15/09/2014
La monarchie rapporte plus que la république...
Les républicains qui s’opposent à la monarchie, ou la dénoncent dans les Etats monarchiques contemporains, appuient souvent leur argumentation sur le coût de ce régime, et insistent sur l’inutilité dispendieuse de celui-ci. Or, à bien y regarder, le coût de fonctionnement de la présidence de la République française apparaît beaucoup plus élevé que celui des royautés d’Europe alors même que les aventures présidentielles ne font pas rêver et qu’elles ne donnent pas lieu à festivités publiques (si ce n’est celle, brève et au goût de cendres quant à son souvenir, quelques temps après, de la soirée de victoire électorale…). Il est surtout un autre élément que l’on oublie souvent de signaler : ce que rapportent les monarchies elles-mêmes à leurs nations respectives.
Un petit article dans Le Figaro Magazine du 12 septembre dernier, justement, nous éclaire là-dessus, en tout cas pour la monarchie britannique, et il serait intéressant de faire les mêmes calculs pour les monarchies scandinaves, espagnole ou belge, plus discrètes mais, semble-t-il, assez profitables pour les pays en question, en particulier en termes touristiques…
« En Angleterre, la croissance passe par les naissances.
Le duc et la duchesse de Cambridge attendent donc un deuxième enfant pour avril 2015. Une excellente nouvelle pour l’économie britannique : l’arrivée de George, le 22 juillet 2013, avait entraîné 288 millions d’euros de fêtes en son honneur et achats de gadgets à son effigie. Sans oublier 20 % de touristes en plus cet été-là, ainsi qu’une hausse de 600 % des ventes du lange dans lequel il était emmailloté à sa sortie de maternité. Un bébé royal fait vendre tout ce qu’il porte dont la célèbre salopette Petit Bateau de George, à 46 euros.
Et s’il a une petite sœur, ce sera encore mieux. Depuis 2012, les experts ont chiffré à 1,248 milliard d’euros l’impact que sa maman, Kate Middleton, a eu sur l’industrie de la mode ! »
Bien sûr, cela ne suffit pas pour faire tourner l’économie d’une nation et je n’aurai pas l’outrecuidance d’affirmer une telle bêtise, mais l’existence d’une famille royale, d’une monarchie en exercice, permet au moins la création de quelques richesses et engendre quelques revenus liés aux événements de la vie familiale de la dynastie en place, des naissances aux mariages, des anniversaires aux avènements royaux. Ce que la République perd en campagnes présidentielles, elle ne peut le récupérer, en raison de son propre principe qui l’empêche de « profiter » de la famille du Chef de l’Etat, sans légitimité aucune en République puisque non élue… Alors que la Monarchie, elle, de par son essence et son mode de perpétuation, peut mettre la vie de la famille royale en « spectacle » et transformer des événements de la vie privée en fêtes de la vie publique, pour le profit des personnes qui vont y travailler et pour ceux qui, librement et gratuitement, vont y participer, avant que, d’une certaine manière, poursuivre la fête par l’achat de souvenirs la rappelant ou par la consommation liée à l’esprit de la fête, de la restauration sur place à la nuitée pour les personnes venues de loin, par exemple.
Mais il y a un autre avantage pour les habitants d’un royaume, comme l’évoquait le quotidien Libération, pourtant peu suspect de monarchisme militant, au moment du mariage de Kate et William au printemps 2011 : le jour de la cérémonie (un vendredi) a été déclaré férié, ce qui a permis à de nombreux Londoniens de partir en vacances tandis que la capitale du Royaume-Uni recevait plus d’un million de touristes durant cette période festive… Du temps libre en plus pour le plus grand nombre, en une époque où certains voudraient que chaque jour soit « productif et consommateur », ce n’est pas complètement anodin et c’est presque un pied de nez à la formule de Benjamin Franklin, « Time is money », ou, en tout cas, son détournement joyeux…
Le fait que les événements heureux de la vie privée de la famille royale deviennent des événements publics et partagés heureusement par tous, est une chose qui n’appartient qu’aux monarchies : on peut regretter que, au contraire, notre République ne connaisse de la vie privée de son président que les aspects les plus sordides sans que cela ne rapporte rien au pays, si ce n’est un discrédit impudique traduit par les titres moqueurs de la presse étrangère…
22:59 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : monarchie, république, mariage, angleterre, croissance
08/07/2014
Chambord...
