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26/01/2022

L'élection présidentielle ? Plutôt le Roi libre, et le Premier Ministre élu...

 

« Quelle chance d’être royaliste en période de présidentielle », me dit en souriant un collègue du lycée dans lequel j’ai l’honneur d’enseigner. Il est vrai que l’actuelle campagne électorale, pas encore officielle mais déjà bien (ou mal, d’ailleurs) engagée, n’a rien de réjouissant et de constructif quand, dans le même temps, la crise sanitaire monopolise les ondes et les esprits, comme une sorte d’immense « distraction » au sens premier du terme, c’est-à-dire comme moyen d’éluder tous les autres soucis ou sources de débats. De plus, le paysage électoral, s’il offre une belle diversité de couleurs politiques renforcée par la survenue de nouvelles figures, apparaît souvent comme trop chaotique pour enthousiasmer les électeurs et préparer un avenir français digne de ce nom : sans doute parce que nombre de Français ne se reconnaissent plus dans d’anciens clivages et qu’une partie non négligeable ne croit plus en les possibilités des politiques de « changer les choses ». Ce discrédit de la politique n’est pas vraiment surprenant quand on se rappelle des quatre décennies passées et des désillusions populaires qui firent suite au « tournant de la rigueur » de 1983 (qui fut aussi le temps du ralliement de la Gauche, mais aussi de la Droite anciennement gaulliste, à l’idéologie du néolibéralisme et de « l’Europe » supranationale et si peu sociale), et qui ont renforcé le « pays légal » (particulièrement dans les instances mondialisées et, parfois, bien peu politiques) sans contenter le « pays réel ». Mais la meilleure réponse est-elle l’abstention, cette « absence du peuple » qui, malgré ses scores parfois mirobolants, n’a absolument aucune influence sur le cours des choses ? Je ne le pense pas, et je ne renonce pas à « faire de la politique », non pour me plaindre éternellement et vanter un « c’était mieux avant » qui ne fait guère avancer les débats, mais pour proposer, discuter, convaincre de la nécessité de nouvelles institutions plus équilibrées et justes, ou, mieux, qui remettent la justice au cœur de la pratique institutionnelle par son inscription, non pas seulement formelle mais bien réelle, dans la logique institutionnelle.

 

Les débats actuels valorisés par les médias ne sont guère, il faut le dire, à la hauteur des enjeux de l’élection présidentielle : les petites phrases et les bons mots, les condamnations outrées et les postures indignées, les éclats de voix et l’occultation des problèmes… le spectacle est triste ! Et la politique dévalorisée, juste réduite à un jeu de communication quand elle devrait être, idéalement, une grande et profitable « disputatio » destinée à soulager les maux du temps et à assurer la justice, en particulier sociale. Et pourtant ! L’élection présidentielle reste l’occasion de parler politique et de confronter les idées sans négliger les réalités. Les citoyens, quels que soient leurs opinions et leurs souhaits, accordent souvent plus d’importance et d’intérêt à la « reine des élections » qui revient désormais tous les cinq ans qu’aux autres confrontations électorales, encore plus négligées depuis ces dernières décennies et particulièrement depuis deux ans, quand la préoccupation sanitaire a remplacé (avantageusement pour le gouvernement ?) tout autre souci…

 

Certains pourraient croire que le royaliste que je suis se réjouit de cette situation d’un débat présidentiel délétère qui, tout compte fait, confirme mes préventions à l’égard de la République « disputailleuse » : mais non, je ne suis guère heureux de ce spectacle parce que, s’il démontre à l’envi l’un des défauts majeurs de la République (voire plusieurs à la fois), il discrédite plus largement toute discussion politique et la politique elle-même, ainsi limitée à une foire d’empoigne et à un combat des ambitions personnelles quand il faudrait une ambition, au sens fort du terme, pour le pays et ses âmes.

