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17/07/2015

La retraite à 67 ans : socialement absurde en Grèce comme en France.

La Grèce, prisonnière de son endettement et des institutions européennes qui ne lui font (et feront...) aucun cadeau, est redevenue le laboratoire d'un libéralisme de plus en plus violent, encore plus arrogant depuis la « victoire de l'Europe » (sur la Grèce...) vantée par M. Hollande dans un exercice d'autosatisfaction qui promet bien des désillusions. Ainsi, l'âge du départ à la retraite des Grecs sera désormais de 67 ans... Pour ceux qui me lisent régulièrement, ils se souviendront que, depuis le début 2011, je dénonce ce projet (qui n'est pas nouveau) défendu par la classe dirigeante allemande, la Commission européenne et les divers patronats d'Europe pour qui ce n'est qu'un « début », certains prônant le passage à 69, voire 70 ans, tandis qu'il était évoqué, en France il y a quelques mois, par les services de Mme Marisol Touraine, la possibilité de retarder le départ à la retraite des chirurgiens à... 72 ans !

 

Si le choix était laissé, librement, aux personnes concernées, et qu'elles l'acceptent, pourquoi pas ? Je crois me souvenir que mon grand-père n'a jamais pris sa retraite et qu'il était encore en activité quelques semaines avant d'être emporté par la maladie, à 75 ans... Mais, dans le cas grec et dans les propositions insistantes du Medef et des fonctionnaires européens (qui, eux, gardent un système de retraites très avantageux !), cet âge de départ serait inscrit dans le marbre de la loi et n'ouvrirait de droits à toucher une pension, d'ailleurs pas forcément pleine et entière, qu'à partir de celui-ci, ce qui est proprement dément quand on connaît le taux de chômage en Grèce et plus généralement en Europe, et la difficulté à retrouver du travail après 50 ans !

Ce qui est certain, c'est que « la stratégie du choc » et du chantage pratiquée par l'Union européenne sous domination allemande permet de véritables « avancées » libéralistes qui m'apparaissent comme autant de régressions sociales, et je sais trop bien que la France en sera sans doute prochainement (après l'élection présidentielle et les législatives de 2017 ?) la victime, toujours « au nom de l'euro » et de « l'application des traités ».

 

La retraite à 67 ans comme obligation légale est un véritable scandale, qui repose sur quelques malentendus ou (et ?) manipulations. L'argument d'un accroissement permanent de l'espérance de vie est l'un de ceux-ci, ne serait-ce que parce que, dans le même temps, l'espérance de vie en bonne santé est aujourd'hui, en France, de 62 ans et 5 mois, donc bien inférieure à 67 ans ! De plus, et je reviens sur ce fait indéniable, les personnes de plus de 50 ans, réduites au chômage, ont de moins en moins de chances et de possibilités de retrouver un emploi stable dans leur branche d'activité initiale ou dans une nouvelle fonction pour laquelle leur formation peut être plus ou moins longue, au risque d'accroître la période de non-emploi et, donc, de les pénaliser encore dans le calcul de leurs retraites...

 

Un autre point, peu évoqué par les économistes, c'est le déséquilibre de l'espérance de vie selon le métier et la catégorie sociale : un professeur ou un cadre peut espérer vivre, en moyenne, près de sept ans de plus qu'un ouvrier... Or, ces derniers sont ceux qui, en double peine pourrait-on dire, ont le plus le malheur de connaître une période longue de chômage, en particulier en fin d'activité professionnelle, et qui risquent aussi le plus d'accidents du travail, parfois lourdement handicapants : cela explique en partie la différence d'espérance de vie avec d'autres salariés, même si c'est souvent la dureté des conditions de travail (sur les chantiers par tous les temps, y compris en période de canicule ; dans les usines avec des gestes répétitifs qui peuvent entraîner de lourds problèmes squeletto-musculaires ; etc.) et la difficulté à pouvoir se nourrir de façon équilibrée qui l'expliquent encore plus sûrement...

