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28/01/2009

Révolution ?

La colère monte, dit-on et constate-t-on un peu partout en France, et l’arrogance des puissants, de la finance comme de la République sarkozienne, exacerbe cette montée de la fièvre contestatrice. Le succès annoncé de la manifestation du jeudi 29 janvier tient beaucoup à ce sentiment diffus et confus, et c’est sans doute ce qui est le plus dangereux, car les syndicats eux-mêmes ne savent pas comment gérer la colère des masses, parfois versatiles et violentes lorsque les cadres sociaux sont fragilisés ou brisés et que l’énergie de la fureur se libère brutalement, en explosion dévastatrice, que cela soit pour de bonnes ou de mauvaises raisons d’ailleurs.

Peut-on, aujourd’hui, passer de la révolte à la révolution, comme le titrait jadis le quotidien « Combat », imité en cela par toutes les feuilles contestatrices, maoïstes, anarchistes ou, même, monarchistes à la suite du philosophe Maurice Clavel, « révolutionnaire chrétien » qui, à la veille de sa mort, avait reconnu dans les royalistes post-maurrassiens de la Nouvelle Action Française ses « héritiers » ? Si l’on voit bien ce que peut recouvrir le terme de révolte, que peut vouloir signifier celui de révolution à l’heure où l’histoire nous rappelle que celle-ci fut souvent sanglante et cruelle dans ses diverses déclinaisons et qu’elle devient tout aussi terrifiante, dans l’imaginaire des populations occidentales, que les guerres et les totalitarismes ?

Maurras, qui ne passait pas particulièrement pour un gauchiste, affirmait qu’était nécessaire une « révolution rédemptrice » qu’il qualifiait, plus loin, de « conservatrice » (sans, évidemment, les connotations actuelles que lui donnent les libéraux et leurs contempteurs), et se proclamait « traditionaliste révolutionnaire ». Le plus intéressant était son idée qu’il est de bonnes révolutions et qu’elles se font principalement « par le haut », par l’action même de l’Etat et, particulièrement, de sa magistrature suprême.

Les exemples contemporains les plus fameux sont, entre autres, celle accomplie par le général de Gaulle par son action réformatrice à la tête de l’Etat et qui a donné naissance à cette « monarchie inachevée » qu’est la Cinquième République, et celle menée, du haut de sa position « d’héritier libre du franquisme » (et libéré par son essence même de cet héritage encombrant), par le roi Juan Carlos d’Espagne entre 1975 et 1981 et qui a permis une transition en douceur de la dictature à la démocratie, souvent qualifiée de « révolution tranquille », formule d’ailleurs reprise par les partisans de François Mitterrand en 1981-1983…

C’est bien « par le haut » que peut, en France, se faire la véritable révolution politique, condition nécessaire d’une justice sociale retrouvée : il est possible que, comme en 1958, les événements de la rue servent de détonateur à cette révolution souhaitable. Mais c’est bien la magistrature suprême ainsi instaurée qui peut agir et remettre les puissants à leur place qui ne doit pas être la première, comme le soulignaient tout autant Louis XI que Louis XIV ou de Gaulle… « La politique de la France ne se fait pas à la Corbeille » (à la Bourse, dirait-on aujourd’hui), formule gaullienne qui fait écho à la mise au pas d’un Fouquet (l’homme le plus riche du royaume, véritable oligarque de son temps !) par le roi-soleil, résume bien la nécessaire révolution qu’il s’agit de mener, à la fois éminemment politique à la tête de l’Etat et, en même temps, dans les esprits et les mœurs des pouvoirs publics.

M. Sarkozy n’est pas l’homme de cette révolution car il incarne le Pouvoir du Seigneur Argent, celui qui tient la République quand elle-même tient sa légalité du jeu des influences et des clientèles, des partis et des factions : la véritable révolution, qui n’est pas non plus celle d’un Besancenot ou des nihilistes, est bien celle de l’Etat et de sa magistrature suprême. Reste, pour les monarchistes qui attendent et espèrent cette révolution, à trouver les moyens de la faire advenir…

Recherche Talleyrand, pour instauration royale, nécessaire et urgente

23/11/2008

Démocratie au parti socialiste.

L’actuelle bataille pour le secrétariat général du Parti socialiste prend des allures de bataille de chiffonniers, et le décompte des voix, qui doit être repris lundi, promet encore de belles empoignades entre les partisans des deux candidates, Mmes Aubry et Royal. Mais, au-delà des querelles pour telle ou telle voix, des fraudes qui semblent être, en fait, une habitude dans ce parti qui ne cesse de parler de morale politique (à défaut de la pratiquer toujours), du recours aux juges pour venger les affronts et de ce spectacle triste d’un parti de gouvernement qui ne maîtrise plus ses nerfs, il y a tout de même un rappel à faire, dans le cadre de la logique démocratique (je n’ai pas parlé de sagesse…) : dans ce système, la victoire revient toujours, dans le cadre d’une élection à deux candidats, à celui qui a obtenu 50 % + 1 voix et c’est même la règle !