 

Que peut, alors, faire un royaliste en cette période présidentielle ? Participer au débat, non pour attiser les querelles (elles sont bien assez nombreuses comme cela, non ?), mais pour avancer quelques idées, quelques arguments, et pas seulement pour parler des institutions, même si cela reste évidemment la motivation majeure du royaliste commun. Et, justement (et ce n’est pas contradictoire avec ce que je viens d’écrire à la phrase précédente), pour souligner aussi tout l’intérêt d’une Monarchie royale pour les temps contemporains, au-delà du combat environnemental, social ou universitaire… Car c’est bien cette dernière qui est la condition, dans notre pays, d’une « disputatio » politique apaisée et cadrée sans être forcément dépassionnée. En fait, en Monarchie, la « première place » institutionnelle étant « déjà » prise et occupée par le titulaire de la Couronne, cela assure à la fois la continuité et la pérennité de l’Etat à travers sa magistrature suprême tout en permettant débats et élections pour les autres degrés de l’Etat et pour toutes les institutions du pays, nationales, provinciales, communales, voire professionnelles et universitaires. A partir de là, d’ailleurs, il n’est pas impossible d’imaginer plusieurs principes d’organisations politiques et civiques du pays, et des modes de désignation qui puissent, aussi, être l’objet de débats, d’aménagements et d’évolutions au fil des générations, pour éviter un fixisme qui peut s’avérer déplorable et, même, contraire à toute tradition politique qui, et Maurras a eu le mérite de le souligner (même s’il n’a pas toujours été son propre disciple en ce domaine…), ne peut être que « critique » si elle veut vivre et se perpétuer.

 

La Monarchie royale établie éviterait cette querelle des egos qui revient tous les cinq ans, et nous épargnerait les flots de démagogie qui, trop souvent, submergent la scène médiatique sans que les spectateurs y croient vraiment. Ou, plutôt, elle préserverait la magistrature suprême de l’Etat de cette perpétuelle course à l’échalote qui fait valser les milliards avant que, une fois l’heureux élu titularisé président, les promesses redeviennent chiffons de papier remisés dans les archives parlementaires ou nationales…

 

Cela signifierait-il que le roi en fonction serait insensible aux débats électoraux et politiques qui peuvent animer, voire secouer le pays ? Non, il les écouterait sans doute mais sans y participer directement, dans une situation d’arbitrage à n’exercer que dans quelques occasions rares et particulières, statutairement définies, toujours dans le souci de préserver le pouvoir régalien et son incarnation de la Grande diplomatie française. En fait, le général de Gaulle, en son règne particulier (au-delà de ses défauts et des polémiques historiques), avait esquissé cette posture sans pouvoir l’incarner lui-même, ne serait-ce que du fait des circonstances et de sa désignation par les Grands électeurs en 1958 puis par les électeurs eux-mêmes en 1965, qui ne lui avaient renouvelé leur confiance qu’au second tour, au grand désespoir du général qui avait jusqu’alors pensé que sa « légitimité », née du 18 juin 1940, pouvait suffire à le faire adouber par le corps électoral. Néanmoins, la difficulté contemporaine est de « priver les électeurs de l’élection présidentielle » elle-même alors que, même s’ils sont de moins en moins nombreux à prendre le chemin des urnes, elle semble rester un « droit » auquel ils ne souhaitent pas renoncer comme l’indiquent de nombreuses enquêtes d’opinion et malgré les velléités de Sixième République portée par M. Mélenchon qui, si elle advenait, aurait pourtant ce même effet de « dégagement de la fonction présidentielle de la procédure électorale au suffrage universel direct ». Une solution simple serait donc de transférer l’élection au suffrage universel de la magistrature suprême de l’Etat, désormais non-élective et « dynastique » (royale, en somme), à la fonction primo-ministérielle et gouvernementale, sans calendrier limitatif strict mais avec une remise en cause bisannuelle, par exemple, et avec la possibilité, en cas de volonté des parlementaires ou d’une majorité claire du corps électoral, de procéder à une nouvelle élection au poste de Premier Ministre, en suivant un processus électoral de quelques semaines. L’avantage serait aussi de redonner du sens aux élections législatives qui, pouvant être couplées si le Premier Ministre ou le Roi du moment le souhaitait à celle du premier (Chef du gouvernement sans l’être de l’Etat), porteraient sur la confrontation de programmes plus que de personnes politiciennes et traceraient une carte plus démocratique que partitocratique. De plus, une Monarchie royale qui incarnerait l’unité française aurait plus de capacités pour « fédéraliser » la carte de la nation et rendre aux provinces (ou aux régions), aux communes et aux corps intermédiaires en général, des pouvoirs et les moyens de leur exercice, que notre actuelle République centralisatrice et métropolisée.