 

Faut-il adapter l'âge légal de départ à la retraite à la profession exercée ? Cela peut être une réponse intelligente, même si elle ne peut avoir son plein effet positif que si elle s'inscrit dans une stratégie économique et sociale (l'un ne devant pas être complètement disjoint de l'autre) plus générale et dans une logique qui n'oublie pas les personnes, les familles et, tout simplement, la vie...

 

 

 

 

(à suivre : quelques arguments supplémentaires contre la retraite légale à 67 ans.)

 

 

 

08/07/2015

Grèce : de l'humiliation au nationalisme ?

M. Colombani n'aime ni le peuple ni son expression quand elle lui apparaît ne pas « convenir » aux bonnes mœurs européennes et « démocratiques » qui sont celles défendues par les héritiers de Monnet et Schuman, c'est une cause entendue ! Il est vrai que ses illustres prédécesseurs n'avaient guère confiance en des peuples qui pouvaient « mal voter » et qu'ils pensaient qu'il valait mieux leur forcer la main, légalement, oubliant que face à Créon, il finit toujours par se lever quelque nouvelle Antigone qui en appelle à des lois supérieures aux seuls hommes de l'instant : De Gaulle fut, un temps, cette résistance à la Loi européiste au nom de l'histoire et d'une Europe plus grande et plus profonde, en somme plus enracinée et incarnée, que celle, étroite et mesquine, des banques et des actionnaires... Mais de Gaulle ne fut qu'un homme quand il eut fallu une dynastie pour assurer et pérenniser cette politique d'indépendance française et européenne !

 

Les Grecs sont aujourd'hui les cibles de M. Colombani qui leur attribue tous les maux de l'Europe et y voit les fourriers d'un fascisme imaginaire revêtu des oripeaux d'un marxisme nouveau et désuet : non, selon lui, ils ne sont pas des victimes mais des coupables politiques et des suspects idéologiques, ce que prouvent à l'envi la formulation de sa réflexion dans le Direct-Matin de lundi dernier. « Troisième illusion : la Grèce, un pays « humilié » par la « méchante » Europe. Le thème de l'humiliation a toujours été, dans l'Histoire, manié par des partis nationalistes et xénophobes. » Donc, la Grèce a cédé aux penchants nationalistes en voulant rompre avec une humiliation qui serait, si je comprends bien M. Colombani, plus fantasmée que réelle, et ce nationalisme serait d'autant plus dangereux qu'il se couvre du drapeau rouge des « damnés de la terre » : toujours l’ambiguïté (si j'en crois l'essayiste...) de ces révolutionnaires qui, face à la Révolution européenne incarnée par l'Union européenne, se feraient contre-révolutionnaires, c'est-à-dire réactionnaires et rejoindraient le camp des nationalistes, défenseurs d'une nation qui, toujours, dégage une odeur de soufre pour les partisans de la mondialisation contemporaine, mot trompeur, à mon sens, qui cache un véritable globalitarisme peu respectueux des nations et de leurs histoires respectives et combinées...

 

Le fait que le gouvernement de M. Tsipras compte en son sein des souverainistes de droite, des nationalistes hellènes, serait-il la preuve de ce nationalisme dénoncé par M. Colombani ? Pourquoi pas, mais il y en eut aussi dans un précédent gouvernement « modéré » grec, sans soulever alors l'indignation de M. Colombani : quatre ministres d'extrême-droite du parti Laos (qui signifie « Peuple » en langue grecque) entrèrent dans le gouvernement de M. Papademos, en novembre 2011, qui comptait 47 membres issus aussi du Pasok (parti socialiste grec) et de la Nouvelle Démocratie (droite libérale), au nom de l'union nationale, ce qui constituait une « première » depuis la chute de la Dictature des colonels en 1974... Comme quoi ! A l'époque, et il suffit de faire un petit tour de la presse européenne de l'époque, ce gouvernement grec était encensé par toutes les institutions et capitales de l'Union européenne, et personne, à part les partisans de l'actuel gouvernement Tsipras, ne trouvait à redire à la présence de l'extrême-droite dans les couloirs du Pouvoir à Athènes. Sans doute parce que ce gouvernement semblait, provisoirement, répondre aux exigences des créanciers de la Grèce... En ce sens, il apparaissait donc moins nationaliste, malgré la présence de ceux qui se réclamaient d'un ethno-nationalisme hellène...