Soyons franc, la situation se présente peu souvent (quoique…) mais, dans l’histoire, elle a pu avoir des conséquences justement historiques autant que politiques : la condamnation à mort du roi Louis XVI, en janvier 1793 ; l’établissement « définitif » (pourvu que non…) de la République, numérotée troisième, en 1875 ; la dernière révision constitutionnelle à l’été dernier (approuvée par l’éternel Jack Lang contre son propre parti, le même que celui qui, aujourd’hui, amuse la galerie…)…

Je ne sais pas qui, de la sainte du Poitou ou du bouledogue lillois, sera déclarée vainqueur ces jours prochains ou si les adhérents seront à nouveau sollicités pour une nouvelle cérémonie urnicole (le terme n’existe pas, mais, bon, tant pis : j’aime bien !), mais le fait que chaque camp ne reconnaisse pas la victoire de l’autre prouve le bien-fondé de la réflexion de Maurras sur la « soustraction » que constitue ce principe démocratique appliqué à la désignation d’un dirigeant, quel qu’il soit : soustraction car les forces tirent chacune de leur côté au lieu de s’unir, et elles ont d’autant plus de mal à s’unir ensuite qu’elles se sentent soit légitimées soit lésées par le résultat proclamé…

Le plus étonnant, démocratiquement parlant, c’est que le sort du fond des urnes soit désormais (et il n’y a pas qu’au PS ni même seulement en France !) pratiquement toujours contesté dès qu’il y a un doute, fut-il exagéré, sur quelques bulletins : signe de la fin d’une époque qui accordait une confiance presque aveugle à ce que déclaraient les gardiens du vote ou ses dépouilleurs ? Ou d’une remise en cause d’un système majoritaire dont on accuserait, lorsque le vote n’est pas celui désiré par les élites du moment, la vacuité ? Ainsi, une voix ne serait plus une voix, et chacune serait désormais pesée et non plus comptée ?

Cela peut sembler anecdotique. Et pourtant ! Il me semble que nous entrons dans une nouvelle ère de la politique, celle du « doute post-démocratique » : si les premières manifestations en sont encore bien ridicules, il n’est pas dit que les prochaines ne soient pas plus inquiétantes ou, pourquoi pas, prometteuses ?

05/11/2008

La victoire d'Obama.

L’enthousiasme est un moteur de l’Histoire : l’élection de Barack Obama en est la preuve aujourd’hui et il ne faut pas le méconnaître pour comprendre les perspectives que cela ouvre. Avec cette élection et la ferveur populaire qui entoure le candidat élu, se manifeste la réactivation du « rêve américain », cette sorte de fascination pour les Etats-Unis, pays neuf où tout semble possible : c’est un avantage pour le nouveau président qui aura la lourde tâche de rétablir l’image de son pays dans le monde, non plus seulement par l’espoir qu’il a fait naître mais par les actes concrets d’une politique que, ennemis comme alliés des Etats-Unis, souhaitent, tous de façon particulière (et parfois antagoniques…) bien sûr. Ainsi, « l’obamania » peut servir de vecteur à la géopolitique (comme à la politique intérieure, d’ailleurs) et permettre au « nouveau César de l’Empire » (j’emploie à dessein cette formule liée à la Rome antique) d’avancer ses pièces dans le grand jeu mondial, ce jeu des risques et des espérances. Autant je suis agacé par l’obamania qui a sévi en France au risque d’oublier les réalités et les nécessités françaises (lire ma note précédente sur ce thème, datée du 1er novembre), autant il serait dangereux au niveau plus « mondial », pour comprendre les enjeux et les stratégies futures, de la négliger : elle est devenue à son tour une réalité, peut-être fugace mais bien visible pour l’instant et couronnée par les lauriers d’une victoire qu’il aurait été difficile d’annoncer il y a encore un an…

D’autre part, cette élection est importante pour comprendre ce trait que Bainville évoquait pour la France quand il disait qu’elle est, mieux qu’une race ou qu’une ethnie culturellement homogène, un « composé », une nation. Malgré le communautarisme traditionnel dans les pays anglo-saxons, les Etats-Unis, longtemps dominés par les élites « wasp » (white anglo-saxon protestant), viennent de tourner cette page de leur histoire qui s’était trop longtemps confondue avec le racisme, la ségrégation mais aussi l’extermination comme ce fut le cas pour les Indiens d’Amérique, encore oubliés malgré leur présence première sur le territoire actuel des Etats-Unis… Il n’est pas indifférent de constater combien la campagne de Barack Obama accordait une place primordiale à la notion d’ « unité » : ce n’était sans doute pas une simple formule électorale mais, plus profondément, une réflexion sur ce qui doit permettre à une nation d’exister, d’être au sens fort du terme. Il y a des leçons à en tirer, au-delà des différences historiques et politiques bien sûr, pour notre propre nation, pour notre propre conception de la politique, de l’Etat même : l’unité, c’était aussi, à bien le relire, une obsession de Maurras, mais qu’il sublimait en prônant l’incarnation de cette unité en la magistrature suprême de l’Etat, par la personne du souverain…