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07/08/2010

La République sarkozienne, fin de la Cinquième République ?

L’été est propice aux augmentations de tarifs diverses et variées et en particulier ce moment où les Français préfèrent les joies de l’apéro convivial et des grillades entre amis aux journaux télévisés et aux débats politiques… Cette année, nous sommes gâtés ! Après les traditionnelles hausses de tarifs du métro parisien et celles, annoncées, des chemins de fer, après celles du gaz un peu avant la période estivale, voici celles des prix de l’électricité : en moyenne, 3,4 % (3 % pour les particuliers, un peu plus pour les professionnels), augmentations qui prennent effet au 15 août.

 

Pendant ce temps-là, on apprend que Madame Bettencourt a, en l’espace de trois ans, reçu environ 100 millions d’euros du fisc au titre du bouclier fiscal, et qu’elle ne paierait en impôts que 9 % de ses revenus, bien moins qu’un contribuable moyen et beaucoup moins fortuné qu’elle… Autre nouvelle « agaçante » : « 14 contribuables français disposant d’un patrimoine supérieur à 16,20 millions d’euros ont déclaré, pour l’année 2008, des revenus inférieurs à 3 430 euros ! Conséquence : tous ont payé un impôt dérisoire et… chacun a en outre encaissé un chèque du Trésor d’environ 160 000 euros. » (Le Point, 17 juin 2010). La formule veut qu’on ne prête qu’aux riches mais, là tout de même, il n’est pas exagéré de parler d’abus de la part de ces personnes qui, visiblement, n’en ont jamais assez et qui ne semblent pas vraiment concernées par les efforts demandés à tous les Français pour surmonter la crise économique !

 

Ce sont tous ces éléments qui créent, au-delà même des affaires Woerth-Bettencourt, Woerth-César, Woerth-etc., une ambiance délétère et un sentiment que l’on ressent lourdement dans les discussions vacancières (ou non, car de nombreux Français travaillent aussi en août), un sentiment de malaise diffus, de plus en plus sombre, explosif, et qui ne croit plus en la parole gouvernementale et, au-delà, politique tandis qu’elle légitime, a contrario, les propos plus vifs à l’égard des « riches » ou des « privilégiés », les jalousies sociales et les colères de comptoir ou d’apéro qui en annoncent peut-être de moins « récréatives »…

 

La République sarkozienne marque peut-être la fin de la Vème République (ou, en tout cas, de son esprit) qui avait, en ses origines, voulu être une synthèse plus ou moins réussie des traditions monarchique et républicaine, et qui avait rendu à l’Etat en son faîte une dignité et une autorité que la IIIème et la IVème avaient largement perdues… La République actuelle marque l’aboutissement de la reconquête par l’Oligarchie du Pouvoir d’Etat, et cela est fort malheureux. Mais sans doute n’est-ce que la confirmation que la République penche naturellement vers les Puissances d’Argent, quoi que l’on fasse pour éviter ce penchant fatal : De Gaulle et quelques autres ont pu, un temps, croire inverser le processus mais, peu à peu, celui-ci a été plus fort, et tous les efforts des aspirants à la magistrature suprême pour conquérir cette première place ont renforcé cette tendance à la fois oligarchique et ploutocratique.

 

Aujourd’hui, si les hausses de tarifs diverses et variées touchent « tout le monde », il n’est pas certain, néanmoins, que l’équité sociale, elle, soit bien assurée en cette République qui ne connaît plus les garde-fous de la décence et de la mesure en politique…

 

 

 

29/06/2010

Economies présidentielles...

Le président annonce une réduction du train de vie de l’Etat et en particulier de ses ministères, et cela arrive enfin mais bien tardivement ! Réduction du nombre de conseillers ministériels, diminution des frais de transport, de logement et de communications, suppression des chasses présidentielles et de la garden-party de l’Elysée du 14 juillet, etc. En période d’austérité générale et de diète sociale, ces mesures soulignent que l’Etat ne doit pas s’exonérer des efforts nécessaires au rétablissement des comptes publics et qu’il prend sa part des sacrifices qu’il demande aux Français. Attention néanmoins à ne pas donner au monde l’image d’un Etat austère qui renoncerait à rayonner à l’intérieur comme à l’extérieur, et aux « Marchés » celle d’un Etat qui obéirait à des règles purement comptables et qui oublierait son rôle premier, éminemment politique, de protection du corps civique et social de la nation et des Français dans leurs communautés et individualités !

 

Autant la réduction des salaires ministériels, mais aussi présidentiel (ce dernier ayant été fortement réévalué depuis 2007…), me semble une idée intéressante pourvu qu’elle reste dans la juste mesure, autant je suis moins certain que la suppression pure et simple des garden-parties de l’Elysée et des ministères soit vraiment une bonne chose : réduire les frais de celles-ci étaient possibles sans tout supprimer, ce qui risque d’entraîner une déconnection encore plus totale entre le Pouvoir et les citoyens dont quelques uns, reconnus pour leurs mérites ou invités pour représenter telle ou telle réalité sociale ou professionnelle, participaient à la fête. Ce que demandent les gens, la plupart du temps, ce n’est pas la suppression des fêtes ou des « mondanités » mais leur ouverture à d’autres que les « privilégiés », les habitués des réceptions et des buffets chics !