 

Alors, si l'on considère que la simple primauté accordée à l'intérêt grec plutôt qu'à celui des financiers internationaux est du nationalisme, le gouvernement d'Athènes est bien nationaliste, et qu'il soit dirigé par un homme d'extrême-gauche n'y change rien, si ce n'est qu'il prouve à la fois la plasticité et l'adaptabilité du nationalisme à des situations locales et périodiques. En fait, ce que M. Colombani dénonce sous le terme de nationalisme, c'est la simple volonté politique d'indépendance nationale, rien de plus... En France, M. Chevènement fit souvent les frais médiatiques d'une telle « simplification » qui tend à confondre l'amoureux d'une France libre avec l'extrémiste chauviniste « va-t’en guerre » !

 

Réagir à l'humiliation de son pays par des puissances qui ne répondent de leurs actes devant aucun tribunal ni aucune assemblée est-il scandaleux ? Je ne le pense pas, même si je fais la part des choses et n'oublie pas que, moteurs de l'histoire, l'humiliation et son sentiment peuvent tourner, par le ressentiment qu'elle suscite, aux pires vengeances et atrocités. D'autre part, toute « punition » d'un peuple n'est pas forcément illégitime, mais, quoi qu'il en soit, elle se doit d'être limitée dans le temps et d’éviter toute démesure, qui est la pire des choses : le traité de Versailles, en 1919, a montré les risques d'une hubris moralisatrice et, conjuguée à une incompréhension totale des conditions historiques de l'Europe et à une idéologie irraisonnée, a mené plus sûrement à la guerre suivante que la crise de 1929 elle-même... Dans le cas grec, la « punition » pour les tricheries fiscales et économiques, surtout appliquée aux populations les moins aisées de la Grèce, a été d'une violence inouïe et, surtout, a été le moyen pour les créanciers et les institutions européennes de faire diversion pour ne pas reconnaître les erreurs commises par ces dernières et les fautes de ces derniers.

 

La réaction de fierté du corps civique grec (qui se reconnaît « nation », d'autant plus dans le malheur que l'Union européenne l'unifie par celui-ci...) est tout à fait compréhensible, et légitime, n'en déplaise à M. Colombani : que celui-ci y voie un risque de nationalisme peut, a contrario, nous permettre de redéfinir les conditions et les applications d'une réaction fondatrice, d'une forme de « nationisme » qui s'inscrive dans la durée tout en alliant enracinement et souplesse, pour faire face aux féodalités de la Gouvernance mondiale et aux risques d'une histoire qui ne s'arrête jamais...

 

 

 

 

(à suivre : l'interventionnisme de M. Colombani ; la définition possible d’un nationisme français)

 

 

 

 

31/12/2011

L'euro, une erreur ?

Ce 1er janvier 2002 était une belle journée sur Antibes, et nous nous promenions dans les rues désertes de la ville, profitant de ce temps clément pour musarder... Bien sûr, nos pas nous ont mené devant quelque librairie ancienne, courageusement ouverte en ce matin d'après-réveillon, comme un pied de nez aux excès de la veille : ce fut là que nous dépensâmes nos premiers euros, même s'ils nous restaient encore quelques francs en poche et que je me fis un point d'honneur de continuer à payer en francs autant que je le pus, jusqu'à la date finale de cette possibilité, en février 2002.

