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26/10/2008

Crise et questionnement...

Doit-on continuer à écrire sur la crise ? Bien sûr, mais cela ne sera pas suffisant pour la faire reculer et il n’est pas sûr que, d’ailleurs, cette crise soit totalement une mauvaise chose : au-delà de ses aspects économiques et du transfert de richesses qu’elle révèle et accélère (cf. mes notes précédentes sur ce thème), elle doit aussi être l’occasion de poser la question de la civilisation industrielle et consumériste dans laquelle nous vivons et de ses fondements, de ses conséquences et de ses dérives, et de ses oublis de ce qui fonde, d’ordinaire, une civilisation humaine historique, fondatrice et non seulement consommatrice… Si cette crise pose la grande question de la Civilisation, elle aura rempli utilement son rôle de transition, dans toutes ses dimensions. Nous en sommes loin, malgré les ébranlements de quelques préjugés qu’il serait bon de mettre complètement à bas !

L’actuelle crise remet en cause le système du capitalisme financier (qui n’est pas « tout » le capitalisme, précisons-le bien) et de la « main invisible » d’un Marché qui se régulerait par lui-même : en somme, c’est la fin de « l’illusion libérale », le terme « libéral » étant ici compris dans son acception idéologique économique plus que celle, politique, pour laquelle je serai moins sévère.

Mais la moralisation du capitalisme que certains évoquent avec gravité est-elle en cours ? Au regard de l’attitude actuelle des traders et de certains grands patrons, sans oublier quelques idéologues libéraux (il suffit d’écouter la radio BFM ou de lire « le cri du contribuable »…), il y a encore du chemin à faire ! Le mépris avec lequel ces gens parlent d’un Etat qui est accusé d’aider les pauvres « qui n’ont et n’auront pas les moyens de rembourser » (ce qui apparaît ainsi comme une tare absolue alors même que quelques traders ont disposé de l’argent des banques pour faire leurs affaires, sans d’autre risque, en cas de souci, que de perdre leur emploi mais pas leurs « indemnités »…) est consternant et prouve à l’envi qu’ils ont perdu tout sens moral et tout esprit de partage, pourtant nécessaires dans une société équilibrée.

Je doute, comme le faisait déjà René de La Tour du Pin en son temps, de la possibilité « en régime libéral, d’obtenir de la seule bonne volonté patronale la suppression des abus concernant, par exemple, l’emploi de la main d’œuvre ». Il est vrai que, lorsque l’on voit l’attitude des dirigeants de Renault, plus soucieux de préserver les intérêts des actionnaires que les emplois en France, ou des responsables d’Adidas qui ferment leurs usines en Chine, parce que les salaires (pourtant encore fort bas…) y seraient « trop hauts » (sic !) et qu’il vaut mieux maintenant produire au Vietnam où les conditions salariales sont « moins coûteuses pour l’entreprise », il y a de quoi se fâcher et s’inquiéter de l’égoïsme délirant de ces hommes d’argent : que l’on ne s’étonne pas de « la colère des humbles », dans ces conditions ! Si elle peut être violente et même meurtrière, absurde, elle a quelques raisons et, j’ose le dire, quelque légitimité.

Le rôle du Politique, en France à travers l’Etat et les forces politiques, est de rappeler à l’ordre les dirigeants économiques qui oublieraient que, comme le clamait le pape Jean-Paul II, « l’économie doit être au service des hommes et non l’inverse ».

25/10/2008

Suicide d'un prof.

Il y a quelques semaines, j’évoquais sur ce blogue le suicide d’un jeune professeur, accusé par un élève de l’avoir frappé : cette accusation avait entraîné la garde à vue de l’enseignant qui, sorti de celle-ci et déjà fragilisé par un divorce difficile, n’avait pas supporté le traumatisme de cette opprobe publique et s’était pendu.

Or, il se trouve que cette sinistre histoire a une suite et que cette suite rajoute au malaise et à la honte que, j’espère, éprouvent certains : l’élève accusateur a reconnu avoir menti, sans peser les éventuelles conséquences de ses dires.

Ainsi, et ce n’est pas la première fois, la parole de l’enfant, aujourd’hui trop souvent portée au pinacle par principe et sans beaucoup de prudence, s’est avérée mensongère et meurtrière. Mais qui est le plus coupable ? Cet enfant inexpérimenté qui ne connaît pas le poids des mots ou ses parents qui, dans un réflexe « judiciariste », déposent plainte contre un enseignant sans même chercher à régler le problème dans le cadre de l’institution scolaire, ne serait-ce qu’en rencontrant celui-ci et ses supérieurs ? L’enfant affabulateur à qui l’on cède tout ou ceux qui acceptent cette situation ? L’adolescent tapageur ou le juge qui s’empresse d’envoyer des gendarmes au domicile d’un « présumé coupable » pour le simple fait d’être « l’adulte responsable de ses actes », qu’en l’occurrence il n’a pas commis ?

