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04/10/2010

Pour une colère positive.

Le bouclier fiscal n’en finit pas de soulever des polémiques après l’annonce qu’il a coûté encore plus cher cette année à l’ensemble de la collectivité que l’an dernier (679 millions d’euros en 2010 au lieu de 559 millions en 2009, soit une augmentation de plus de 23 %...), et de renforcer ce sentiment partagé par de nombreux Français que l’actuel Pouvoir est d’abord celui des riches et non celui de « tous les Français » : effet dévastateur encore renforcé par les 220 millions d’euros versés à M. Bernard Tapie, homme d’affaires (au double sens du terme, d’ailleurs…) au passé et aux méthodes non moins troubles que celles de certains margoulins de la IIIe République, réputée pour ses scandales à répétition ! « Décidément », se dit l’homme de la rue qui a du mal à joindre les deux bouts avec son salaire aujourd’hui de plus en plus, à l’image de son pouvoir d’achat, écorné par les hausses d’impôts (car elles existent bien !) et les taxes diverses, voire les augmentations variées de cotisations en tout genre (dont celles sur les retraites pour les fonctionnaires, par exemple), « on ne donne, ne redonne et ne prête qu’aux plus riches » ! Un propos que l’on entend de plus en plus souvent, comme une évidence acquise et « éternellement » confirmée, dans les réunions de famille, les conversations au comptoir ou dans les bureaux autour de la machine à café. Un refrain lancinant qui, d’affaires en affaires, de révélations en scandales, atteint gravement la confiance que nos concitoyens peuvent placer en la politique et ses représentants, et, au-delà, en cette République qui, à trop donner de leçons de morale et en pratiquant une « légalité » qui, elle, n’est pas toujours morale, se décrédibilise aux yeux de tous, et surtout des plus jeunes…

 

Je constate chaque jour ce discrédit dans lequel s’enfonce l’Etat républicain et, en particulier, dans les discussions avec mes collègues et mes anciens élèves au sortir du lycée. Que la République en tant que système institutionnel perde de son crédit ne m’émeut guère, n’étant pas exactement républicaniste, mais je m’inquiète de cette sorte de nihilisme qui s’empare des esprits et des intelligences au risque de ne plus voir l’essentiel. Car ce désarroi des citoyens les rend disponibles pour le fatalisme et l’abandon à n’importe quelle solution, ou « non-solution », pour d’éventuelles haines et violences inappropriées à la situation de notre pays et, de plus, malsaines et maléfiques… La colère en politique ne doit pas mener à la destruction vaine mais s’ordonner, au-delà de l’instant présent, au bien commun et à celui des générations à venir : oublier cette exigence éminemment politique, voire éthique, c’est creuser le tombeau de tout humanisme et préparer les lendemains qui déchantent et les terreurs qui s’apaisent à peine au-dessus des charniers… 

 

« La politique du pire est la pire des politiques » disait avec raison Maurras qui n’a pas toujours été aussi prudent que sa propre formule aurait pu l’y inciter… Détruire un système, fût-il républicain, pour le seul plaisir de détruire n’a guère de sens et pourrait bien entraîner « le pire » qu’il ne faut jamais souhaiter, ne serait-ce que par égard pour nos contemporains et l’avenir de notre pays et de ses enfants. « Détruire pour rebâtir », voilà une autre perspective qui me convient mieux : il ne s’agit d’ailleurs pas, dans le cas présent, de tout défaire de ce que la Cinquième République, restauratrice d’un certain sens de l’Etat et de son service, a pu elle-même fonder ou, plus exactement, refonder, en particulier dans une certaine pratique capétienne. Mais il s’agit d’en finir avec cette confusion du Pouvoir avec des féodalités qui imposent leurs vues, en finir avec cette collusion entre les puissances d’argent et une République devenue « bling-bling », en finir avec ce mépris des administrateurs français gérants de la mondialisation néolibérale pour les peuples de France, leurs traditions et leurs manières d’être, diverses et pas toujours quantitatives, au monde !

 

La colère, si elle veut être utile et juste, doit permettre la refondation du Politique sur de nouvelles bases ou, plus encore, sur des bases qui ne doivent rien aux jeux d’argent et de clientèles : le débat et la confrontation politiques ne sont pas affaires de simple concurrence ou d’échanges de coups, mais bien plutôt de propositions et de discussions, au-delà des préjugés et des facilités de langage, pour permettre l’équilibre social et la défense de la dignité de tous au sein de la société, pour préserver les conditions de « l’avenir que tout esprit bien né souhaite pour son pays » et garantir les « droits du présent sans méconnaître ceux de l’histoire et des enfants qui viendront ».

 

Il est des révoltes nécessaires… Les nouvelles chouanneries qui s’annoncent seront aussi politiques, éminemment royales comme celles des années 1792-1800, si elles veulent être « positives » et fondatrices ! Pour que la colère vise juste…

07/08/2010

La République sarkozienne, fin de la Cinquième République ?

L’été est propice aux augmentations de tarifs diverses et variées et en particulier ce moment où les Français préfèrent les joies de l’apéro convivial et des grillades entre amis aux journaux télévisés et aux débats politiques… Cette année, nous sommes gâtés ! Après les traditionnelles hausses de tarifs du métro parisien et celles, annoncées, des chemins de fer, après celles du gaz un peu avant la période estivale, voici celles des prix de l’électricité : en moyenne, 3,4 % (3 % pour les particuliers, un peu plus pour les professionnels), augmentations qui prennent effet au 15 août.

