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12/02/2008

Etat et industrie : l'exemple d'Alstom.

Dans une actualité plutôt morose, il est des bonnes nouvelles qui passent presque inaperçues, et c’est dommage car elles méritent tout autant l’attention que les autres. Ainsi, la présentation du nouveau train rapide d’Alstom, l’automotrice à grande vitesse (AGV), qui prouve qu’une entreprise moribonde il y a quelques années peut rebondir avec de la volonté et de l’astuce : en parodiant Maurras, j’oserai dire que « le désespoir en industrie est une sottise absolue ».

 

Dans un article fort intéressant publié dans « La Croix », mercredi 6 février 2008, quelques explications sont avancées à ce renouveau dont le politique n’est pas absente et que M. Sarkozy, ministre de l’économie et des finances lorsque l’entreprise apparaissait condamnée, a rappelé : « Venu assister à la présentation de ce « TGV de quatrième génération », Nicolas Sarkozy en a profité pour prononcer un discours offensif en faveur de l’industrie. Improvisant à de multiples reprises, il a placé un certain nombre de banderilles à l’égard de la spéculation financière, de l’Europe, et de la concurrence, qu’il ne veut pas voir s’opposer à l’industrie. « Si une politique de concurrence efficace est un stimulant, et le monopole un danger, a-t-il martelé, une politique de concurrence efficace doit regarder à moyen terme ce que doit être le paysage d’une industrie. »

 

Il a pris un malin plaisir à souligner qu’en 2003-2004, Alstom était moribond, mais que Bruxelles lui demandait alors que l’Etat n’intervienne pas. Et d’indiquer que sa volonté politique comme ministre de l’économie, à l’époque, et celle de Patrick Kron [le PDG d’Alstom] ont permis alors son sauvetage, avec l’entrée à hauteur de 22 % dans le capital de l’entreprise. Après sa visite à Gandrange (Moselle), lundi, le président de la République a encore indiqué que l’Etat doit « sauver des emplois », qu’il doit contribuer à aider les sites industriels en difficulté avant de se préoccuper de trouver des plans sociaux qui ont la particularité, a-t-il encore précisé, de générer des « dépressions chez les salariés, et dans les régions où sont installées ces entreprises que l’on ferme ». Alors qu’il devait recevoir Michel Rollier, un des cogérants de Michelin, hier en fin d’après-midi, à l’Elysée, il a expliqué, à propos du site de Toul (Moselle), que le constructeur veut fermer, que « l’Etat doit investir pour la revitalisation des territoires ainsi sinistrés ». »

 

Ces déclarations présidentielles, au-delà de ce que l’on éprouver à l’égard du président actuel, ne peuvent être ignorées et me semblent aller dans le bon sens, dans celui d’une politique industrielle « néo-colbertiste » que j’appelle de mes vœux, d’une politique qui ne laisse pas le seul Marché maître de l’économie et des finances, et qui réintroduit l’Etat dans le jeu, comme un arbitre actif et, parfois, acteur pour éviter de n’être que soigneur du social… Un Etat qui se souvient qu’il a un rôle à jouer et qu’il ne peut être simplement un spectateur des luttes entre groupes financiers ; un Etat qui préserve ce qui doit l’être pour assurer la cohésion et la justice sociales ; un Etat politique, en somme, qui n’est pas « providence » mais initiateur, promoteur, ambitieux ; un Etat qui refuse l’étatisme mais assume ses devoirs sociaux.

 

Reste à voir ce que deviendront ces déclarations présidentielles lorsque viendront les tempêtes qui s’approchent et lorsque les instances de l’Union européenne ou celles de l’Organisation Mondiale du Commerce feront valoir les « règles de la libre concurrence »… Sans doute faudra-t-il alors batailler ferme, et pas seulement au niveau gouvernemental, pour imposer aux oligarchies mondiales le respect des règles du Bien commun qui ne se limite pas, d’ailleurs, à notre seul pays…

 

11/02/2008

De Buren aux Tuileries...

L’artiste Buren se plaignait il y a quelques semaines du mauvais état des colonnes qui portent son nom et menaçait de les détruire au cas elles ne seraient pas restaurées par l’Etat, arguant d’une sorte d’ « urgence artistique » qui, en définitive, coûtera aux contribuables français 14 millions d’euros, alors que de nombreux chantiers de restauration et de protection de notre patrimoine, monumental ou artistique, religieux ou profane, sont en souffrance faute de crédits suffisants…

 

