Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

09/05/2008

9 mai, journée de "l'Europe".

(Je me permets de republier un article déjà mis en ligne sur mon précédent blogue il y a 2 ans, à l'occasion de la "journée de l'Europe", car il me semble avoir gardé un certain intérêt...) 

 

 

 

 

Le 9 mai est, depuis quelques années, institué « journée de l’Europe » et c’est l’occasion d’une vaste promotion (certains diraient propagande…) pour les bienfaits de l’Union européenne, présentée comme seul et unique horizon glorieux des habitants du continent européen et parfois au-delà, puisque l’Union n’est pas, ne se veut pas, une entité purement géographique ni même seulement « européenne »… Un an après le rejet de la Constitution européenne, pour des raisons d’ailleurs fort diverses et parfois contradictoires, par les Français et les Néerlandais, les partisans de l’U.E. reprennent l’offensive et en particulier en direction des plus jeunes, par le biais de l’Education Nationale : ainsi, des « kits » destinés aux enseignants ont été envoyés à ceux-ci pour propager la « bonne nouvelle ». J’ai bien sûr reçu ce kit qui se compose d’une affiche, d’un quiz européen et d’un prospectus sur la citoyenneté européenne qui me fait penser à un prospectus d’agence de voyages : d’ailleurs, à lire ce dernier, l’Union européenne c’est vraiment formidable et surtout sans souci… En U.E., « tout le monde, il est beau ; tout le monde, il est gentil », pour reprendre le titre et l’esprit du film éponyme de Jean Yanne. Que ce 9 mai soit l’occasion de présenter l’Union européenne, son histoire et ses institutions, ses projets et ses perspectives, cela n’a rien en soi pour me choquer.

Mais, que cela soit juste une « opération séduction » sans véritable discussion, sans évocation des débats importants qui se posent en U.E., sans esprit critique ni recul même par rapport à certains problèmes actuels, cela me semble fort malsain et s’apparente à la politique de la « République obligatoire » qu’a pratiquée la IIIe République à travers sa stratégie scolaire, si peu respectueuse des traditions et des libertés provinciales mais aussi de l’histoire française au point, parfois, de la travestir de façon ridicule. En veut-on un exemple ? alors, prenons l’événement que, justement, l’on commémore ce 9 mai, la fameuse déclaration de Robert Schuman, alors ministre français des Affaires étrangères, le 9 mai 1950 et annonçant la CECA  : elle fut préparée dans le plus grand secret, rédigée en fait dans ses grandes lignes par Jean Monnet ; les ministres français, pourtant collègues de Schuman, tout comme les diplomates du Quai d’Orsay, ne furent même pas prévenus de ce qu’elle contenait, mais, par contre, Schuman en informa … le chancelier fédéral d’Allemagne de l’Ouest et les dirigeants états-uniens… Comme le signale Michel Clapié, auteur du manuel « Institutions européennes » (Champs Université ; Flammarion ; 2003), et à qui je dois d’avoir beaucoup appris sur la manière dont s’est construite et se construit toujours l’U.E. : « La gestation de cette Déclaration ne fut donc pas un « modèle de transparence démocratique » »…

D’autre part, il serait intéressant de relire cette fameuse déclaration qui annonce aussi la stratégie européiste vers ce que Schuman appelle la « Fédération européenne » : on comprend mieux alors pourquoi De Gaulle s’y oppose et pourquoi Schuman, dès le retour du Général à la tête de l’Etat, rentre dans une opposition acharnée à l’homme du 18 juin 40, alors que ce dernier lui avait évité, à la Libération, « un procès que son attitude pendant le conflit [la seconde guerre mondiale] incitait certains à lui faire » (Michel Clapié, dans le livre cité plus haut, page 373). Effectivement, petit détail « amusant », Schuman fut membre du Gouvernement Pétain du 16 mai au 17 juillet 1940, et il a voté les « pleins pouvoirs » au Maréchal Pétain le 10 juillet… De plus, malgré sa foi chrétienne et son anti-nazisme avéré, il se refusera à rentrer dans la Résistance, préférant (mais après tout, pourquoi pas ?) une vie monastique pendant laquelle il prie pour la paix, en attendant des jours meilleurs… On peut néanmoins préférer la foi combattante d’un Honoré d’Estienne d’Orves, d’un Colonel Rémy ou d’un De Gaulle…

Alors, je veux bien que l’on fête l’Union européenne le 9 mai ou un autre jour, mais cela ne doit pas empêcher de penser librement à l’Europe sans céder à la tentation de la propagande ou de la sacralisation…

03/05/2008

Etats unis d'Europe ?

« Comme l’on n’a pas coutume de prêcher la santé aux gens qui se portent bien, l’on peut affirmer que les périodes où l’on prêche la paix et l’union des peuples sont celles précisément où les dits peuples se replient sur eux-mêmes et où les menaces de guerre et les rivalités se voient sans lunettes. (…)

 

Les Etats unis d’Europe ne sont pas pour demain mais on peut parier qu’ils serviront de prétexte à de nouveaux sacrifices que les Français seront pressés, non de consentir car leur avis ne sera pas demandé, mais de saluer d’enthousiastes approbations : simple question de presse. Et ce qui inquiète c’est que le mot d’ordre officiel est de minimiser l’idée de patrie au profit des ententes internationales, comme s’il y avait opposition formelle entre un patriotisme vigoureux et le goût de la paix. Signe des temps ! l’on a peine à voir, sous la conduite de pasteurs respectables, ordinairement plus avisés, une partie de la plus saine portion du peuple français, s’attacher à de telles billevesées. Il n’est pas besoin d’être prophète pour avoir la certitude que cela finira mal. (…)

