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11/06/2008

Bulletins scolaires détournés de leur fonction.

Dans la Drôme, des professeurs se sont servis des bulletins trimestriels pour mettre, en guise d’appréciation, des remarques purement et simplement politiques contre la réforme Darcos, comme « Nous ne sommes pas responsables des conséquences que les réformes mises en place auront sur l’avenir de vos enfants ». Cette action a évidemment provoqué la colère des administrations rectorales et de la fédération de parents d’élèves PEEP, ce qui me semble logique et justifié.

 

Bien sûr, la situation est rentrée dans l’ordre quelques jours après, mais parce que le rectorat a menacé de conseils de discipline les enseignants usant d’un tel procédé…

 

Personnellement, en tant que professeur, je trouve cette action malhabile, voire déplacée, car elle se sert des lycéens comme des supports (malgré eux…) du mécontentement enseignant, au risque d’oublier que les bulletins scolaires ne sont pas totalement anodins pour la suite des études des élèves. D’autre part, cette action décrédibilise les enseignants en les montrant sous un jour assez détestable au lieu de chercher à faire comprendre leur malaise, bien réel, face aux changements en cours et aux projets dont la commission Pochard a évoqué les principaux thèmes et propositions.

 

Si la République sarkozienne, qui reste la République contrairement à ce que certains tentent de faire accroire, a des velléités de transformer la nature de l’enseignement et d’abaisser la culture générale au niveau le plus bas, celui de la seule « efficacité » économique ou de la seule nécessité consumériste, elle ne doit pas être combattue par une autre forme de bêtise, mais par une action réfléchie qui montre tout l’intérêt d’un enseignement qui élève au lieu d’abaisser au « plus petit commun dénominateur » scolaire. Ce combat pour l’intelligence et pour la curiosité (sans laquelle aucun savoir ne saurait exister, comme l’affirmait Maurras) ne doit pas être négligé et doit user de moyens appropriés, comme un travail d’influence près des acteurs sociaux et politiques, ou comme des actions permettant de montrer toute l’importance des professeurs et de leur savoir-faire dans la formation des élites et des générations actuelles et prochaines.

 

Certains critiqueront mes propos en y voyant une attaque facile et une absence de propositions concrètes… Erreur ! Je suis le premier à participer à des actions d’influence, mais parfois la discrétion est de mise, d’une part, et, d’autre part, le mieux pour se faire entendre n’est pas de contester tout le temps mais de travailler sérieusement, d’en faire « plus » que ce qui est demandé (et payé…), et d’acquérir un droit à la parole (une véritable légitimité à parler) près des administrations et des acteurs du champ public par sa bonne volonté pour lancer des projets éducatifs, pour peser sur les décisions : quand la seule opposition à tout changement apparaît de plus en plus comme un refus de « bouger les choses », c’est en prenant des initiatives pour améliorer, par le fait, les résultats scolaires (cours supplémentaires sur tel ou tel thème ; soutiens scolaires ; projets d’intégration scolaire ; etc. : liste non limitative et ouverte à l’imagination et à la bonne volonté…), pour mettre un peu d’huile dans les rouages d’une Education nationale aujourd’hui victime de sa « réputation » et de son « bilan » (mais aussi de l’attitude de certains collègues qui oublient de « servir » avant de revendiquer), pour redorer son blason près d’une Opinion de plus en plus critique à l’égard d’un système éducatif considéré comme « bloqué » (ce qu’il est !) et « inefficace » (ce qui n’est pas vraiment exact…), que l’on pourra sauver ce qui doit l’être et permettre ce qui est nécessaire.

 

L’éducation des jeunes générations est un enjeu important pour le système républicain, pour cette société démocratique et « distractionnaire » (selon l’expression terrible de Philippe Muray) qui, à l’image de l’actuel président-gouverneur, n’aime pas « la princesse de Clèves » et préfèrerait faire de simples consommateurs que des « hommes libres » que, d’ailleurs, il n’appartient à aucun Etat de faire comme le rappelait opportunément Bernanos… Le vrai combat pour l’intelligence se gagnera par « l’intelligence politique d’abord », et non par des actions inconsidérées et vaines qui discréditent les profs et rendent plus difficilement acceptables leurs inquiétudes…

 

09/06/2008

Un livre sur Philippe Ariès.

Philippe Ariès a été un royaliste fidèle jusqu’au bout, tout en devenant une référence obligée de ceux qui s’intéressaient à l’histoire de la famille et à celle de l’homme devant la mort. Un ouvrage universitaire vient de sortir sur cet historien original, ouvrage que je me suis empressé d’acheter et, entre deux paquets de copies, de lire. Voici quelques extraits de ce qu’en dit l’hebdomadaire Valeurs actuelles, (16 mai 2008), sous la plume de Pol Vandromme :

« Philippe Ariès, un traditionaliste non-conformiste, de Guillaume Gros.

