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03/09/2012

Enjeux et risques énergétiques.

 

L’industrialisation et la mondialisation n’ont pu être possibles depuis le XIXe siècle que grâce à la découverte scientifique et à la maîtrise, puis à l’usage varié et massif, des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz) : dans le même temps, les énergies renouvelables traditionnelles (eau, vent, soleil) étaient, sinon totalement abandonnées, du moins reléguées à un rang quasi anecdotique sauf, en particulier en France, l’énergie hydraulique fournie par les moulins, eux-mêmes remplacés par les barrages hydroélectriques.

 

Conjuguées à l’apparition, puis à la diffusion du modèle de la société de consommation, l’industrialisation et la mondialisation, de plus en plus invasives dans les pays européens et sur le continent nord-américain puis s’étendant au reste du monde, ont entraîné un véritable pillage, puis gaspillage des ressources fossiles que la nature avait mis plusieurs centaines de millions d’années à fabriquer : en moins de quatre siècles, si l’on en croit les géologues, c’est la quasi-totalité de ces richesses terrestres qui aura été consommée, c’est-à-dire consumée ! Déjà, certains affirment que le fameux « pic pétrolier » (en anglais, « peak oil ») serait atteint (ou sur le point de l’être), et qu’il n’est désormais plus possible de produire demain encore plus de pétrole qu’aujourd’hui…

 

Cette consumation a eu d’autres conséquences, moins bénéfiques que celles du développement technique des sociétés et de l’amélioration des conditions de transport ou de chauffage : la pollution atmosphérique, déjà dénoncée à la fin du XIXe siècle par l’écrivain royaliste Paul Bourget après son voyage dans le Londres enfumé par les cheminées d’usines et le chauffage au charbon, et qui, aujourd’hui, poursuit ses ravages d’une autre manière, sans doute, mais avec des conséquences sur la mortalité loin d’être anodines (40.000 morts par an en France ?) et sur la qualité de l’air, sans oublier ce qui pose le principal problème à la planète, c’est-à-dire le dérèglement climatique qui semble s’orienter vers un réchauffement accéléré et anormal de notre planète et se manifeste, concrètement, par un accroissement certain des « accidents » climatiques et la fonte de la banquise.

 

Mais il n’y a pas que la consommation des énergies fossiles qui entraîne des pollutions : la production elle-même s’avère souvent coûteuse pour l’environnement, comme au large de la Floride et dans le golfe du Mexique en 2010 avec l’explosion de la plate-forme pétrolière Deepwater Horizon qui a provoqué une terrible marée noire destructrice d’une partie de la biodiversité marine et lagunaire locale, ou la dévastation de la forêt boréale au Canada, au nord de l’Alberta principalement, sur une superficie de 140.000 km2, pour exploiter des mines de sable bitumineux qui, elles-mêmes, polluent les rivières avoisinantes et provoquent des pluies acides… Même chose pour le transport des hydrocarbures : les côtes de Bretagne et de Vendée se souviennent des marées noires de l’Amoco Cadiz en 1978 et, plus proches de nous, de l’Erika et du Prestige autour de l’année 2000, qui ont entraîné la mort de millions d’oiseaux, de poissons et crustacés, mais aussi de mammifères marins, et qui ont souillé pour plusieurs années le littoral français.

 

Pourtant, notre société, désormais, ne peut se passer d’une abondante énergie : nous sommes dépendants de la Technique, des Machines, et de ce qui permet de les mouvoir, de les faire fonctionner, et de nous chauffer, de nous déplacer, de communiquer et de stocker, de nous éclairer et de nous divertir, etc. Par rapport aux sociétés du XVIIIe siècle, nous sommes des « géants » qui pouvons relier tous les coins de la France, voire bien au-delà, en quelques heures si nous nous déplaçons physiquement, mais en quelques dixièmes de seconde s’il s’agit de parler et de voir… Ces progrès immenses, et largement bénéfiques pourvu que nous en usions sans nous perdre nous-mêmes, nécessitent des quantités considérables d’une énergie dont nous ne saurions plus, pour l’heure, nous passer : après avoir eu le monopole de ce genre de vie très énergivore, en tant que citoyens d’un pays précocement industrialisé, nous sommes les spectateurs (impuissants et souvent indifférents pour nombre de nos concitoyens) des appétits et de la nouvelle voracité des puissances émergentes ou nouvellement émergées qui veulent atteindre notre niveau de vie, et cela coûte que coûte, sans toujours prendre en considération les risques que cette attitude, étendue à des populations fort nombreuses, fait peser à la planète toute entière. La Chine, l’Inde ou le Brésil, par exemple, ne sont guère sensibles aux préoccupations écologiques, il est vrai plutôt nouvelles et très « intéressées » de la part des Etats anciennement industrialisés qui y voient surtout un moyen de freiner la montée trop rapide des concurrences asiatiques ou sud-américaines…

 

