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25/05/2008

Nature.

C’était, ce ouiquende, la fête de la nature organisée par le magazine Terre sauvage et de nombreuses institutions attachées à la protection et à la mise en valeur de l’environnement : plus de 1.500 manifestations gratuites se sont ainsi déroulées, destinées à faire découvrir et apprécier la diversité de notre nature française, aussi riche que nos terroirs et nos villes, elles aussi concernées par cette fête. Le journal « La Croix » y a consacré un intéressant dossier dans son édition du vendredi 23 mai et il faudrait citer tous les articles publiés dans icelui : je me contenterai de quelques phrases glanées au fil de la lecture, et qui rejoignent et étayent mes préoccupations environnementales, qui sont aussi éminemment politiques et civiques.

 

Ainsi, le président du Conservatoire du patrimoine naturel de la Savoie, Eric de Kermel, souligne que « la préservation des milieux naturels doit être au cœur de toutes les politiques d’aménagement du territoire.

 

Elle implique que la politique de la nature soit animée par tous ceux qui en sont les usagers : agriculteurs, associations de protection de la nature, aménageurs et collectivités locales, pratiquants des loisirs de nature ». Il oublie de citer l’Etat français lui-même qui doit jouer son rôle d’initiateur et de soutien, voire d’arbitre lorsque des intérêts divergents sont engagés : l’idée, intéressante, du « Grenelle de l’environnement » qui a permis de mettre autour d’une même table les principaux acteurs environnementaux et économiques était une bonne initiative mais dont les résultats, claironnés triomphalement à l’automne, apparaissent désormais comme fort… mitigés (dans le meilleur des cas), voire inexistants dans d’autres, sans même parler de l’affaire des OGM. D’autre part, il n’y aura de véritable politique d’aménagement du territoire que si l’Etat est assez décidé et ferme pour lui donner l’impulsion et l’organiser dans ses grandes lignes de force au niveau national, quitte ensuite aux collectivités locales à l’amender ou à le pratiquer librement mais dans le respect de la pensée initiale de cette réorganisation du pays, plus que jamais nécessaire.

 

C’est aussi  et d’autant plus vrai pour la mise en place de « la trame verte et bleue » évoqué dans l’engagement 73 du Grenelle de l’environnement et que rappelle et développe le responsable du pôle nature de France Nature Environnement, Christophe Aubel : « Faire une trame verte et bleue ce n’est pas seulement faire des corridors pour la grande faune vertébrée. (…)

 

On comprend bien que si ces corridors forestiers sont pertinents pour les grands ongulés, les oiseaux migrateurs auront eux besoin d’escales régulières sur le littoral. Tandis qu’ailleurs c’est un réseau de mares qu’il faudra préserver, un maillage de haies qu’il faudra restaurer, des écosystèmes humides qu’il faudra maintenir le long d’une rivière, ou des bords d’autoroute qu’il faudra éviter de rendre imperméable à toute vie…

 

C’est en maintenant des réseaux que l’on permettra un bon fonctionnement des écosystèmes, et le maintien des services rendus par la biodiversité. » C’est aussi vrai pour l’intérieur des terres que pour nos littoraux, pour la préservation des ressources halieutiques aujourd’hui menacées dans leur variété comme dans leur pérennité. Or, la France peut agir concrètement et de manière influente en Europe et au-delà : en particulier par son outre-mer encore important et éminemment stratégique dans le monde, y compris en ce domaine de la protection environnementale qui ne peut être abandonnée aux jeux du seul Marché, peu raisonnable en ce domaine comme on a pu le constater avec l’affaire (et la disparition) de la morue de Terre Neuve, victime d’une surpêche commerciale et, en définitive, mortifère… N’oublions pas non plus que la France possède, grâce à ses possessions d’outre-mer, le deuxième espace maritime du monde, ce qui n’est pas rien : que l’Etat français agisse en ses territoires a, alors, un véritable poids que ne peuvent négliger les autres pays du monde, aussi puissants soient-ils.

 

D’autre part, « faire une trame verte et bleue ce n’est pas mettre la nature sous cloche » et elle se doit de concilier protection de l’environnement et développement des territoires : là encore, une politique d’aménagement du territoire intelligente doit tenir compte des réalités humaines et des nécessités environnementales, et c’est ce travail d’équilibre que l’Etat doit arbitrer entre les différents acteurs et intérêts des territoires. C’est un formidable défi qu’il appartient à la France de relever : cela ne se fera pas aussi facilement que sur le papier (qui souffre tout, comme on le sait), mais l’engagement fort de la France peut donner des idées à nos voisins, ce qui ne doit pas empêcher notre pays de s’inspirer des expériences étrangères en ce domaine, parfois fort enrichissantes et réussies.

