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27/02/2017

La tragédie grecque et la faiblesse française.

La tragédie grecque continue... Combien de fois ai-je soupiré cela, et combien de fois ai-je entendu la réaction de quelques uns qui rétorquaient que les Grecs l'avaient bien cherché, qu'ils n'avaient que ce qu'ils méritaient, etc. ? Ces réponses ne me plaisent pas, quels que soient les défauts et les fautes des Hellènes, et je n'aime guère les amalgames qui punissent, en définitive, tout un peuple comme si tous étaient coupables de la situation, même ceux qui, lors des tricheries initiales sur la réalité du déficit de l’État, n'étaient pas nés ou qu'à peine adolescents.

 

La Grèce entre dans l'Union européenne avant même qu'elle ne prenne ce nom, et elle a été reçue au sein du club européen pour des raisons qui tiennent autant à l'histoire, en ces années 1980 où elles étaient encore considérées comme légitimes, qu'à la politique, la Grèce ayant retrouvé sa place au sein des démocraties après la dictature des colonels qui avait déposée la Monarchie locale du roi Constantin : l'entrée accélérée dans la Communauté économique européenne était aussi une occasion pour cette dernière de montrer qu'elle était la chance pour les pays de l'Europe du sud d'effectuer un rattrapage économique et d'accéder à la société de consommation, si attractive pour des populations qui vivaient alors chichement, même si c'était librement et sans dettes majeures... C'était aussi l'époque où la France dominait encore la construction européenne et que son président depuis 1974, Valéry Giscard d'Estaing, en incarnait, par son discours enjôleur, la belle illusion d'une nouvelle solidarité entre États d'Europe.

Aujourd'hui, rien ne va plus, et la fraternité européenne ressemble à celle de la Révolution française : « baiser Lamourette », et guillotine universelle pour les mal-pensants... Vaste hypocrisie qui profite des bons sentiments de nombre de nos concitoyens, sincèrement « européens », et qui assassine chaque jour un peu plus ceux qui n'y croient plus, recrus de malheurs sociaux et victimes d'un véritable acharnement des ordo-libéraux qui ont pris, concrètement, le contrôle de la politique économique de l'Union européenne, sous la houlette du ministre allemand des finances M. Schäuble, l'intraitable homme de fer de l'Europe.

 

Ces jours-ci, l'Allemagne a encore imposé sa vision au reste de l'Europe de Bruxelles, et a refusé tout allégement de la dette grecque, alors même que la République fédérale avoue un excédent commercial de 270 milliards d'euros, encore plus important que celui de la Chine, et qu'il atteint 8,7 % du PIB de 2016 quand l'UE n'autorise, dans la zone euro, qu'un plafond de 6 %, cela pour éviter un trop grand déséquilibre au sein de l'espace monétaire unique européen. Cet excédent ne me semble pas, en soi, condamnable. En revanche, ce qui est condamnable mais que peu de responsables politiques de l'Union soulignent, c'est l'absence de solidarité concrète d'un pays à l'économie florissante avec un pays qui, depuis sept longues années, vit une véritable et continuelle descente aux enfers, avec une économie sinistrée par une dette qui, malgré tous les efforts faits et consentis par les citoyens grecs, ne cesse d'enfler. C'est aussi l'absence de politique alternative à celle de l'Allemagne présentée par une puissance comme la France, qui pourrait se faire entendre et mieux entendre, surtout. Quand M. Sapin, libéral honteux à Paris et beaucoup plus libéré loin de la capitale française, se rallie à l'intransigeance germanique avec des mots qui rappellent ceux d'un certain Laval qui confondait déjà intérêt de l'Europe avec intérêt de l'Allemagne, il y a de quoi s'encolérer ! « Ce n'est pas une position allemande, c'est une position que nous partageons », affirme-t-il à propos du maintien du FMI dans la troïka qui soumet, en définitive, la Grèce à la plus violente des austérités contraintes. Propos tristement révélateurs d'un abandon de toute volonté d'indépendance nationale de la part du gouvernement...

 

C'est l'absence d'une France forte et capable de se faire entendre et respecter par ses partenaires et en particulier par l'Allemagne, qui défait toute idée et pratique d'une réelle fraternité européenne au service des nations et des peuples. Si l'on veut aider la Grèce, c'est bien à la France qu'il faut redonner les moyens politiques d'être et d'agir : il n'est pas certain que le scrutin présidentiel du printemps réponde à cette exigence. Cela n'empêche pas néanmoins d'y penser et d'y travailler...

 

 

 

 

 

23/05/2016

La République sans autorité...