Pour la France, les enjeux énergétiques sont énormes, au moment même où la question des ressources et de leur contrôle (et maîtrise…) se fait de plus en plus pressante, et nécessitent une véritable stratégie énergétique, mais aussi un changement des approches et des modèles jusque-là en cours : au-delà des questions habituelles de l’approvisionnement en énergie, il faut poser celles du modèle même d’énergie qui est le plus profitable à notre société et le moins dispendieux pour l’environnement, mais aussi celles du modèle de société qui est le mieux adapté à notre environnement propre et aux nécessités économiques et sociales, voire géopolitiques, de notre pays et de sa pérennité. L’équation française, qui doit tenir compte aussi des paramètres européens et mondiaux, économiques comme environnementaux, n’est pas facile à résoudre : une grande partie de la solution passe par le politique, qu’on le veuille ou non, et il y faut sans doute des institutions et une magistrature suprême, en particulier, qui disposent du temps, du long terme comme de la possibilité d’inscrire « l’urgence » dans celui-ci. Pour clamer que « l’énergie est notre avenir », encore faut-il que l’Etat, justement, s’inscrive dans « cet avenir que tout esprit bien né souhaite à sa patrie »…

 

 

 

 

 

 

 

 

27/08/2012

La retraite à 67 ans s'étend en Union européenne, dans le silence assourdissant des médias...

 En janvier 2011, je signalais sur ce blogue la volonté de l’Allemagne d’imposer à tous les pays de la zone euro, au nom de l’harmonisation européenne, le recul de l’âge légal de départ à la retraite à 67 ans : cette information, passée quasiment inaperçue dans la grande presse et peu diffusée dans l’Opinion publique, faisait sourire mes collègues lorsque je l’évoquais dans la salle des profs. Même accueil incrédule dans les rues de Paris quand, avec quelques militants du Groupe d’Action Royaliste, nous distribuions des tracts dénonçant cet oukase allemand, un samedi de février 2011 !

 

Et pourtant ! En quelques mois, plusieurs pays de l’UE ont adopté ce relèvement de l’âge minimal légal de départ à la retraite, de l’Espagne à la Pologne… Et, en cet été 2012, c’est au tour des Pays-Bas d’accéder à la demande allemande, comme l’évoquait « Les échos » le 12 juillet dernier : « Suivant l’exemple de nombre de ses partenaires européens, les Pays-Bas ont entériné une réforme historique du système de retraite prévoyant l’allongement de deux ans de la cessation légale d’activité. Fixé à 65 ans depuis 1957, l’âge de la retraite des Néerlandais passera à 66 ans en 2019 et à 67 ans en 2023, selon la loi que vient d’adopter le Parlement de La Haye. »

 

Cette réforme s’est d’ailleurs faite malgré l’opposition syndicale et, comme l’écrit le quotidien économique, « au mépris des traditions du « modèle des polders » », ce qui en dit long sur les méthodes employées pour faire passer cette loi de régression sociale…

 

Ce qui surprend, c’est le silence en France sur cette « harmonisation européenne » en cours qui se fait au détriment des salariés : les syndicats n’en disent rien et même les partis de Gauche semblent ne prêter aucune attention à ce processus qui, pourtant, risque de toucher bientôt notre pays, piégé par un jeu européen qui lui échappe, au moins sur le plan social. Car la question d’un relèvement de l’âge de la retraite finira, et sans doute plus vite que l’on croit (avant la fin du quinquennat de M. Hollande ?), par se poser dans notre pays, comme le prédit régulièrement la presse d’Outre-Rhin. Déjà, à lire et écouter les médias et les pages économiques françaises, ce relèvement paraît inéluctable et certains économistes parlent, à propos du départ à la retraite à 62 ans en France (l’actuelle réforme en cours, votée sous la présidence de M. Sarkozy) d’une « exception française » ou, même et plus violemment, d’une « aberration » !

 

Je ne méconnais pas l’élévation de l’espérance de vie dans notre pays, mais je rappelle que celle-ci reste très inégale selon les métiers et qu’un cadre ou qu’un enseignant a environ une dizaine d’années de plus d’espérance de vie qu’un ouvrier… D’autre part, l’espérance de vie « en bonne santé », elle, ne cesse de diminuer dans notre pays et elle est aujourd’hui de 62 ans. Là encore, ce chiffre varie si l’on regarde les professions et l’on retrouve la même inégalité que pour la simple espérance de vie. Ce sont des éléments que l’Etat et les économistes ne peuvent négliger.

 

Cela veut-il dire que je suis opposé à ce que l’on travaille jusqu’à 67 ans et même au-delà, si on le souhaite personnellement ? Bien sûr que non ! Mais je suis opposé à ce que cette limite soit « obligatoire » pour tous et qu’elle prive des personnes fatiguées, ou plutôt usées, dès l’entrée dans la soixantaine (voire avant : considérez les personnes qui travaillent en usine ou dans le bâtiment, par exemple), d’un repos bien mérité et d’un temps « pour soi » qui, pour autant, n’est pas forcément économiquement improductif !