J’ai profité des premiers jours de juillet pour me promener en France qui, partout, a quelque beauté à nous dévoiler, même lorsque le soleil se fait hésitant ou fragile. Ma première étape était le château de Chambord, magnifique joyau de la Renaissance, indissociable du règne du roi François Ier mais aussi de la prétendance du comte de Chambord, celui-là même qui aurait pu être roi sous le nom d’Henri V : en ces heures de congés scolaires, je n’oublie pas la politique qui, elle, ne prend pas de vacances, et je dois avouer que la comparaison entre l’œuvre du roi François et celle du président du même prénom est facile et instructive… Bien sûr, M. Hollande n’est que dans la 3ème année de son quinquennat quand François Ier a régné une trentaine d’années, de 1515 à 1547 ; bien sûr, le contexte n’est pas le même et succéder à Louis XII qui avait « préparé » le terrain à son successeur en menant une grande aventure militaire et géopolitique en Italie semble plus facile que prendre la suite d’un rival au milieu d’une crise de la zone euro et dans un contexte de mondialisation agressive ; bien sûr, surtout, le roi François pouvait espérer, au 1er janvier 1515, avoir le temps long d’un règne que seule la monarchie permet quand le président, élu des uns contre les autres, pense déjà à préparer sa réélection…
Je repensais à tout cela en parcourant les grandes salles du château qu’admiraient aussi des touristes venus parfois de loin, des groupes de jeunes élèves qui, à la première pause, pianotaient sur leurs téléphones portatifs ou des familles qui me rappelaient celle que nous formions avec mes parents, frère et sœurs, au début des années 1980, à la découverte des trésors de notre histoire. Depuis ce temps déjà ancien, Chambord a continué de vivre, d’embellir encore malgré les échafaudages nouveaux, et d’attirer toujours plus de curieux, étrangers ou compatriotes, et c’est tant mieux !
Je remarque d’ailleurs que « l’histoire attire » et que l’une des grandes chances de la France est de posséder un riche patrimoine issu de cette longue suite de siècles de formation de la nation française : sans cette lente, longue et parfois rude histoire, sans la maîtrise du temps et de l’espace par les hommes et par l’Etat, en particulier sous sa forme monarchique, la France ne serait pas aujourd’hui ce pays qui reste la première destination touristique d’Europe et du monde ! Voilà un héritage à entretenir mais aussi à faire prospérer : or, il semble que la République, piégée par ses coûts de fonctionnement trop élevés et par les contraintes budgétaires que l’Union européenne lui rappelle constamment sans beaucoup de délicatesse ni de tact, n’investisse plus assez dans l’entretien et la promotion de ce magnifique patrimoine et n’attire pas assez de mécènes pour financer de nouvelles mises en valeur de nos joyaux historiques et paysagers. Surtout, l’Etat ne joue pas suffisamment son rôle de coordonnateur ou de soutien des initiatives locales, publiques ou privées, qui pourrait, lorsque le besoin s’en fait sentir, être le sien, mais, en revanche, il apparaît parfois trop « réglementariste », pour des raisons qui ne sont pas forcément très bonnes, et tente même de gêner des initiatives bénévoles et/ou privées qui lui échappent (y compris par le moyen fiscal…), ce qui me semble la manifestation d’un mauvais étatisme contreproductif sur le plan touristique, économique et social.
Alors qu’il nous faudrait reprendre l’esprit du roi François Ier, celui d’un mécénat d’Etat intelligent qui valait au roi le titre de « père et protecteur des arts et des lettres », la République s’enferme dans une logique comptable et, parfois, idéologique… J’ai toujours trouvé surprenant que le spectacle du Puy du Fou, qui s’autofinance intégralement depuis sa création à la fin des années 70, ne bénéficie d’aucune promotion de la part de l’Etat et du Ministère de la Culture alors qu’il a été le premier à obtenir les récompenses internationales touristiques les plus prestigieuses du monde, comparables aux Oscars pour le cinéma ! Bien sûr, le Puy du Fou n’en a guère besoin, mais ce désintérêt de la République pour ce qui fonctionne et rapporte beaucoup à l’économie locale et nationale est révélateur d’un état d’esprit, tout comme les attaques incessantes d’une certaine presse et de quelques historiens robespierristes contre le spectacle lui-même, considéré comme une exaltation de la Contre-Révolution et de la « Vendée rebelle »…
Le roi François Ier a montré l’exemple d’une politique culturelle qui mariait le prestige royal à la beauté des formes, le goût du spectacle au plaisir de tous, et cela est à l’origine de la Renaissance française qui, aujourd’hui encore, attire des foules venues de partout pour admirer cette synthèse des arts et de la politique, voulue par le souverain, éminemment politique quand il promouvait les arts et les architectes… Le soir même de mon passage à Chambord, j’entendais les journalistes évoquer les menaces des intermittents sur les festivals de l’été et le désarroi du gouvernement face à cette situation qui lui pourrissait ce début de juillet : décidément, le président François n’est pas le roi François, et la comparaison tient encore plus aux régimes qu’aux hommes…
12:27 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : françois, culture, beauté, château, monarchie, république.