Au risque de choquer, je ne suis pas favorable à ce que la France devienne un musée ou une simple exposition d’art à ciel ouvert, et le sort des colonnes de Buren ne m’émeut guère : après tout, pourquoi ne pas considérer qu’elles auraient pu être démontées et vendues à tel ou tel riche magnat féru d’art contemporain, ou qu’elles auraient peut-être gagnées, tout compte fait, à se patiner avec les années, à subir les outrages du temps pour devenir de nouvelles ruines romantiques au cœur de Paris ? Tout comme je ne suis pas favorable à ce projet que la revue monarchiste « Politique Magazine » a défendu il y a quelques années, la reconstruction à l’identique des Tuileries. Je trouve cela assez ridicule de vouloir reconstruire ce qui n’est plus et n’a plus de raison d’être, ce qui apparaîtrait comme un décor artificiel à la Disney, sans âme et sans mémoire vive, en somme reconstruction irréelle et déracinée de son histoire. Si l’on veut refaire quelque chose à la place des Tuileries, dans ce cas, que l’on fasse du « neuf », et un grand projet architectural pourrait voir le jour, qui devrait concilier les formes et les matériaux contemporains pour montrer le dynamisme créateur de la France, sa capacité à « construire encore » : nous ne manquons pas d’architectes dans notre pays.

 

Bien sûr, il faudrait veiller à éviter des projets qui ne seraient que l’expression d’un art trop commercial ou tape-à-l’œil, et qui enlaidirait la capitale. Mais, après tout, pourquoi ne pas risquer ce projet de « nouvelles Tuileries », qui n’aurait rien à voir avec une reconstruction nostalgique que je n’accepte pas, comme dit précédemment ?

 

Il y a aussi un grand chantier qu’il faudrait enfin lancer à Paris, après tant de tergiversations, celui de la Grande Gare de République, dans les cartons depuis déjà plusieurs années : là aussi, il y a moyen de concilier utilité et art, et de faire de cette gare ferroviaire un nouveau monument vivant de la France que nous envieraient les nations du monde entier…

 

Encore nous faudrait-il un Etat capable de lancer et promouvoir ces grands projets, et non une caricature, ce « semble-Etat », selon l’heureuse expression du philosophe royaliste Pierre Boutang, qui nous gouverne ou, plutôt, nous administre aujourd’hui. Vivement un nouveau régime, cette Nouvelle Monarchie capable d’audace et de fonder l’avenir, de s’élancer vers celui-ci sans rechigner, de bâtir pour les générations futures…

 

10/02/2008

Travailler plus, dans l'enseignement.

« Travailler plus pour gagner plus » semble être un beau slogan, alléchant dans son principe mais ce n’est, en définitive, qu’un effet d’annonce et un leurre, en particulier en ce qui concerne l’enseignement. D’ailleurs, « les caisses sont vides », ne cesse-t-on de nous dire pour expliquer la suppression de nombreux postes d’enseignants, y compris dans le lycée où j’exerce ce qui reste, pour moi, le plus beau métier du monde.

 

Même des projets importants préparés par des collègues volontaires sont parfois abandonnés, faute d’autorisation mais surtout de crédits, y compris celui d’une « classe européenne » à l’heure où l’on nous serine sur tous les tons l’importance des langues et « l’ouverture » sur les autres pays du continent… Le Ministère n’est pas à une contradiction près. Quant aux classes qui comptaient, pour certaines d’entre elles, un nombre moins lourd d’élèves à des heures spécifiques (et n’est-ce pas ce qui permet un meilleur apprentissage des langues, en permettant aux élèves de parler plus fréquemment durant l’heure de cours ?), les voilà toutes remplies au maximum, à cause de la suppression de nombreuses heures allouées au lycée dans la fameuse « dotation globale horaire » de cette année.

 

Personnellement, je ne suis pas hostile au fait de « travailler plus » et, par exemple, de faire du « soutien scolaire » à quelques élèves en difficulté ou des « cours libres » sur l’histoire des institutions, de préparer des entraînements aux concours, etc. Encore faudrait-il que cela soit dans des conditions favorables et que l’on permette, d’abord, de le faire, tout simplement : il y a de multiples projets qui pourraient voir le jour dans les lycées de France s’il y avait moins de contraintes administratives et plus de soutien (ne serait-ce que moral…) de la part des rectorats et des inspections académiques… Or, visiblement, nous ne sommes pas dans cet état d’esprit-là, à mon grand regret.

 

Puisque c’est l’argent qui semble poser problème, pourquoi ne pas permettre aux établissements scolaires, en plus des crédits normalement alloués par l’Etat, de lever des fonds en faisant appel aux initiatives privées mais aussi communales, par exemple ? Le plurifinancement des lycées et des collèges, mais aussi des universités, me paraît le meilleur moyen (financier) de maintenir une qualité satisfaisante des enseignements dispensés. Je ne verrai rien de choquant à ce qu’une entreprise de BTP participe au paiement d’heures de soutien scolaire ou qu’un office de tourisme subventionne une activité de « découverte du patrimoine » (et des cours d’histoire-géographie, ce qui est assez logique), en plus, bien sûr, des cours obligatoires toujours payés par l’Etat ou les Pouvoirs publics.

 

Ce qui est certain, c’est qu’il faut, par contre, refuser une simple logique comptable ou « de rentabilité » qui oublierait les rôles traditionnels de transmission des savoirs et connaissances et d’épanouissement des intelligences en sacrifiant la qualité à la quantité…