 

Ces quelques réflexions et propositions peuvent-elles former un programme institutionnel royaliste pour les décennies à venir ? Pourquoi pas, si l’on veut bien travailler, de façon réaliste et efficace, à la crédibilisation d’une Monarchie royale qui n’est pas qu’un idéal abstrait mais une nécessité politique à faire advenir dans un délai qu’il faut espérer à échelle humaine !

 

 

 

 

 

Post-scriptum : Ces quelques propositions pour une nouvelle Monarchie royale n’engagent évidemment que moi-même, et elles ont vocation à susciter le débat, non à le fermer…

 

01/01/2022

2022, cette année électorale qui vient... en vain ?

 

L’année 2022 est une année électorale, la présidentielle dominant les élections législatives sans forcément les écraser : s’il paraît bien illusoire de tenter des pronostics, il n’est pas interdit d’évoquer les différents schémas possibles, sachant qu’il est parfois fort utile (et prudent) de « prévoir l’imprévisible et d’attendre l’inattendu ». Ainsi, le temps électoral du printemps pourrait bien s’achever par une nouvelle cohabitation, la quatrième sous la Cinquième République que le général de Gaulle n’avait pas fondé pour cela, en fait sinon en Droit. Le scénario d’un président reconduit qui perdrait les élections législatives du lendemain n’est pas à exclure quand, dans le même temps, les espérances populistes (de droite comme de gauche) n’arrivent ni à convaincre vraiment ni à gagner certainement. En fait, le résultat présidentiel dépendra aussi largement du nombre de candidats ayant réussi à passer le filtre des 500 signatures, mais aussi des développements prochains de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques et sociales, aujourd’hui largement amorties (mais de façon qui ne peut être que temporaire) par la politique du « quoi qu’il en coûte », utile sans doute mais périlleuse financièrement, la dette publique ne cessant de croître et d’embellir au fil des mois et des plans de sauvegarde…

 

Dans une centaine de jours, nous serons fixés, du moins pour la présidence de la République, et il faudra ensuite attendre quelques semaines encore avant la formation du gouvernement issu de l’alliance majoritaire en sièges à l’assemblée nationale. Je doute qu’il y ait alors un « état de grâce » pour le Pouvoir sorti des urnes, et je redoute (à moins que je ne l’espère, au moins pour certains de ses aspects politiques de possible refondation…) une après-élection compliquée, tant (sur le plan extérieur) du fait d’une Allemagne économiquement imposante et socialement rigide que des velléités états-uniennes de « casser les reins » de la France (M. Biden est un adversaire qui peut nous rappeler l’attitude détestable de Franklin Delano Roosevelt à l’égard de la France libre du général de Gaulle), et tant (sur le plan intérieur) des revendications libérales pour l’allongement du temps de travail (l’économiste Jean-Marc Daniel évoquait le fait que le dossier des retraites était quasiment « bouclé » du fait de l’endettement accéléré du pays conséquent à la crise sanitaire) que des ressentiments accumulés par des classes de Français actifs fragilisées par la globalisation et, par la même occasion, par la numérisation (l’artificialisation ? la « dématérialisation » ?) de la société, deux processus renforcés en ces temps étranges de Covid-19, un double phénomène que certains évoquent sous la formule de « grande réinitialisation », formule que l’on doit à Klaus Schwab, fondateur du forum de Davos…