 

Néanmoins, si l’Etat doit jouer un grand rôle dans cette affaire en pensant et assumant le « souci environnemental », cela ne doit pas dispenser les collectivités locales et les citoyens de s’impliquer dans cette politique : il en va de leur qualité de vie et des héritages naturels que nos générations transmettront à celles qui s’annoncent. Sensibiliser les populations à la protection de la nature, but de cette double journée de la fête de la nature, est utile, au moment même où nos contemporains commencent à ressentir les effets de la « bousculade terrestre » qui fait trembler les colonnes mêmes de notre monde et, en tout cas, de notre modèle de société, trop consumériste pour être, à long terme, viable et supportable par la Terre.

 

 

 

24/04/2008

Présidentialisation ou régence ?

La Constitution de la Vème République n’en finit plus d’être modifiée, triturée, et aujourd’hui « sarkozysée » : il n’y a plus une année sans Congrès à Versailles pour un nouvel arrangement constitutionnel, au point que l’esprit des institutions voulues par le général de Gaulle semble bien mal en point. Notre pays à la liberté retrouvée à l’époque gaullienne, dans une certaine tradition capétienne, est devenu une simple province touristique de cette « Europe » qui, elle non plus, n’est plus libre de ses mouvements, prisonnière de la politique états-unienne, pour le meilleur et pour le pire, dans le cadre de l’Otan, véritable bras armé de la diplomatie de Washington. Ce ne sont pas les piètres arguments de M. Hervé Morin, ministricule de la Défense, qui pourront me démentir, à l’heure où celui vante cette « alliance emprisonnante » tout en rechignant à faire construire un second porte-avions, cela au moment même où la Chine et d’autres pays, pourtant beaucoup plus « pacifistes », s’en procurent, et que nous n’avons plus AUCUN porte-avions sur les mers actuellement (le Charles-de-Gaulle est immobilisé à quai encore un an…). Comment peut-on alors peser sur une scène internationale de plus en plus mouvante et sur laquelle montrer sa force (sans avoir à s’en servir toujours, heureusement !) est le meilleur moyen d’être crédible et d’être, simplement, écouté ? En tout cas, les modifications constitutionnelles, nouvelle « habitude institutionnelle » comme on pourrait ironiser, vident la Vème de sa substance et, tout royaliste que je suis, je n’en suis pas satisfait car, dans l’époque actuelle, c’est affaiblir ce qui pouvait rester de « capétien » dans une Constitution que de Gaulle envisageait peut-être comme une forme de « régence », en attente d’une vraie Monarchie… Ainsi, la volonté du Président Sarkozy de se présenter pour promouvoir et défendre sa politique devant les parlementaires (ce qui aujourd’hui le rôle du premier ministre) ne me semble rien d’autre qu’une forme de présidentialisation qui, loin de rapprocher d’une logique monarchique traditionnelle française, rapproche d’une véritable formule « monocratique » de la République et qui, en même temps, risque, au contraire de ce qui est évoqué par ses partisans, de transformer le Parlement en simple chambre d’enregistrement bavarde et « spectaculaire »… Etant plutôt méfiant à l’égard de la Chambre des députés (vieux reste d’antiparlementarisme hérité de 1934 et de 1958 ?), je suis partisan d’une forme de bicaméralisme dans laquelle le Sénat serait une Chambre des provinces, des communes et des métiers, et la Chambre des députés, une assemblée représentative des grandes (mais aussi des petites, qui ont aussi des choses à dire, parfois fort intéressantes) mouvances politiques partisanes, chargée de débattre et de proposer plutôt que de décider pour tous les aspects de la vie du pays, souvent en n’étant d’ailleurs depuis des années que la chambre de retranscription des directives européennes en lois françaises… Je suis plutôt partisan d’une décentralisation législative qui redonne une partie des compétences actuelles des assemblées parisiennes aux assemblées régionales et aux conseils municipaux, avec un  Etat arbitral qui puisse garantir un certain équilibre entre les instances décentralisées et une meilleure redistribution des ressources disponibles, un Etat qui donne la direction générale et représente la nation à l’extérieur… En somme, un Etat dégraissé mais « musclé » ; un Etat fort mais juste, qui soit capable de rester ferme face aux groupes financiers et économiques et qui ne laisse pas ceux-ci décider à la place du Politique ; un Etat libre et libérateur qui rende la parole aux citoyens et à leurs corps civiques, et évite l’omniprésence administrative tout comme l’abstention et l’absence politique (cas de notre actuelle République…) ; etc. Si la Vème République a perdu beaucoup de son sens et intérêt premiers, elle reste tout de même une référence importante qu’il serait dommage de sacrifier sur l’autel d’un « changement pour le changement », souvent démagogique et vain par essence. Je ne suis pas un nostalgique de la République gaullienne mais je reconnais facilement qu’elle a restauré le sens de l’Etat et de sa liberté, et ce sont des éléments forts pour une France qui ne s’ignore pas. Cette « régence du nationalisme », si elle reste incomplète (comme toute régence…), mérite d’être préservée et améliorée, en attendant mieux…