La contestation multiforme de la loi Travail n'a pas cessé malgré les concessions faites par MM. Valls et Hollande, et les tensions montent, autant autour des raffineries et des stations d'essence que dans les rues, au risque d'affrontements et de violences qui, à l'approche de la coupe européenne de balle-au-pied, font planer le spectre de désordres plus graves encore. Le plus surprenant, pour l'observateur étranger, est que, dans le même temps, l'état d'urgence en vigueur depuis novembre 2015 vient d'être prolongé pour deux mois, alors même que les forces de l'ordre semblent « dépassées » par les émeutes qui dévastent, à chaque grande manifestation, les centres-villes de l'Ouest et de Paris : pourtant, ces mêmes forces de l'ordre sont reconnues, en Europe et à juste titre, comme les meilleures du continent : en somme, ne faut-il pas rechercher ailleurs le problème ? Drôle d'ambiance, en tout cas ! Fin de règne ou de régime ? Crise de l'autorité ou malaise, voire faiblesse de l’État ?

 

Plusieurs réponses possibles, en fait : tout d'abord, nous sommes entrés dans la dernière année du quinquennat de M. Hollande, déjà reparti en campagne électorale présidentielle et à la recherche, sinon de tous ses électeurs perdus, du moins des électeurs de gauche et européistes qui voudront bien lui faire crédit de quelques réformes plus sociétales que sociales, comme la légalisation du mariage homosexuel, et d'un alignement constant sur la ligne « la plus européenne », ayant renoncé à faire preuve d'originalité française sur de nombreux sujets touchant la politique générale de l'Union européenne (les Grecs en savent quelque chose...). Son partenariat inégal avec la chancelière allemande, qui fait de cette dernière la seule autorité reconnue en Europe (reconnue ne signifie pas bienvenue...), a nettement dégradé l'indépendance de la France et sa possibilité d'être écoutée, voire celle de manœuvrer par elle-même. Or, cela plaît aux élites européistes qui, de tout temps, vantent l'idée d'un fédéralisme continental en ayant aussi intégré l'idée que, pour toute fédération il faut un fédérateur, c'est-à-dire une autorité unique naturellement reconnue et seule « légitime » à entraîner (donc à commander) les autres : souvenons-nous des « briandistes » des années 1940 qui se résolurent, sans être nazis, à rallier l'idée hitlérienne de « l'Europe nouvelle », non par extrémisme (ils ne l'étaient pas, mais bien plutôt modérés, « raisonnables et réalistes » dira l'un d'entre eux dans L'Illustration de l'époque, journal on ne peut plus « convenable » avant-guerre et se proclamant tel en temps de guerre tout en collaborant avec l'Allemand), mais juste par européisme revendiqué et pragmatique...

 

Ainsi, pour en revenir à la situation présente, c'est plus encore la compétition présidentielle sur fond d'impopularité du président en quête de réélection qu'une simple fin de règne annonciatrice d'un possible (ou illusoire) renouveau politique.

 

Mais la tension actuelle autour du projet de loi El Khomry révèle surtout la faiblesse d'un régime, de cette Cinquième qui reste une république, lorsque s'approchent les échéances électorales et que s'aiguisent les longs couteaux des ambitieux qui se veulent tous César quand ils ne sont que Brutus ou Créon...

 

Certains en profitent pour vanter les mérites d'une hypothétique Sixième République qui ne serait rien d'autre, à bien les lire, que le retour aux jeux démocratiques illimités et parlementaires de la Troisième et de la Quatrième, et cela au détriment de l'autorité de la magistrature suprême de l’État, voire de l’État lui-même.

 

Or, si crise de régime il y a, elle tient dans l'autorité défaillante d'une République qui ne sait plus donner de la légitimité à son « Pays légal » : le processus électoral de la démocratie représentative ne fonde plus qu'une légalité de moins en moins légitime aux yeux des électeurs qui attendent des réponses et des solutions là où les élus, parlementaires ou président, ne leur donnent que des promesses et ne leur imposent que des oukases. Si le recours au 49-3 passe désormais si mal dans l'Opinion publique, c'est qu'il est devenu un mode de gouvernement quand il ne devrait être qu'une exception utilisée avec prudence et fermeté, et non avec brutalité comme c'est le cas aujourd'hui par MM. Valls et Hollande.

 

Cette République qui se veut autoritaire quand elle n'est qu'arbitraire (et non arbitrale) doit faire face à de multiples mécontentements et mouvements de révoltes, dont certains sont fort motivés quand d'autres ne sont que les soubresauts des anciennes forces jadis promptes à défendre une République qui, finalement, n'en a plus besoin. Mais elle ne peut durer, sa faiblesse menaçant de désarmer complètement notre pays face aux défis du monde contemporain. Il nous faut bien, alors, reposer la question première qui est celle du Politique et de son incarnation institutionnelle, de celle qui est nécessaire au maintien et au déploiement de toutes les possibilités de la France dans le monde, pour aujourd'hui comme pour demain.

 

Le mot « crise » vient du grec « Krisis » qui signifie la séparation entre un avant et un après : si, désormais, c'est la République qui tient lieu « d'ancien régime », il est temps de rappeler que la Monarchie peut tenir lieu et place de « nouveau régime », non pour sa simple nouveauté mais pour sa capacité à durer, à se renouveler, à s'éterniser dans le sens le plus noble du terme, celui de l'enracinement qui permet à un pays, arbre de familles et de provinces, d'histoires et de visages, d'âmes et d'esprits, de s'élever vers le ciel, florissant et vigoureux...