 

Mais la campagne présidentielle aura-t-elle vraiment lieu ? Bien sûr, elle a déjà commencé depuis longtemps et le drame de la République quinquennale est sans doute que la France semble en « présidentielle permanente », au risque d’empêcher toute véritable politique de long terme et de, trop souvent, « cannibaliser » le travail de l’Etat. Mais, la campagne des « derniers mois » est ce moment particulier durant lequel a lieu le véritable « combat des chefs » dont il ne devra en rester qu’un ! En fait, la dépense d’énergies électorales pour la présidentielle est souvent un gaspillage de forces qui auraient été plus utiles pour le débat législatif, au niveau national comme au niveau local, et cette bagarre pour la magistrature suprême, en définitive, tend à déposséder les citoyens de leurs pouvoirs réels de peser sur la gestion de leurs espaces civiques de proximité : en étant « la reine des élections », la présidentielle renforce, non pas l’unité nationale, mais la centralisation politique, et il n’est pas surprenant de constater que la plupart des candidats à celle de 2022 sont des Parisiens, sinon de souche, du moins de « situation ». Cela ne serait pas forcément dérangeant si de véritables pouvoirs locaux, de décision et de création législative, existaient dans les régions et dans les communes, mais ce n’est pas vraiment le cas, sauf à la marge : l’actuelle crise sanitaire a confirmé cette centralisation et l’absence d’autonomie des pouvoirs locaux, au risque de provoquer incompréhensions et ressentiments dans les provinces. « Depuis le temps que Paris impose sa loi à ceux du Nord au Midi qui n’en veulent pas… », affirmait une vieille chanson des années 1970 (1), et le processus de métropolisation n’a, en définitive, fait que confirmer le rôle prépondérant de Paris dans la politique française tout en étendant « l’archipel métropolitain français » aux points cardinaux du pays et en asséchant un peu plus les territoires ruraux et les « périphéries », anciens réservoirs des colères populaires et enracinées, celles des Bonnets rouges de l’époque louisquatorzienne aux Gilets jaunes de 2018, des Vendéens et des Chouans de 1793 aux pêcheurs en révolte de 1995, etc.

 

Cette année électorale est l’occasion, en définitive, de rappeler tout ce qu’une Monarchie royale pourrait amener à notre pays et ce dont il pourrait le libérer. Cela sera l’occasion d’une prochaine note…

 

 

 

 

 

Notes : (1) : « Chouans, en avant », dans l’opéra rock « La Révolution française » présenté en 1974.

 

 

04/12/2021

Une élection présidentielle pour rien ?

 

La campagne présidentielle, peu à peu, dévoile les candidats au siège élyséen, et la liste s’allonge, avant que de se raccourcir lorsque, passée la collecte des signatures d’élus, viendra le temps de la véritable compétition pour le premier, puis le second tour. Les Républicains, cette semaine, ont désigné leur candidate, Mme Pécresse, choisie entre cinq postulants déjà habitués aux estrades et aux manœuvres de la politique, tandis que le polémiste Éric Zemmour, mardi, a officialisé son entrée dans le cercle des candidats déclarés. Mme Hidalgo sillonne la France, tout comme son homologue écologiste M. Jadot, tous les deux à la recherche d’électeurs qu’ils ne retrouvent pas, pour l’heure, dans les « intentions de vote » des sondages ; M. Montebourg, lui, semble connaître la descente aux enfers, la Gauche ayant définitivement renoncé à l’idée d’une indépendance française, tant industrielle que politique, quand lui pensait démondialisation ordonnée et souveraineté nationale, y compris sur la question des migrations… Quant au favori pas encore déclaré, le sortant président qui souhaite ne pas être sorti au printemps prochain, il paraît en campagne permanente, dans une posture qui se veut celle du rassembleur après avoir été celui dont le règne aura été marqué par la grande fracture « bloc élitaire contre bloc populaire » : le soulèvement des Gilets jaunes (le plus important mouvement social depuis 1995, voire depuis Mai 68), qui n’a pas vraiment abouti politiquement, reste néanmoins le symbole de cette confrontation, jusque là relativement silencieuse, entre les deux France « actives », celle des peuples « sédentaires » du Travail et des « périphéries » de la métropolisation contre celle des élites financières, économiques et intellectuelles, mondialisées et « nomadisées » (comme l’avait d’ailleurs annoncé et souhaité l’ancien premier ministre Michel Rocard au milieu des années 1990). Mais l’élection présidentielle peut-elle dénouer la crise sociale contemporaine liée à la mondialisation et à sa traduction en métropolisation, désormais dominante sur les territoires et les hommes ? C’est peu probable.