12/02/2008

Etat et industrie : l'exemple d'Alstom.

Dans une actualité plutôt morose, il est des bonnes nouvelles qui passent presque inaperçues, et c’est dommage car elles méritent tout autant l’attention que les autres. Ainsi, la présentation du nouveau train rapide d’Alstom, l’automotrice à grande vitesse (AGV), qui prouve qu’une entreprise moribonde il y a quelques années peut rebondir avec de la volonté et de l’astuce : en parodiant Maurras, j’oserai dire que « le désespoir en industrie est une sottise absolue ».

 

Dans un article fort intéressant publié dans « La Croix », mercredi 6 février 2008, quelques explications sont avancées à ce renouveau dont le politique n’est pas absente et que M. Sarkozy, ministre de l’économie et des finances lorsque l’entreprise apparaissait condamnée, a rappelé : « Venu assister à la présentation de ce « TGV de quatrième génération », Nicolas Sarkozy en a profité pour prononcer un discours offensif en faveur de l’industrie. Improvisant à de multiples reprises, il a placé un certain nombre de banderilles à l’égard de la spéculation financière, de l’Europe, et de la concurrence, qu’il ne veut pas voir s’opposer à l’industrie. « Si une politique de concurrence efficace est un stimulant, et le monopole un danger, a-t-il martelé, une politique de concurrence efficace doit regarder à moyen terme ce que doit être le paysage d’une industrie. »

 

Il a pris un malin plaisir à souligner qu’en 2003-2004, Alstom était moribond, mais que Bruxelles lui demandait alors que l’Etat n’intervienne pas. Et d’indiquer que sa volonté politique comme ministre de l’économie, à l’époque, et celle de Patrick Kron [le PDG d’Alstom] ont permis alors son sauvetage, avec l’entrée à hauteur de 22 % dans le capital de l’entreprise. Après sa visite à Gandrange (Moselle), lundi, le président de la République a encore indiqué que l’Etat doit « sauver des emplois », qu’il doit contribuer à aider les sites industriels en difficulté avant de se préoccuper de trouver des plans sociaux qui ont la particularité, a-t-il encore précisé, de générer des « dépressions chez les salariés, et dans les régions où sont installées ces entreprises que l’on ferme ». Alors qu’il devait recevoir Michel Rollier, un des cogérants de Michelin, hier en fin d’après-midi, à l’Elysée, il a expliqué, à propos du site de Toul (Moselle), que le constructeur veut fermer, que « l’Etat doit investir pour la revitalisation des territoires ainsi sinistrés ». »

 

Ces déclarations présidentielles, au-delà de ce que l’on éprouver à l’égard du président actuel, ne peuvent être ignorées et me semblent aller dans le bon sens, dans celui d’une politique industrielle « néo-colbertiste » que j’appelle de mes vœux, d’une politique qui ne laisse pas le seul Marché maître de l’économie et des finances, et qui réintroduit l’Etat dans le jeu, comme un arbitre actif et, parfois, acteur pour éviter de n’être que soigneur du social… Un Etat qui se souvient qu’il a un rôle à jouer et qu’il ne peut être simplement un spectateur des luttes entre groupes financiers ; un Etat qui préserve ce qui doit l’être pour assurer la cohésion et la justice sociales ; un Etat politique, en somme, qui n’est pas « providence » mais initiateur, promoteur, ambitieux ; un Etat qui refuse l’étatisme mais assume ses devoirs sociaux.

 

Reste à voir ce que deviendront ces déclarations présidentielles lorsque viendront les tempêtes qui s’approchent et lorsque les instances de l’Union européenne ou celles de l’Organisation Mondiale du Commerce feront valoir les « règles de la libre concurrence »… Sans doute faudra-t-il alors batailler ferme, et pas seulement au niveau gouvernemental, pour imposer aux oligarchies mondiales le respect des règles du Bien commun qui ne se limite pas, d’ailleurs, à notre seul pays…