19/06/2014
Un nouveau roi en Espagne, Philippe VI.
Il est toujours agréable de lire en couverture d'une revue un grand « Vive le roi ! », même si, au regard de la photo, il ne s'agit pas d'une déclaration à la France mais de la proclamation du nouveau roi d'Espagne, Philippe VI (Felipe en langue espagnole), néanmoins descendant de nos rois Henri IV, Louis XIV et... Louis-Philippe (entre autres...) mais aussi de la reine Blanche de Castille et, plus loin encore, de l'empereur Charlemagne : un résumé de l'histoire de France, en somme !
Ce roi arrive avant l'heure, d'une certaine manière, et l'ancienne formule « Le roi est mort, vive le roi ! » a quelque tendance, ces dernières années, à devenir « le roi s'en va, vive le roi ! », comme le titrait Le Parisien à l'annonce de l'abdication du roi Juan Carlos au début de ce mois... Faut-il s'en plaindre ? Peut-être pas, après tout, et les monarchies royales, dans l'histoire, ont souvent su s'adapter aux évolutions de leur temps sans pour autant renoncer à leur particularité propre, celle d'un mode de transmission familiale du père (ou de la mère) au fils (ou à la fille), indépendamment des querelles de partis et des jeux politiciens : la naissance est la base de la légitimité royale, sans en être le seul élément. Que la mort ne soit pas toujours le déclencheur de la transmission royale n'enlève rien à tout l'intérêt de cette dernière : on a déjà pu le constater l'an dernier avec le passage de relais du roi des Belges Albert II à son fils Philippe (un prénom décidément royal en Europe!) ou de la reine Beatrix à son héritier Willem-Alexander aux Pays-Bas.
Néanmoins, le nouveau roi aura sans doute fort à faire pour redonner confiance en la monarchie à des jeunes Espagnols qui n'ont pas connu le régime autoritaire du général Franco ni les inquiétudes de la « transition démocratique » des années 1975-1981, et qui ne voient en elle qu'une institution surannée à l'heure de la mondialisation et de l'immédiateté... Le long temps de la monarchie, cette succession de règnes qui semblent ne devoir finir que par le tombeau ou l'abdication un peu honteuse (parfois tragique si l'on se réfère à l'histoire de la monarchie espagnole depuis la Révolution française), apparaît difficilement compréhensible pour une génération habituée au mouvement perpétuel, à ce que Pierre-André Taguieff qualifie de « bougisme ». Et pourtant ! C'est une qualité de la monarchie de ne pas être obligatoirement « à la mode » et de pouvoir ainsi prétendre marcher « avec tous les temps », au delà de « l'instant du moment », et non pas avec le seul « présent éternel » que la société de consommation voudrait bien imposer à tous pour mieux asseoir son pouvoir global... La monarchie, par sa nature même, est un obstacle à la fluidité totale que le « libéralisme-libertaire » et la gouvernance de l'Argent et de ses agents veulent imposer au monde au nom d'une modernité qui serait, d'après eux, inéluctable et infinie. En plongeant ses racines dans l'histoire et dans la famille, la monarchie est l'institution anti-individualiste par excellence : au service de tous, donc, et non de quelques uns...
Si la monarchie espagnole souffre aujourd'hui d'une véritable remise en cause de la part d'une grande partie des jeunes Espagnols, c'est sans doute aussi parce qu'elle est encore « trop jeune » (elle n'a été restaurée physiquement qu'en 1975 avec la montée sur le trône de Juan Carlos, à la mort de Franco, et elle n'a connu, jusqu'à ce matin, qu'un seul représentant) : le règne de Philippe/Felipe VI sera, sur ce point, déterminant et devra marquer l'enracinement véritable de la monarchie en Espagne, en attendant l'accession à la plus haute magistrature de l'Etat de... la reine Leonor, aujourd'hui âgée de huit ans... « L'avenir dure longtemps », disait feu le comte de Paris et la monarchie, par principe et par statut, doit voir loin ! La République française qui, depuis les années 1980, ne regarde et ne pense jamais au-delà de la prochaine élection présidentielle, devrait bien s'en inspirer, tout compte fait...
18:42 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roi d'espagne, philippe, felipe, monarchie, couronne, démocratie, famille.