 

L’une des raisons de la vanité de croire en une solution présidentielle prochaine, c’est la situation même de la société française et de sa disharmonie contemporaine (qui remonte bien avant le règne de M. Macron), de cette forme de « guerre civile » larvée que l’on pourrait qualifier, en traduction sociale simple de la confrontation des blocs, de « lutte des classes » (mais fort différente de celle des XIXe et XXe siècles) qui, en définitive, menace, à plus ou moins long terme, la pérennité même de l’unité française. Une lutte des classes aujourd’hui déséquilibrée au profit de ceux qui semblent tenir solidement les rênes du Minotaure Pouvoir, et qui n’ont pas l’intention de les lâcher de sitôt. Car ce qu’il ne serait pas scandaleux de nommer « pays légal » paraît aujourd’hui si sûr de lui et de son bon droit (quand il ne le créé pas lui-même sous forme de « droits », « lois », « directives », etc.) qu’il est devenu sourd à ce que certains nomment, avec une pointe de mépris, « l’arrière-pays » et qui, en fait, constitue ce que les maurrassiens d’antan nommaient « le pays réel ». La grande difficulté pour les opposants à l’idéologie dominante défendue et entretenue par le pays légal est de réussir à structurer un discours cohérent et convaincant autant qu’une stratégie d’opposition crédible et, au-delà, une alternative au régime en place, voire au « système », nom-valise qui, s’il n’est pas rigoureusement cerné et défini, prête évidemment le flanc à toutes les incompréhensions (1). Cela risque d’être d’autant moins facile que, contrairement à la société française d’avant la mondialisation des années 1990, le terreau civilisationnel de notre pays est largement asséché et, dans le même temps, régulièrement fouaillé par les fourches des partisans de la mondialisation et des « principes anglosaxons » qui accélèrent ainsi ce processus destructeur… A la question classique « Qu’est-ce qu’être français ? », la réponse paraît de moins en moins évidente et, donc, de plus en plus polémique, particulièrement aux oreilles de ceux pour qui la question même n’a plus de raison d’être…

 

Les élites mondialisées ne se posent plus la question, ou avec un sourire légèrement ironique, et considèrent que la France est désormais « dépassée » ou « trop petite », en négligeant que ce genre de discours et ce type d’arguments ne cessent de courir depuis près d’un siècle sans réussir à convaincre les Français eux-mêmes, et cela malgré les campagnes multiples des institutions de l’Union Européenne, de la République française elle-même (principalement, et avec de fortes nuances selon le locataire de l’Elysée, depuis 1974) et de nombre de médias et d’universités (entre autres) atteintes par les théories exotiques « d’effacement des mémoires traditionnelles et historiques locales » venues d’Outre-Atlantique. Or, la France n’est pas finie et sa vocation n’est pas de se fondre dans un grand Tout post-national, mais, au contraire, de présenter toujours une alternative au règne des empires, comme cela fut le cas sous le roi Philippe-Auguste ou sous le général de Gaulle : la France est une nation, elle n’est pas un empire et elle n’est pas impérialiste, parce que cela ne correspond pas à sa vocation « éternelle ». Si la Révolution française lui a fait croire, un temps, qu’elle devait imposer son idéologie du moment par le fer et le feu plutôt que par le prestige et la culture, elle souhaite désormais vivre en paix avec les uns comme les autres sans renoncer à ce qu’elle est et qui fait qu’elle n’est pas complètement « européenne » ou « mondiale », ni « une et indivisible » mais bien plutôt « plurielle et unie ».