 

Le libraire, avec lequel j'échangeai alors quelques mots, était toute ironie à l'égard de cette nouvelle monnaie dont il acceptait désormais les pièces et billets et, dix ans après, son ironie (que j'approuvais, au demeurant) apparaît prémonitoire : personne parmi les promoteurs de cette monnaie unique européenne ne tient à se faire trop remarquer, semble-t-il, sans doute de peur d'affronter la colère des citoyens entraînés dans ce qui apparaît comme une « galère » plus que comme une sympathique croisière monétaire, et par crainte (justifiée au demeurant) de s'entendre rappeler leurs propos illusionnistes et euphoriques (euro-phoriques, pourrait-on dire...) de l'époque, tels que ceux que rapporte le mensuel « Le Monde diplomatique » daté de janvier 2012...

 

J'étais, il y a dix ans, hostile à la mise en place de l'euro comme monnaie unique pour un ensemble de pays qui n'avaient, malgré leur appartenance commune à l'Union européenne, ni les mêmes capacités économiques ni les mêmes intérêts. D'ailleurs, les dirigeants allemands parlaient, parfois ouvertement et pour faire accepter l'euro à leur opinion publique plutôt sceptique, de « l'europamark », et les militants d'Action Française, eux, apposaient dans la Région parisienne des autocollants proclamant « l'euro c'est le mark », ce que la suite, et particulièrement les derniers mois semblent bien avoir confirmé ! Cet euro encore trop cher (même si son coût a diminué ces derniers jours sur le marché des changes) n’a favorisé que les industries allemandes quand il a entraîné de nombreuses délocalisations d’entreprises françaises vers des pays hors de la zone euro (ou les a « justifiées », comme pour Airbus, par exemple) ! Mais n’était-ce pas cette politique d’un mark fort que M. Trichet, président de la Banque centrale européenne, a, par sa gestion de l’euro, pratiqué encore de 2003 à l’automne 2011 ? Aujourd’hui, l’Allemagne semble bien avoir réussi son opération de mainmise sur toute la zone euro, imposant sa direction hégémonique et sa « rigueur » toute germanique à une Europe latine considérée comme trop « légère »… D’un instrument censé lier l’Allemagne à l’Europe de l’Ouest, l’euro est devenu le levier d’une stratégie « d’abord allemande », comme le faisait remarquer l’un des principaux dirigeants du parti de la chancelière Angela Merkel quand il déclarait (pour s’en réjouir) il y a quelques semaines, que « l’Europe parle désormais allemand »…

 

Et maintenant ? Doit-on sortir de l'euro ou le défendre à tout prix, y compris « jusqu'au dernier Grec vivant » comme le déclarait, moqueusement, un économiste hétérodoxe cet été ? Pas forcément facile de répondre, de trancher ! Mais ce qui est certain, c'est que les partisans de « l'euro malgré tout » commencent sérieusement à m'agacer à annoncer l'apocalypse et la guerre en cas de sortie d'un pays de la zone euro : comme si l'euro n'était pas, déjà, une catastrophe économique et sociale, catastrophe qui se traduit par le simple fait que la zone euro, prise dans son ensemble, est l'espace économique dont la croissance est la plus basse du monde (ce qui, en soi, n’est pas forcément un mal sur le plan de la dette environnementale) et qui est le plus durement frappé par ce que l'on nomme « la Crise », et dans lequel ne surnagent que quelques rares pays, dont l’Allemagne ! Le nombre de chômeurs et de travailleurs en situation précaire ne cesse d’augmenter, et ce n’est malheureusement pas fini !

 

Non, l’euro n’est ni une chance ni une protection, mais « il est » et, en attendant mieux (ou en préparant autre chose), c’est cette réalité financière qu’il faut appréhender pour, le moment venu, mieux la réformer… ou la dépasser !

 

 

(à suivre)