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29/02/2012

Le devoir civique des plus riches.

Il est intéressant de constater la difficulté d'obtenir des chiffres en France sur certaines questions sensibles : ainsi, dans ma note d'hier mardi sur la proposition de François Hollande de taxer les « millionnaires » en revenu annuel, j'avançais le chiffre de 10.000 à 15.000 personnes concernées par cette taxation promise, et cela sur la foi de ce qui était évoqué sur plusieurs chaînes de radio. Or, d'après le candidat socialiste lui-même, ce chiffre ne serait que de 3.000 et les sommes espérées par cette taxation à 75 % des revenus millionnaires d'environ  200 à 300 millions par an, c'est-à-dire moins que ce que l'Etat a versé au seul Bernard Tapie il y a quelques années de manière inconsidérée...

 

Quelques remarques : d'une part, il est étonnant que dans un pays comme le nôtre où le fisc est bien organisé et les moyens de contrôle nombreux, le nombre de personnes gagnant plus d'un million d'euros annuels soit à ce point difficile à cerner. En même temps, cela peut être rassurant de savoir que, justement, le fisc ou les administrations publiques (ou privées, d'ailleurs) ne savent pas tout de nous ! La même incertitude sur les chiffres vaut aussi, semble-t-il, sur le nombre exact de fonctionnaires, ce qui est tout de même ennuyeux quand ces derniers sont payés par l'argent des contribuables... Les contradictions d'un système, sans doute !

 

Deuxième remarque : cette proposition hollandiste (et surtout hollandiste, les socialistes ayant visiblement été surpris de cette proposition de leur candidat...) n'a pas pour vocation d'être déterminante mais plutôt symbolique et j'avoue qu'il ne me paraît pas forcément choquant, en temps de crise, de faire appel au civisme et à un certain patriotisme des plus privilégiés de nos compatriotes. D'ailleurs, n'est-ce pas ce qui se passait dans les cités antiques de Grèce et de l'empire romain ? La richesse était un privilège qui ouvrait à des devoirs civiques, et elle n'était pas séparée du sort même de la cité. Mais il est vrai que certaines « élites » sociales d'aujourd'hui considèrent le patriotisme, l'enracinement dans une terre et la fidélité à un ensemble national comme des « obstacles » à leur liberté individuelle, et qu'elles se veulent les nomades (et les monades...) d'une mondialisation dont elles sont, parfois par égoïsme, les principales bénéficiaires... D'où ma proposition de renforcer le lien entre l'appartenance nationale et la solidarité fiscale : « nationalité est fiscalité ».

 

Dernière remarque (mais pas l'ultime...) : je doute, peut-être à tort, que M. Hollande puisse appliquer cette mesure s'il est élu, car il se trouvera toujours des bonnes âmes dans son propre camp et dans les rangs de ses interlocuteurs et partenaires économiques pour lui indiquer que cela serait « contre-productif » et brandir la menace de « délocalisations des fortunes ». Ce dernier argument classique est malheureusement d'une grande efficacité, sans doute par la faute même des Etats qui n'osent se défendre de peur d'être taxés « d'autoritaires » ou de « liberticides » (deux qualificatifs qui ne sont pas, pourtant, forcément synonymes), et par la faute de l'Union européenne qui, rapidement, risque d'invalider, au nom des principes même de sa construction libérale, cette mesure qui serait présentée par ses contradicteurs comme une atteinte au « Droit européen ». D'ailleurs, il est intéressant de noter la grande indifférence avec laquelle cette proposition a été accueillie, non pas dans les milieux politiques, mais dans les milieux économiques et financiers... Indifférence révélatrice !

