aux républicanistes idolâtres.

 

Tiens, celui-ci : « Tant qu'il y avait un roi et que le roi ressuscitait périodiquement, le peuple sentait sur lui une autorité paternelle et protectrice, même si parfois cette autorité se manifestait rudement, voire inhumainement (ou ne se manifestait pas, ce qui était encore plus douloureux). Le roi avait l'inestimable privilège d'être le fils de son père, lequel était le fils de son père également, et ainsi de suite jusque dans la nuit des temps (c'est-à-dire jusqu'à Hugues Capet puisque, depuis lui, la même famille était assise sur le trône). Bref, le roi, fût-il tout juste majeur, fût-il un gamin de treize ans, était très vieux, bien plus vieux que le peuple, et de ce fait plus savant, plus capable, voire infaillible ; il était le patriarche qui conduisait la nation au ciel. Mieux encore, grâce à lui le pays, ayant été renversé, navré, laissé pour mort, finissait par reprendre la position verticale, et conséquemment par retrouver sa fierté, comme si le roi eût été un facteur d'équilibre ; quelque chose comme le bloc de plomb à la base des poupées de bois, qui les maintient en équilibre. »

 

Ou, plus loin : « La France de l'Ancien Régime était protégée du pouvoir dit « absolu » par une infinité d'habitudes et d'avantages locaux qui, à force d'exister et de durer, avaient fini par devenir intouchables. » Ce que les royalistes du XIXe siècle résumaient par la formule « Les républiques françaises sous le patronage et l'arbitrage du roi », ou « Sub rege, rei publicae »...

 

J'ai refermé le livre avec un sourire et j'ai repris le métro pour rentrer tranquillement chez moi.

 

Ce mardi matin, un ami m'a envoyé un texto fort bref : « Jean Dutourd est mort cette nuit ». Au moment même où je lisais sa charge contre-révolutionnaire !

 

Ce soir, j'ai repris « Le feld-maréchal von Bonaparte » et je passe cette nuit, trop froide, à le relire : non, Dutourd n'est pas mort, puisqu'il reste ses livres, ses phrases, ses mots...

 

J'irai déposer une brassée de lys sur votre tombe, M. Dutourd : que ces fleurs de la fidélité vous accompagnent dans le Grand voyage...

 

 

17/01/2011

Le cynisme des agences de notation.

La révolution n'est pas encore finie en Tunisie et tous les possibles restent envisageables, entre démocratie et, même, dictature : à l'heure qu'il est, rien n'est encore sûr, si ce n'est que tous les acteurs institutionnels ont intérêt à en finir le plus vite possible avec les désordres et l'incertitude, ne serait-ce que pour rassurer les investisseurs et les touristes qui remplissent d'ordinaire les caisses du pays...

 

Mais les agences de notation, celles-là mêmes qui menacent régulièrement les pays de la zone euro de dégrader leur note pour des raisons pas toujours très claires, ne laissent aucun répit à la Tunisie : ainsi, le site internet du « Figaro » signalait vendredi soir que « l'agence de notation Fitch a placé la note BBB de la Tunisie sous surveillance négative. Cette décision « reflète l'éclatement soudain et imprévu d'un risque politique et les incertitudes politiques et économiques » qui en découlent. ». En somme, la révolution est un risque, ce qui n'est pas vraiment une surprise, et la stabilité antérieure était, aux yeux de l'agence, bien préférable... Comme quoi la question du régime politique n'intéresse les économistes que sous l'angle des affaires (et des profits) potentiels et non sous celui de la justice sociale ou de la liberté politique, ce qui « légitime » (sic!) sans doute la véritable sinophilie qui s'est emparé des milieux industriels et boursiers ces dernières années !

 

Mais le cynisme de Fitch ne s'arrête pas là : « La promesse d'élections anticipées ainsi que d'une ouverture du système politique introduit des incertitudes supplémentaires », poursuit le communiqué de l'agence de notation. En somme, « l'ouverture du système politique » n'est vraiment pas une bonne chose, si l'on comprend bien l'agence, car elle représente ce que détestent ces milieux d'affaires qui pourtant se réclament du libéralisme et du libre jeu du Marché : le risque ! Il y aurait beaucoup à dire sur la duplicité de ces agences qui ne cessent de réclamer une déréglementation et un démantèlement de la fonction publique d'Etat mais ne supportent pas que leurs activités soient dérangées par de misérables événements politiques ou la contestation d'un régime dictatorial...

 

Cette arrogance des milieux d'affaires devra bien, un jour, être contrecarrée par une politique d'Etat qui privilégiera les hommes et les sociétés, la justice sociale et la parole politique elle-même : en France, la monarchie a jadis montré qu'elle savait agir, y compris contre les intérêts des plus riches, et qu'elle n'hésitait pas à s'imposer aux féodalités économiques, au risque de déplaire à celles-ci qui n'eurent alors de cesse de l'affaiblir pour mieux installer leur propre règne.

 

Si cette agence de notation avait eu quelque conscience ou morale, elle aurait suspendu pour quelques semaines ses jugements sur la Tunisie, le temps que la situation s'éclaircisse (en bien ou en mal, d'ailleurs...) et elle aurait évité de jeter de l'huile sur le feu, au risque de pénaliser un peu plus un pays déjà en difficulté ! Mais la cupidité est, non pas une seconde nature, mais bien la première de ce genre d'agences qui ne créent rien mais vivent de leurs chantages à l'égard des pays qu'ils notent dans une logique purement spéculative.

 

Il est temps que le politique reprenne ses droits, et pas seulement en France...