 

De plus, comment croire que les puissants de la République sont prêts à d’autres efforts que ceux utiles à la « com’ » gouvernementale en période d’inquiétudes sociales et de rigueur ? Lorsque le ministre de l’éducation nationale, un ancien de l’Oréal (décidément, on n’en sort pas !), et porte-parole de l’Elysée, M. Luc Chatel, explique aujourd’hui qu’il ne voit aucune raison à geler ou diminuer les salaires ministériels au moment même où les fonctionnaires vont devoir accepter ces mêmes mesures pour leur compte, le masque de cette « République exemplaire » que ne cesse à nouveau de brandir M. Sarkozy ne tombe-t-il pas ? « Selon que vous serez puissant ou misérable… », comme disait La Fontaine…

 

Je crains aussi que les mesures annoncées ne soient qu’un écran de fumée qui cachent des pratiques dispendieuses que l’Elysée n’a pas, visiblement, l’intention de cesser, telles que la mobilisation onéreuse et souvent inutile de forces de l’ordre pour telle ou telle visite présidentielle, alors que ces mêmes forces de l’ordre souffrent aujourd’hui d’un manque criant de moyens pour accomplir leurs missions au quotidien et dans les meilleures conditions. Sans oublier l’achat et l’aménagement d’un nouvel Airbus présidentiel, en soi pas forcément scandaleux, mais dont le coût devra être supporté par… le budget déjà fort réduit du ministère de la Défense !

 

En fait, l’Etat ne sera économe à bon escient que lorsqu’il ne sera plus l’objet des convoitises particulières de quelques arrivistes politiciens et qu’il sera inscrit dans le long terme et non dans ce temps bref du calendrier électoral et présidentiel. En économie(s) comme en politique, le temps peut être un allié précieux s’il n’est pas le seul maître de la « respiration politique de l’Etat » : la République n’a pas cette possibilité de voir au-delà d’une ou deux magistratures présidentielles, à moins de s’appeler De Gaulle, et encore ! La Monarchie a, elle, longue vue et bonne mémoire…

 

 

23/02/2010

La question agricole, un nouveau front social ?

Le Salon de l’Agriculture ouvre ses portes dans quelques jours, dans une ambiance à la fois morose et coléreuse : la baisse significative des revenus agricoles, en particulier pour les petits et moyens agriculteurs (- 34 % en un an…) ; la crise laitière et celle des fruits et légumes à l’été dernier ; l’attitude déloyale des grandes surfaces qui préfèrent se fournir à moindre frais dans les pays du Sud à bas salaires et celle non moins scandaleuse des centrales d’achat qui pratiquent le chantage envers les producteurs ; etc., sont autant de motifs d’inquiétudes que de colère !

 

Devant une telle situation, le nombre d’agriculteurs ne cesse de diminuer et, désormais, de nombreux villages de la France rurale n’ont plus de paysans locaux en activité malgré des terres fertiles, de plus en plus convoitées par les promoteurs et grignotées par la rurbanisation. Or, la vieille formule « Pas de pays sans paysans » nous rappelle que la France sans agriculture de proximité, de qualité et de quantité suffisante, perd son indépendance alimentaire et risque de perdre son âme. Il ne s’agit pas de tomber dans une nostalgie stérile du « bon vieux temps des paysans » mais de défendre ce qui est un élément clé de ce qui fait la France, sa diversité (de paysages, de produits, de gastronomies, etc.), sa beauté aussi. Il s’agit également d’aborder les temps nouveaux du retour à une vie plus saine et moins consommatrice, et de rompre avec les mauvaises habitudes d’un productivisme qui a détruit bocages et parfois rivières pour « produire plus pour (faire) gagner plus (aux multinationales de l’agroalimentaire et de la distribution) »…

 

Le Salon de l’Agriculture, cette année du 27 février au 7 mars, est le moment d’aborder ces questions, de réfléchir aux meilleurs moyens de faire vivre l’agriculture dans notre pays en harmonie avec les paysages et les populations, de repenser les rapports entre consommateurs et agriculteurs, parfois en court-circuitant les intermédiaires inutiles ou les grandes surfaces prédatrices… C’est aussi le moment d’évoquer les questions plus politiques mais non moins importantes de la Politique Agricole Commune, de la fonction du Ministère de l’Agriculture, de la place accordée au monde de la production agricole dans les institutions françaises… Et poser la question, même, du régime politique le plus capable de répondre aux enjeux alimentaires, agricoles et d’aménagement du territoire, enjeux actuels et défis de demain.

 

Il est significatif que le Salon de l’Agriculture soit, à cet égard, en passe de devenir un nouveau « front social », un terrain miné dans lequel l’actuel locataire de l’Elysée rechigne à poser le pied, échaudé par les deux expériences passées en 2008 et 2009 : les rumeurs d’un accueil paysan musclé et de la possibilité de jets d’œufs sur M. Sarkozy en disent long sur le divorce entre monde paysan et République sarkozienne… Que ces incidents aient lieu ou non, en fait, n’a que peu d’importance mais le fait que cela soit possible montre que les Campagnes françaises n’acceptent plus d’être méprisées par celui-là même qui devrait, en bonne logique institutionnelle, en être le garant comme du territoire tout entier et de ses populations…