02/09/2011
Madame Parisot l'a dit : l'Europe patronale, c'est l'Europe fédérale (et inversement)...
L'Université d'été du MEDEF est marquée, cette année, par l'actualité économique européenne et, surtout, par la volonté de madame Parisot de faire triompher l'idéologie du fédéralisme européen qui, faut-il le souligner, n'a pas grand chose à voir avec le fédéralisme traditionnel français... Idéologie est bien le mot approprié car cet eurofédéralisme repose sur des présupposés que les réalités ne confirment pas vraiment... Bien sûr, le politique a besoin d'imagination, voire de rêve, mais il faut, l'histoire nous l'enseigne, se méfier des utopies quand elles oublient les hommes ou veulent plier ceux-ci à des règles qu'ils refusent intimement parce qu'ils sentent qu'elles atteignent à leur être propre, à leur manière d'être au monde, à leurs libertés... mais aussi à leurs intérêts les plus élémentaires et qui ne sont pas que matériels !
Quelle est d'ailleurs l'Europe fédérale que souhaite madame Parisot ? Il ne s'agit évidemment ni d'une Europe fondée sur une culture qui serait commune ou, plutôt, dominante (il est difficile de définir véritablement une « culture commune » entre des nations, des peuples, des histoires aussi diverses que celles du continent européen), ni d'une Europe-puissance à la sauce gaullienne, éminemment politique, indépendante et souveraine face aux empires extérieurs...
L'Europe fédérale que veut la patronne des patrons est une Europe d'abord « patronale », c'est-à-dire au service de ses entreprises et d'une certaine idée de l'économie, bien loin de « l'esprit de Philadelphie » ou de la notion de « partage » chère aux chrétiens et rappelée récemment encore par le pape Benoït XVI dans l'encyclique « Caritas in veritate » . Je ne suis pas de ceux qui voient dans les patrons des sortes de diables avides de la sueur et du sang des ouvriers pour remplir leurs caisses, mais il faut bien reconnaître qu'une part non négligeable du grand patronat actuel ne réfléchit qu'en termes de coûts et de profits, ces dirigeants d'entreprises étant souvent prisonniers (victimes consentantes ?) et acteurs tout à la fois d'une logique actionnariale qui, par principe, repose sur l'idée de « gagner plus » sans se soucier des moyens employés à cette fin...
Cette Europe fédérale voulue par madame Parisot se conjugue avec l'idée d'une « gouvernance économique européenne » dont il est évident qu'elle s'émancipera (plus encore qu'aujourd'hui ce n'est le cas dans le cadre des institutions de l'Union européenne) des Etats et des peuples, de ces structures nationales qui, quels que soient leurs qualités et défauts respectifs, restent le moyen privilégié du dialogue civique et, si on le veut bien, l'utile bouclier social contre les abus des puissances de la finance et de l'industrie. Elle sera aussi la défaite d'une certaine conception du politique, celle-là même qui voulait que « la politique de la France ne se fait pas à la Corbeille » (c'est-à-dire à la Bourse), ni ailleurs qu'en France...
De plus, il est remarquable que l'Europe fédérale de madame Parisot accorde bien peu de place au « social », et en particulier au « syndical » : il est évident que l'Europe fédérale ne sera pas sociale, si elle est d'abord économique ou (et ?) patronale !
Il est fort possible qu'une partie de la résolution de la question sociale contemporaine passe aussi (mais pas seulement !) par le biais de l'Europe, de coopérations entre Etats de l'Union européenne (voire au-delà) et d'aménagements économiques, fiscaux et sociaux, mais il serait dangereux et vain de limiter la construction européenne à ce seul « fédéralisme » quand existent d'autres formules, en particulier confédérales, sans doute plus équilibrées et socialement justes...
16:08 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : crise, europe fédérale, patronat, fédéralisme.
23/08/2011
Coupe du monde des sans-abri : le sport solidaire.
Au moment où la crise continue à déployer ses effets sur la planète et particulièrement dans les pays du Nord, il est des initiatives qui renouent avec l'espérance et le partage : la 9ème Coupe du monde de balle-au-pied des sans-abri, qui se déroule en ce moment même et jusqu'à dimanche à Paris, en est l'une des plus belles preuves et montre que le sport peut jouer un véritable rôle social, non pas comme spectacle mais comme moment de vraie fête et comme élément de sociabilité et, même, de lutte contre la précarité.