 

 

 

21/08/2015

La crise grecque et ses profiteurs...

 

 

Cet été qui n'est pas encore achevé fut celui des révélations et de la fin des illusions européennes, comme le souligne avec force Jean-Pierre Chevènement dans le dernier numéro de Marianne, et c'est la Grèce qui a supporté, mal et bien malgré elle, le poids de celles-ci : le revirement de M. Tsipras, salué comme une « victoire du bon sens » par les gouvernements européens (en particulier par l'ancien trostkiste Michel Sapin, actuel ministre français des finances), ce qui en dit long sur le cynisme ou l'aveuglement des oligarchies contemporaines, n'a pas sauvé la Grèce et encore moins les travailleurs et retraités grecs. Il a juste permis aux États de la zone euro de « sauver leur mise » et, surtout, montré le caractère « obligatoire » (dictatorial, diraient certains...) d'une Europe plus mondialisée qu'européenne, c'est-à-dire d'une Europe dans laquelle aucune alternative au libéralisme économique n'est autorisée, ni « socialiste » ni sociale tout simplement : « l'Europe sociale n'aura pas lieu », pourrait-on dire aujourd'hui sans trop de crainte d'être démenti, malheureusement d'ailleurs, par les réalités.

 

Dans une crise, il y a certes des perdants, et nous les reconnaissons : les Grecs et, plus généralement, les peuples au sens large mais aussi et surtout au sens des classes populaires. Il y en aura d'autres dans les temps qui viennent, et la sévérité de l'Union européenne et de l'Allemagne pourra sans doute trouver à s'exprimer à l'égard de la France en 2017, pendant et, surtout, après l'élection présidentielle : nous en reparlerons ! Mais il y a aussi des gagnants : est-ce l'Allemagne, par exemple, qui a imposé son « ordolibéralisme » et menace toujours de mettre la Grèce hors de la zone euro, alors même que rien ne l'y autorise dans les traités ? Sans doute, en fait : les privatisations qui reprennent en Grèce ces jours-ci après six mois de suspension semblent bien le confirmer, avec l'achat, pour un prix fort intéressant (voire mieux encore...), de quatorze aéroports de Grèce (sur trente-neuf), mais aussi avec les 100 milliards d'économies budgétaires évoquées par Joseph Macé-Scaron dans son éditorial de Marianne (édition du 14 au 20 août 2015), citant une étude de l'Institut Leibniz d'études et de recherches économiques, publiée le 10 août... « En effet, la peur du « Grexit » a précipité les investisseurs vers ce qu'ils considèrent comme le plus sûr : les obligations de l’État allemand. Ce faisant, les taux d'intérêt réels auxquels l'Allemagne emprunte sont inférieurs à 0 %. Voilà pourquoi « ces économies dépassent le coût engendré par la crise, et ce même si la Grèce ne remboursait pas entièrement sa dette, commentent les économistes. L'Allemagne a donc dans tous les cas profité de la crise grecque. » ».

 

Mais cette victoire allemande pourrait bien se retourner contre elle : en effet, le FMI, contributeur important au prochain plan de sauvetage de la Grèce, demande instamment à l'Allemagne et aux autres pays de la zone euro de considérer sérieusement une forte réduction de la dette grecque, sous peine de ne pas participer lui-même au plan prévu... Ce bras de fer entre le FMI et principalement l'Allemagne montre bien les limites d'un système devenu fou, qui ne sait plus comment arrêter la folle mécanique de l'endettement des sociétés inscrites dans une mondialisation qui prend la tournure d'une guerre économique de tous contre tous !

 

Tout le monde sait que la Grèce ne pourra rembourser une dette qui continue de se creuser un peu plus chaque jour, et que le troisième plan d'aide a peu de chances de succès, à l'image et à la suite des deux précédents, ce que souligne Le Monde dans son édition du mardi 18 août, mais qu'importe, semblent dire les institutions et les gouvernements de l'Union, pourvu que l'on fasse définitivement passer à la Grèce l'envie de résister aux oukases de cette Europe punitive qui a, pourtant, échoué à tenir ses promesses économiques des années 1990-2000, et que l'on fasse bien passer le message à tous ceux qui pouvaient espérer un autre destin que celui de cette Europe-là ! « La Grèce paiera ! », continuent de clamer les plus fervents des européistes, furieux des résistances de plus en plus fortes des classes populaires de l'Europe réelle. Mais l'avenir risque bien de ne pas exactement confirmer ce pronostic martelé avec tant de vigueur...

 

Le système financier et économique de la zone euro est dans une impasse : il est plus que temps de repenser l'économie, non plus sur les seuls principes de l'individualisme et du profit démesuré, du libre Marché et de la concurrence sauvage, mais sur ceux de la dignité des personnes et du Bien commun. En somme, civiliser l'économie pour la sortir de son ensauvagement contemporain et nous en préserver ! Rude et vaste tâche...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

16:24 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : crise, allemagne, grecs, dette, tsipras.