Un universitaire, Guillaume Gros, consacre un essai biographique magistral à Philippe Ariès, qui se désigna lui-même, avec une modestie malicieuse, « historien du dimanche ». Ce qui voulait dire : un amateur qui, par une recherche solitaire et personnelle, avait édifié son œuvre hors de l’Université ; un franc-tireur, en somme, et déjà, par cette démarche originale, un non-conformiste. Ariès (1914-1984), né dans une famille monarchiste, et fidèle au patrimoine que lui léguèrent les maîtres qui le formèrent, se référa d’abord à la conception bainvillienne de l’Histoire. Sans rompre avec elle et, en même temps, sans ignorer les apports de la nouvelle histoire sensible à l’évolution de la société françaises et aux préoccupations contemporaines des Français, il s’efforça, en conciliateur, d’établir une sorte de synthèse entre la tradition et la modernité. Issu de l’école d’Action française, se réclamant du « Politique d’abord », il se rapprocha de l’école des Annales, attentive à « l’histoire essentielle », aux mentalités qui la nourrissent. Son livre charnière, le Temps de l’histoire, annonçait ses deux ouvrages majeurs, l’Enfant et la Vie familiale sous l’Ancien Régime et l’Homme devant la mort, qui le firent reconnaître, en le plaçant au premier rang, par les plus illustres de ses pairs, de Duby à Le Goff. (…). Mieux que personne aujourd’hui, Ariès apporta la preuve que « la vraie tradition est critique », qu’il importait de la renouveler en la débarrassant des routines, des catéchismes et des litanies bêtes qui la sclérosent. Il fut un rénovateur pour maintenir vivante la part sacré du passé. »

Ariès fut aussi un fidèle compagnon de Pierre Boutang avec qui il participa jusqu’au bout à l’aventure intellectuelle et journalistique de « La Nation française », hebdomadaire monarchiste post-maurrassien. Il est en tout cas l’exemple même du royaliste qui ne se laisse pas enfermer dans le passé mais cherche à comprendre et agir, sans préjugé ni blocage idéologique, tout en gardant sa fidélité, jusqu'à son lit de mort, en 1984, à la famille royale du comte de Paris dont il demandait encore des nouvelles à la veille de son décès.

06/06/2008

La France à la présidence de l'UE dans un mois.

La France va bientôt présider l’Union européenne pour six mois, et cela peut être l’occasion pour notre pays de retrouver du crédit près de nos partenaires et, plus largement, sur la scène internationale : encore faut-il que cette présidence ne soit pas gâchée par l’absence de vision à long terme qui semble actuellement être l’apanage de la diplomatie française, ou par les vaines rodomontades d’un président plus obnubilé par son image que par le service de l’Etat.

 

Et pourtant ! Notre pays a encore tant à dire, et tant à faire : il n’en est que plus rageant de le voir ainsi naviguer sans cap certain.

 

Les dossiers sur lesquels la France aurait possibilité d’agir pour faire avancer les projets en Europe sont multiples : l’agriculture et ses adaptations nécessaires aux nouvelles réalités contemporaines, aux défis alimentaires et environnementaux, aux attentes de qualité et de « naturel » des consommateurs, etc. ; l’écologie et la création de « trames bleues et vertes » dans le cadre de l’Union européenne, susceptibles de permettre la reproduction des espèces animales, terrestres ou marines, actuellement menacées ; les transports et les réseaux transnationaux, le ferroutage et les plateformes multimodales, etc.

 

Mais, à moins d’un mois de la présidence française, ce qui frappe l’observateur, c’est l’absence de paroles fortes et de propositions concrètes en ces domaines de la part de la France : comme si notre pays se contentait de quelques discours généraux et n’osait pas aborder les sujets qui fâchent ou ceux sur lesquels il faudrait s’engager durablement. De plus, il est vrai que la Commission européenne ne fait rien pour détendre l’atmosphère et motiver la France, menaçant constamment de condamner notre pays pour son non-respect des critères de Maëstricht sur la question des déficits budgétaires : cela agace et augure mal de la suite des événements, car on imagine l’impact négatif d’une condamnation européenne de la France au moment même où celle-ci assumerait la direction de l’UE… Cela risque de desservir l’Union européenne encore plus sûrement que la France qui, en définitive, ne croit plus vraiment que l’UE soit autre chose qu’une « superstructure » administrative et technocratique, et un vaste marché aux limites de plus en plus imprécises et de moins en moins historiques et politiques.

 

Décidément, à bien y regarder, la République, comme le signalait déjà dans un de ses romans Anatole France, n’a pas vraiment de politique étrangère crédible : malgré « l’intermède gaullien », ce demi-siècle qui a duré jusqu’à M. Chirac (avec des hauts et des bas, certes) et reprenait la tradition géopolitique capétienne, cette critique francienne est malheureusement redevenue d’actualité. En paraphrasant Maurras, on pourrait affirmer, sans crainte d’être contredit : « Tant vaut l’Etat, tant vaut sa diplomatie ». A l’heure où l’Europe a tant besoin de la France, quel dommage que celle-ci soit en République…