Cette Coupe du monde des sans-abri, qui existe depuis 2003 et se fait selon les règles du « futsal » (balle-au-pied en salle), au pied de la Tour Eiffel, motive celles et ceux qui y participent et permet à certains de sortir de leur condition de pauvreté, ce qui n'est pas totalement négligeable : « Pour les joueurs, le football est un moyen de retrouver une vie presque normale, avec des règles, des horaires, un collectif », selon le directeur du comité d'organisation de cette Coupe du monde en France, Benoît Danneau. « La Croix » (lundi 22 août) rappelle aussi que « 70 % des participants aux huit premières éditions avaient radicalement changé de vie après cette expérience ».
D'autre part, comme le souligne le fondateur de cette compétition, l'Ecossais Mel Young, éditeur de journaux de rue, « le football est un outil très efficace pour changer le regard sur les gens de la rue », ce qui peut permettre une meilleure intégration des défavorisés dans notre société aujourd'hui plus marquée par les apparences que par les seules réalités. « Quand les gens voient la dignité et l'énergie que ces exclus mettent à défendre leur drapeau sur le terrain, ils sont touchés. »
Restent aux grands médias à y consacrer un peu de leur temps et aux entreprises en quête de notoriété et soucieuses d'aider les défavorisés à y investir quelques fonds utiles pour l'intégration sociale de ceux-ci : à l'heure où les grandes équipes dépensent des dizaines de millions d'euros pour « acheter » quelques joueurs déjà millionnaires, cette Coupe du monde des sans-abri remet un peu d'humanité et d'humilité dans un sport qui donne parfois l'impression de ne plus être qu'un spectacle sans grande âme...
10:46 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : football, balle-au-pied, solidarité, sans-abri.
17/08/2011
Maîtriser le temps pour mieux affronter la crise...
A l'heure où la chancelière allemande et le président français annonçaient leurs projets pour défendre l'euro monnaie unique, se déroulait une émission de « Cdansl'air » fort instructive sur le rôle possible de l'Allemagne dans le règlement de la crise actuelle et les réticences des Allemands à s'engager plus avant dans le sauvetage de l'euro.
L'une des questions SMS posées en fin d'émission évoquait la possible nécessité pour la France de revenir au septennat pour renouer un tant soit peu avec le long terme aujourd'hui redevenu un élément important de la gestion et de la résolution des crises et de la mise en oeuvre des politiques économiques et sociales des pays de la zone euro.
Que la question ait été posée est un élément intéressant, révélateur d'un changement progressif d'état d'esprit, même si cela reste encore timide : le long terme était, il y a peu, négligé dans la réflexion politique parce que l'époque était à l'immédiateté et au zapping, à cette sorte d'impatience permanente qui correspond tant à la société de consommation « pressée et pressante » : mais les événements récents démontrent à l'envi que le court terme est souvent plus propice à l'affolement, à cette maudite panique qui s'avère mauvaise conseillère en économie comme en politique.
Renouer avec le long terme, c'est refuser de céder à la panique, c'est prendre le temps des grandes décisions, c'est distinguer la vitesse de la précipitation. C'est aussi accepter de ne pas tout avoir tout de suite : ce n'est pas un renoncement, c'est une forme d'humilité mais aussi de reconnaissance du simple fait que, comme pour la nature, « on ne commande au temps qu'en lui obéissant », ce que François Mitterrand avait jadis résumé par la formule « laisser du temps au temps ».
Alors, le septennat plutôt que le quinquennat ? Le philosophe Michel Serres, quand il évoquait il y a quelques années la nécessité de politiques de long terme, affirmait qu'il fallait voir au-delà même du quart de siècle : cela nécessite une traduction institutionnelle, et cela ne peut être, dans la tradition politique française, que la Monarchie royale qui, par son principe de permanence dynastique (« le roi est mort, vive le roi »), accompagne le temps pour mieux le maîtriser, et permet de « voir loin »...
Le quinquennat actuel de la magistrature suprême de l'Etat, qui devait permettre une respiration plus rapide de la démocratie, a montré ses limites, particulièrement en temps de crise, parce qu'il a « raccourci le souffle » de l'Etat : cela n'est pas irrémédiable si l'on ne limite pas sa réflexion à la seule République, désormais trop essoufflée pour tenir la distance...
13:33 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : crise, zone euro, temps, durée, dettes, septennat, monarchie.