 

L'un des grands défis des années qui viennent sera de renforcer le politique pour ramener à la raison (voire à la « maison »...) les plus aisés de nos concitoyens, qu'il ne s'agit pas de chasser ou de persécuter, mais qu'il s'agit de motiver pour une plus grande solidarité avec tous les membres de la Communauté nationale. Que M. Laurent Voulzy déclare hier que cette taxation ne le choquerait pas, au regard des efforts demandés à chacun en ces temps de crise, est un bel exemple que la richesse n'implique pas forcément l'oubli des autres, moins riches : cet artiste révèle ainsi une sorte de patriotisme fiscal qui est aussi la marque de la solidarité nécessaire au-delà des différences sociales. Bravo, l'artiste ! Puisse-t-il être suivi par d'autres !

 

Mais je reste persuadé que son exemple et sa bonne volonté ne trouveront vraiment leur pleine mesure que dans un Etat qui saura s'imposer aux féodalités financières contemporaines, y compris contre les oukases et chantages des multinationales ou des puissances financières du moment : la République de M. Hollande n'est pas une Monarchie royale, et il n'est pas non plus Louis XIV face à Nicolas... Fouquet !

 

14:18 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fisc, hollande, impôts, voulzy, taxe, crise.

28/02/2012

Taxer les plus riches : une proposition et quelques questions.

La proposition de M. François Hollande de taxer à 75 % les personnes touchant plus d'un million d'euros par an (proposition sur laquelle je ne me prononce pas pour l'instant, même si elle ne me semble pas forcément choquante...) soulève de nombreuses questions, au-delà de la posture électorale, et révèle quelques faiblesses de notre système politique, en définitive.

 

Première question : combien cette mesure toucherait-elle de personnes ? En fait, très peu de personnes, semble-t-il : entre 10.000 à 15.000, selon les sources, sur 36 millions de foyers fiscaux. Des sportifs, des artistes, des dirigeants de grandes entreprises, des héritiers de grandes fortunes...

 

Deuxième question : comment empêcher les plus riches de quitter la France ? Là encore, j'éviterai de proposer des choses définitives car, en ce domaine comme en beaucoup d'autres, l'expérience doit rester maître du jeu et guide pour la suite. Mais je pense que, par exemple dans le cas des sportifs, ne pourraient concourir sous les couleurs françaises que ceux qui payent la plus grande part de leurs impôts en France : est-il normal qu'un joueur de raquette français qui est censé représenter la France, qui est soutenu par la fédération française et, donc, par les licenciés mais aussi par les contribuables français, s'exonère de ses devoirs fiscaux ? « Nationalité est fiscalité », d'une certaine manière. Il ne s'agit pas de « dénoncer les riches » mais d'en appeler à leur sens civique, tout simplement ! L'argument vaut aussi pour tous ces artistes qui trouvent le fisc trop tatillon en France, parce que plus exigeant : mais être Français c'est aussi en accepter les devoirs, ce qui n'empêche pas d'ailleurs de critiquer tel ou tel aspect de ceux-ci, dans le cadre du débat civique et politique.

 

Troisième question : cela ne risque-t-il pas de décourager l'esprit d'entreprise ou l'initiative industrielle ? Evidemment, le risque existe, et j'ai souvenir de ce médecin du sud de la France qui l'a quittée, dégoûté par une taxation qu'il jugeait abusive au regard de sa quantité (et qualité) de travail : il m'expliquait qu'il donnait chaque année « une villa » à l'Etat en équivalent argent. Mais c'était plus les charges sur son travail lui-même que les sommes déboursées pour l'impôt sur le revenu qui le choquaient... Détaxer le travail de manière raisonnable peut aussi être la meilleure manière de conserver ceux qui, attachés à leur entreprise ou à leur fonction, se sentent parfois entravés dans leur initiative ou leur compétitivité.

 

En fait, au-delà de ces questions et de mes tentatives de réponse, cette proposition pose aussi une question à peine subliminale, même si elle est, en définitive, majeure : dans quel type de société voulons-nous vivre ? Une société régie par le seul Argent et mue par l'intérêt individuel, ou une société qui n'oublie pas l'argent, certes, mais n'en fait qu'un moyen et non une fin « majuscule », une idole avec ce « A » impérial, une société qui privilégie l'entraide et le partage équitable ? Bien sûr, l'opposition entre ces deux sociétés n'est pas si manichéenne, et il y a aussi des systèmes d'aide sociale dans le premier cas, des « amortisseurs de crise », diraient certains, mais le sens principal d'une société de consommation et « d'Avoir » ne va guère vers l'équité ou la nécessaire justice sociale, condition d'un équilibre des ensembles économiques, sociaux et humains...