Bien sûr, je ne dévalue pas la culpabilité certaine de l’enfant accusateur mais je la distingue de la responsabilité morale de ceux qui, d’une banale affaire scolaire, ont fait une affaire judiciaire, au risque de provoquer ce drame absurde, terrible.

L’affaire d’Outreau a-t-elle servi à quelque chose ? Il est des moments où l’on peut honnêtement en douter…

22/10/2008

Résistance française à l'occupation allemande.

Cette année, le 22 octobre était, comme l’an dernier, dédié au souvenir de Guy Môquet et, intitulé ambigu, à « l’engagement des jeunes Européens dans la Résistance », à l’occasion de la « Semaine de l’Europe à l’école » qui se déroule actuellement, dans une indifférence quasi-générale. Les professeurs avaient reçu des consignes du Ministère de l’éducation nationale, par le biais d’une « note de service » signée du directeur Jean-Louis Nembrini, directeur général de l’enseignement scolaire, qui (anecdote) m’a jadis inspecté lorsque j’enseignais aux Mureaux.

Ces consignes avaient ceci d’étrange qu’elles faisaient référence à la Résistance comme si elle était un phénomène « européen » et non comme une réaction le plus souvent nationale, et d’abord nationale avant que d’être « démocratique » ou idéologique. Ainsi, elles citaient en quelques phrases trois fois l’expression « jeunes Européens », au risque de faire prendre des vessies pour des lanternes et de falsifier, purement et simplement, l’Histoire au nom d’une idéologie « européenne », ou plutôt européiste, qui fait peu de cas de ce qui a réellement été… L’emploi de l’expression « jeunes Européens » auraient pu passer inaperçue si l’absence de toute référence au caractère français de la Résistance en France à l’Occupation (ce dernier terme d’ailleurs n’apparaissant même pas, ce qui est pour le moins étrange, mais tellement révélateur du déni d’Histoire de cette directive, pourtant rédigée, ce qui aggrave son cas, par un ancien inspecteur d’Histoire) n’était elle-même ostensible

Ce déni d’Histoire m’a évidemment agacé et j’ai donc profité de cette journée pour rappeler à mes élèves de Seconde quelques petites choses simples comme le fait que Guy Môquet n’était pas un résistant mais un otage, ce qui n’a évidemment pas le même sens (et qui n’enlève rien à la cruauté de son sort), et qu’aucun résistant fusillé ou tué au combat n’est mort en criant « vive l’Europe » comme le confirmait, d’ailleurs, le dossier fourni par le Ministère contenant des lettres de résistants antinazis d’autres pays qui, pour la plupart, se terminaient par « vive la patrie »…

Si je n’ai pas lu la lettre de Guy Môquet, j’ai par contre lu des extraits de celle écrite à sa femme à la veille de son exécution par le résistant français Honoré d’Estienne d’Orves, auquel l’écrivain Etienne de Montety a consacré un beau livre dont je conseille la lecture pour comprendre ce qu’est un héros français, au sens noble du terme.

Voici ces extraits : « Mon sacrifice est fait depuis longtemps. Seuls ces trois mois d’attente avaient ravivé mon espoir et m’avaient fait espérer de revivre auprès de vous tous. Je veux croire que tu supporteras avec vaillance cette épreuve. Nous avons eu, penses-y, le bonheur de nous revoir alors que beaucoup sur les champs de bataille sont morts pour la France sans avoir pu revoir ceux qu’ils aimaient le plus.

« Je veux, tu entends mon chéri, que tu continues à mener notre vie courageuse auprès des enfants qui ont besoin de toi. Tu le dois, et la pensée que tu vivras avec eux et pour eux est mon grand réconfort. Je sens que tu me le promets. Tu leur expliqueras ce que j’ai fait, à ces petits, pour qu’ils sachent que leur Papa n’a eu qu’un but : la grandeur de la France, et qu’il y a consacré sa vie. »

Mais j’ai aussi lu un autre texte du même Honoré d’Estienne d’Orves, qui éclaire encore un peu plus le sens de son combat et ses valeurs : « Notre fierté d’être Français est basée sur la conscience de nos droits, sur les souvenirs de notre histoire et non pas sur la conscience d’une supériorité innée. Ce ciment qui nous unit, ce n’est pas la race, c’est la nation constituée au cours des siècles, avec au départ des races différentes. C’est un ciment de la raison qui est de devenir celui du cœur et qui n’en est pas moins fort. » Ces phrases et l’histoire de ce résistant sont plus significatives que toutes les directives de ce Ministère de l’éducation (ou plutôt de la « rééducation »…) qui embrigade et emprisonne les esprits plus qu’elle ne les forme et ne les libère…

Ce n’est pas sur le mensonge que l’on bâtira le monde de demain et une société meilleure mais sur la vérité et l’amour des siens à travers les générations et les temps, cet amour premier qui permet de s’ouvrir fraternellement aux autres : assumer l’Histoire signifie aussi être capable de dépasser les épreuves et les confrontations d’antan pour tendre la main aux adversaires d’hier, pour fonder une paix consciente et durable. En tronquant l’Histoire au nom de préjugés idéologiques, les européistes préparent les malentendus de demain…