 

Cette question des retraites n’est pas close, et il faudra trouver des pistes nouvelles pour leur financement si l’on ne veut pas voir disparaître cette forme de solidarité financière intergénérationnelle. Mais les réformes, à faire et à venir, ne doivent pas oublier de prendre en compte les facteurs sociaux et tout simplement humains.

 

 

 

 

 

12/08/2012

Les indignés : de l'échec à la chouannerie ?

 

Dans une indifférence quasi-totale, les derniers « indignés » qui campaient devant la Banque Centrale Européenne à Francfort ont été évacués lundi dernier par les forces de l'ordre qui, d'ailleurs, n'ont pas rencontré grande résistance : ainsi, ce mouvement que l'on disait né du petit livre « Indignez-vous ! » de Stéphane Hessel se termine sur un sévère constat d'échec pratique et montre les limites de ce mode d'action peut-être trop médiatique pour pouvoir survivre, justement, à l'éloignement rapide des médias au bout de quelques jours... D'ailleurs, La Croix est le seul quotidien français qui ait consacré deux articles le même jour (mardi 8 août 2012) à cette évacuation de la veille et à un essai de compréhension de ce mouvement et de sa fin (provisoire ?).

 

 

A Francfort comme hier à Paris ou à New-York, « une protestation s'était élevée contre les excès de la financiarisation du monde et les conséquences dramatiques que ces dérives entraînent sur la vie quotidienne de millions de personnes à travers le monde. ». Cette protestation était multiple et plutôt désordonnée mais elle semblait remettre en cause, sinon la mondialisation, en tout cas sa forme actuelle, c'est-à-dire libérale : c'était déjà cela, mais n'était-ce pas insuffisant pour être efficace ? N'aurait-il pas fallu réfléchir sur la mondialisation elle-même et ses effets concrets sur les conditions sociales de travail et d'existence des classes productives, c'est-à-dire des travailleurs, mais aussi sur l'environnement et la nature même de la société et des hommes et de leur dignité ?

 

 

La Croix évoque, au-delà de ces questions pourtant nécessaires, la fragilité de ce mouvement qui tient aussi à sa nature : « Pouvait-il en être autrement de manifestations dont la marque était l'absence de revendications précises et de leaders ? Un cri de refus peut-il faire naître un mouvement social ? Sans doute pas. » Ce côté impolitique du mouvement des indignés l'a sans doute desservi mais l'inverse ne l'aurait pas forcément mieux servi si l'on constate l'incapacité d'une certaine Gauche à être autre chose qu'une forme de faire-valoir au système de la mondialisation et de la société de consommation, comme le mouvement de 1968 l'a si bien montré jadis... Un autre élément d'explication de l'échec des indignés c'est, comme le souligne le politologue allemand Tadzio Müller, le fait qu'existe « parmi les membres du mouvement un individualisme très fort, ceux-ci considérant que chacun ne peut être représenté que par soi-même ». Il est intéressant de noter que ce que disent les royalistes depuis longtemps sur le leurre de l'individualisme face aux institutions financières se trouve là encore confirmé dans la réalité : l'individualisme est une impasse parce que ses valeurs mêmes sont celles du Système capitaliste que les indignés combattent...

 

 

Le mouvement des indignés a échoué (provisoirement, peut-être) faute de s'être enraciné dans une culture politique et d'avoir une stratégie de long terme, au-delà de l'immédiateté et de l'individualisme. Pourtant, il aura signifié une véritable colère, encore maladroite et plus médiatique que véritablement fondatrice, et il n'a pas été complètement inutile, en montrant que sont possibles des possibilités de contestation de ce Système qui, aujourd'hui, déstructure les sociétés et broie les hommes-producteurs quand elle hypnotise les hommes-consommateurs.

 

 

Sans doute faudra-t-il, en France, passer de cette indignation anarchique et, finalement, étouffée par une Gauche social-démocrate que M. Hessel, lors de l'élection présidentielle, a rejoint sans états d'âme, à une véritable chouannerie, éminemment politique et sociale, qui pense en terme de société et d'Etat et non en seuls termes d'individus individualistes et de « droits » sans devoirs. Une nouvelle chouannerie qui, enracinée et libre à la fois des seuls critères économiques (sans les méconnaître pour autant) et des jeux partisans et politiciens chers à M. Hessel, transformera l'indignation en cette juste colère contre le règne de « l'économie sauvage » et pour le retour du politique, non comme simple contrainte mais comme élan et espérance. Quand l'indignation prendra la mondialisation pour cible et qu'elle s'émancipera des préjugés contemporains, elle aura une chance de faire trembler sur ses bases un Système qui tient d'abord sur sa capacité de séduction alliée à celle de la surveillance « ludique »...

 

 

Puisque la Gauche a enterré sans larmes le mouvement des indignés dont elle n'avait plus besoin, il faudra bien poser alors les vraies questions du politique et de ses meilleures chances de s'imposer à l'économique et à la « fortune anonyme et vagabonde », et la réponse passe, en France, par le levier institutionnel... En France, ce levier, qu'on le veuille ou non, c'est bien la Monarchie politique, active et décisionniste.