 

Alors sans doute, dans ce grand barnum de la présidentielle, y aura-t-il, certes, nombre de drapeaux étoilés de l’Union Européenne agités avec frénésie et pléthore de promesses d’une « autre Europe » que celle qui, aujourd’hui, n’apparaît plus que comme une zone de libre-échange ouverte aux quatre vents, offerte aux produits et aux concepts venus d’ailleurs ; les élites mondialisées résidant en France s’époumoneront en anglais et s’effraieront des risques d’un populisme français ; de grands mots seront prononcés par nos actuels gouvernants, soucieux de conserver leur pouvoir et leurs « acquis », et par leurs adversaires tout autant soucieux de prendre la place sans renverser la table et la vaisselle… Le pays légal dominant se défendra aussi d’abandonner la France et les Français, jurant pour la énième fois qu’il préservera les industries nationales avant, l’élection passée, de détourner les yeux devant les délocalisations ou de clamer, la main sur le cœur, l’éternel « plus jamais ça » devant le désastre de nouvelles fermetures d’usines déménagées pour des pays plus « généreux », fiscalement parlant bien sûr… D’autres, au contraire, feront triompher le tricolore à tous les étages dans leurs rassemblements, en appelant au « sursaut », à la « France d’abord » (ce qui n’est pas si mal, tout compte fait), mais sans forcément prendre la mesure de l’immense « réforme politique et sociale » que cela nécessite : revêtir l’uniforme du général de Gaulle ou l’armure de Philippe-Auguste n’est pas chose facile dans un temps où la société de consommation, couplée à la mondialisation, a largement éteint le « nous » collectif et national au profit du « je » individualiste et mouvant, et « l’épuisement civique » contemporain, s’il n’est pas surmonté par une forte espérance et par la volonté politique qui peut la faire advenir et l’épanouir en une politique de grandeur et d’avenir, pourrait bien ruiner les espoirs d’un renouveau du « projet français ».

 

Il ne s’agira pas, pour les royalistes d’aujourd’hui, de contempler la bataille d’en haut avec indifférence, ni de s’emmêler dans les querelles électorales sans fin sinon sans fond, mais bien plutôt de commenter, d’intervenir, d’agir, non pas pour une candidature quelconque, mais pour rappeler les conditions du Bien commun et les propositions qui peuvent aider la nation française à redevenir ce qu’elle doit être, c’est-à-dire elle-même, fidèle à sa vocation historique et politique de puissance libre et médiatrice.

 

 

 

 

 

 

 

 

Notes : (1) : La définition de ce que nous entendons par « Système » sera l’objet d’une prochaine note, en cours d’élaboration : elle permettra d’éviter des erreurs d’interprétation, toujours préjudiciables à la bonne compréhension des raisons de notre combat royaliste. Disons juste que le Système n’est pas seulement la forme institutionnelle du moment mais qu’il est aussi une idéologie comme un cadre de déploiement des pouvoirs effectifs contemporains, au-delà même du seul domaine politique. Ce qui en rend la critique plus ardue mais pas moins nécessaire, en prenant soin de distinguer le bon grain de l’ivraie, et d’éviter de tomber dans une forme de complotisme qui favoriserait, en fait, ce qui mérite de déchoir…