 

Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre que la démocratie universelle rendrait plus rigoureux encore l’esclavage de l’humanité. Servir anonymement des maîtres anonymes manieurs d’argent, sans aucun recours ni moyen de défense, tel serait le sort peu enviable préparé à l’immense multitude. Et, de même que dans le cadre national, la seule garantie des citoyens est d’appartenir à des sociétés naturelles bien organisées et solides : famille, région, métier, dont la nation elle-même se trouve renforcée, de même le citoyen du monde ne pourra sauvegarder son indépendance qu’à la condition de n’être pas seul en face des maîtres formidables – et anonymes, répétons-le – de la planète. Il sera donc prudent de ne pas s’écarter du vieux cadre national, aussi solidement établi que possible. En deux mots les Etats unis de l’Europe et du monde postulent, pour pouvoir se constituer sans être une effroyable régression pour la dignité humaine, des patries prospères, conscientes de ce qu’elles représentent et des intérêts qu’elles ont à faire valoir. »

 

On pourrait croire que ces lignes sont récentes et qu’elles évoquent, entre autres, le refus des Etats de l’Union européenne de faire voter leurs citoyens respectifs sur le nouveau traité constitutionnel européen, « dépossession » des citoyens de leur propre avis électoral, rupture affirmée entre le « pays légal » qui décide en arguant de la « démocratie représentative », et le « pays réel » qui se voit cantonné au simple choix démocratique des « partis de gouvernement »… Mais, ces lignes viennent de loin, et sont extraites d’un article du bulletin mensuel des groupes d’Action Française de la Mayenne, « Le Maine », publié à l’automne 1929. Elles restent, me semble-t-il, d’une étonnante actualité… Malheureusement, pourrait-on ajouter, car cela indique que, depuis cette année 1929, il manque toujours à la tête de l’Etat ce magistrat suprême qui ne doive rien aux oligarques, à ces « maîtres anonymes manieurs d’argent » comme l’affirme l’article, et qui puisse incarner la nation pour mieux la défendre devant les risques et les défis contemporains, en cultivant la mesure et la raison françaises… La régence du général de Gaulle, qui reprenait les méthodes de la « monarchie de guerre » du Clémenceau de 1917, n’a pas abouti à l’établissement d’une véritable Monarchie royale : on ne peut que le regretter, aujourd’hui mais moins encore que demain si la République poursuit son œuvre de désarmement politique face aux puissances du « Tout-économique »… En paraphrasant le titre du livre antisarkozyste de Sébastien Lapaque, royaliste impénitent et bernanosien éternel, « il faut qu’elle parte » !

 

19/02/2008

Europe et vote démocratique.

L’argument des européistes pour ne pas faire revoter les électeurs français sur le traité constitutionnel européen est souvent de dire que ceux-ci n’ont pas vraiment répondu à la question posée en 2005, mais qu’ils se seraient plutôt déterminés par rapport au gouvernement en place… En fait, cet argument est spécieux, pour plusieurs raisons :

 

  1. Tout vote, toute élection n’est souvent que la manifestation d’une opinion du moment, d’une opinion dominante, raisonnée par certains mais suivie par de multiples autres. Le plus souvent, elle repose sur un caractère « d’entraînement » qui ne repose que sur un minimum de réflexion, car peu de gens lisent les professions de foi ou les textes soumis à référendum ;

     

  2. Or, justement, dans le cadre du référendum de mai 2005, de nombreux citoyens de notre pays, au contraire de ceux des Etats où la ratification se faisait par la voie parlementaire, ont pris la peine de lire, sinon le traité lui-même, souvent abscons, au moins les résumés et autres explications de textes de celui-ci ;

     

  3. D’autre part, c’est l’une des premières fois, depuis l’automne 1992 (référendum sur le traité de Maëstricht), que la construction européenne a vraiment été au cœur des préoccupations et des discussions entre citoyens, et que l’on a vraiment parlé d’Europe, alors que les élections européennes laissent, d’ordinaire, nos concitoyens complètement indifférents, au point de connaître des taux d’abstention très élevés quand celui du référendum du 29 mai 2005 a chuté à 30 % et que, donc, plus de 2 électeurs français sur 3 ont pris le chemin des urnes pour donner leur opinion sur le traité constitutionnel européen ;

     

  4.  Qu’il y ait eu des électeurs qui, comme à toute consultation électorale, en aient profité pour marquer leur mécontentement à l’égard de la politique gouvernementale, n’enlève rien à la valeur « démocratique » de ce scrutin qui s’est bien déroulé en toute connaissance de cause pour ceux qui se sont déplacés pour voter… A moins de considérer que tout vote est invalide parce que les électeurs ne se détermineraient pas seulement en fonction des programmes, de la connaissance et de la compréhension de ceux-ci, ou de la seule question posée… Dans ce cas, la démocratie électorale n’est qu’un immense malentendu, forcément dangereux, et il faut vite lui trouver une alternative ! Après tout, pourquoi pas ? Mais sûrement pas en oubliant les citoyens comme semblent le vouloir les européistes qui, tout à leur rêve d’un « peuple européen », préfèrent ne pas écouter les peuples réels d’Europe…