 

 

27/02/2012

La République impuissante face à la mondialisation ?

J'étais il y a quelques jours à Verneuil-sur-Avre, et j'en ai profité pour poursuivre ma campagne présidentielle, distribuant tracts et sourires tout en écoutant ce que mes interlocuteurs avaient à dire : non, la France réelle n'est pas silencieuse, mais elle se sent souvent peu écoutée, ou incomprise ; la mondialisation lui apparaît à la fois comme inéluctable, attirante et, en même temps, fatale à ses habitudes et à ses racines, par exemple. Il est vrai que, vue de la campagne, d'une petite ville de province ou d'une grande métropole européenne, la mondialisation n'a ni les mêmes formes, ni les mêmes couleurs, ni les mêmes saveurs ! Mondialisation et métropolisation vont de pair, semble-t-il, et les Normands de Verneuil-sur-Avre l'aperçoivent à travers leur télévision ou par la toile sous des couleurs chatoyantes tout en la vivant aussi par les difficultés quotidiennes pour boucler le mois ou trouver du travail, pour trouver des pièces de rechange à la voiture « d'avant 2000 » ou bien une école à proximité pour les enfants de la ferme... La mondialisation, qui a tant promis comme la Société de consommation dont elle est l'une des compagnes habituelles, déçoit parce qu'elle semble ne profiter qu'à ceux qui ont déjà le Pouvoir, que celui-ci apparaisse sous des formes politiques ou sous celles de l'économique et du social.

 

J'ai souvent écrit que la mondialisation, si elle est un fait, n'est pas forcément un bienfait : tout comme la guerre, diraient certains... Le lien entre les deux, d'ailleurs, n'est pas un hasard, et de plus en plus d'historiens et d'analystes les relient désormais l'une à l'autre, tout comme l'ancien président de la République, M. Valéry Giscard d'Estaing il y a peu !

 

Pour l'heure et pour les habitants de Verneuil, la mondialisation, qu'ils croient donc inéluctable, fatale (au double sens du terme...), est l'une des explications à l'impuissance des politiques dans lesquels, tout compte fait, ils continuent à placer quelques espérances : après tout, ils en connaissent quelques figures locales, ceux que l'on pourrait nommer, sans péjoration, « les notables ». Mais les habitants rencontrés ne se font aucune illusion sur les postulants à la magistrature suprême : à tel point qu'il me suffisait de dire a contrario, en tendant mon tract à des personnes d'abord perplexes : « je ne suis pas candidat ! », pour voir les mines s'éclairer et les mains demander les feuilles siglées royalistes !

 

Aux yeux des citoyens électeurs rencontrés, le Pouvoir politique central est lointain, trop lointain : non pas qu'il soit absent ou invisible, bien au contraire, puisque les médias assomment les Français des débats présidentiels ou, plutôt, des bons mots et disputes politiciennes ; mais parce qu'il apparaît impuissant à réagir face aux délocalisations, à la désindustrialisation, à la déprise agricole, toutes choses qui touchent, parfois de très près, les habitants de ce pays et de ses provinces.

 

Cette double question de l’éloignement et de l’impuissance du pouvoir politique mérite réponse : si la République ne trouve plus les « voies du peuple » ni la force d’agir concrètement face aux aspects les plus contestables de la mondialisation ; si elle s’abandonne au fatalisme et à la démagogie par temps d’élections, et qu’elle se réfugie derrière les décisions « prises ailleurs et par d’autres » pour se défausser de ses responsabilités…, elle perd toute légitimité à incarner efficacement la France, nation et Etat, face aux défis contemporains !