 

Pendant ce temps-là, on apprend que Madame Bettencourt a, en l’espace de trois ans, reçu environ 100 millions d’euros du fisc au titre du bouclier fiscal, et qu’elle ne paierait en impôts que 9 % de ses revenus, bien moins qu’un contribuable moyen et beaucoup moins fortuné qu’elle… Autre nouvelle « agaçante » : « 14 contribuables français disposant d’un patrimoine supérieur à 16,20 millions d’euros ont déclaré, pour l’année 2008, des revenus inférieurs à 3 430 euros ! Conséquence : tous ont payé un impôt dérisoire et… chacun a en outre encaissé un chèque du Trésor d’environ 160 000 euros. » (Le Point, 17 juin 2010). La formule veut qu’on ne prête qu’aux riches mais, là tout de même, il n’est pas exagéré de parler d’abus de la part de ces personnes qui, visiblement, n’en ont jamais assez et qui ne semblent pas vraiment concernées par les efforts demandés à tous les Français pour surmonter la crise économique !

 

Ce sont tous ces éléments qui créent, au-delà même des affaires Woerth-Bettencourt, Woerth-César, Woerth-etc., une ambiance délétère et un sentiment que l’on ressent lourdement dans les discussions vacancières (ou non, car de nombreux Français travaillent aussi en août), un sentiment de malaise diffus, de plus en plus sombre, explosif, et qui ne croit plus en la parole gouvernementale et, au-delà, politique tandis qu’elle légitime, a contrario, les propos plus vifs à l’égard des « riches » ou des « privilégiés », les jalousies sociales et les colères de comptoir ou d’apéro qui en annoncent peut-être de moins « récréatives »…

 

La République sarkozienne marque peut-être la fin de la Vème République (ou, en tout cas, de son esprit) qui avait, en ses origines, voulu être une synthèse plus ou moins réussie des traditions monarchique et républicaine, et qui avait rendu à l’Etat en son faîte une dignité et une autorité que la IIIème et la IVème avaient largement perdues… La République actuelle marque l’aboutissement de la reconquête par l’Oligarchie du Pouvoir d’Etat, et cela est fort malheureux. Mais sans doute n’est-ce que la confirmation que la République penche naturellement vers les Puissances d’Argent, quoi que l’on fasse pour éviter ce penchant fatal : De Gaulle et quelques autres ont pu, un temps, croire inverser le processus mais, peu à peu, celui-ci a été plus fort, et tous les efforts des aspirants à la magistrature suprême pour conquérir cette première place ont renforcé cette tendance à la fois oligarchique et ploutocratique.

 

Aujourd’hui, si les hausses de tarifs diverses et variées touchent « tout le monde », il n’est pas certain, néanmoins, que l’équité sociale, elle, soit bien assurée en cette République qui ne connaît plus les garde-fous de la décence et de la mesure en politique…

 

 

 

01/08/2010

Starisation et règne de l'Argent en République.

Georges Balandier est un auteur trop souvent méconnu des médias et des royalistes eux-mêmes alors que ses réflexions rejoignent les préoccupations des monarchistes français, ce que j’avais déjà évoqué dans un article de… 1994 ! Son livre « Le dédale » a été pour moi une véritable révélation et je l’ai souvent cité alors dans mes discours : après tout, pourquoi bouder un sociologue qui se pose les questions auxquelles les royalistes cherchent eux-mêmes à répondre ?

 

Justement, dans son récent livre d’entretiens déjà cité sur ce blogue, Balandier souligne l’un des traits de la présente République, celle de la « starisation » du pouvoir présidentiel et du paysage politique ou, plus exactement, électoral : « Quelque chose apparaît, dans le fonctionnement actuel du politique, qui tient aux instruments aidant à l’action et contribuant à une connivence complaisante des acteurs. Cela conduit à une façon d’acceptation du vedettariat. (…) On est en train de produire et de multiplier les petites dramaturgies, les petites fictions imagées, qui recherchent un accord de l’opinion sur tel ou tel point. C’est de la connivence ainsi provoquée et construite que résulte la capacité de gouverner et de se maintenir, en contenant par la suite des dramatisations, le dissentiment. » Le monde des médias participe donc à cette starisation, cette « société du spectacle » qui se joue aussi sur la scène politique depuis quelques années, de Ségolène Royal, sacrée candidate miraculeuse de la Gauche avant l’élection de 2007, à Nicolas Sarkozy, dont les aventures (et mésaventures) conjugales, à défaut d’enrichir le débat politique, ont occupé les couvertures de la presse, autant celle qualifiée de « people » que celle se présentant comme « sérieuse »… Et la tragicomédie de l’affaire Bettencourt-Woerth, véritable feuilleton estival politico-juridico-financier à multiples rebondissements, semble bien aussi participer de cette spectacularisation, mais aussi de cette volonté, plus affirmée que toujours appliquée, de transparence et de morale, utilisée par les uns comme un bélier contre les autres… Au risque (mais en est-ce vraiment un, pour l’établissement politique ? La question mérite d’être posée) de lasser une opinion publique qui aimerait aussi bien que la presse comme les politiques abordent les vrais débats et acceptent la critique et la discussion !

 

Et ce ne sont pas les informations récentes sur la place prise par la communication présidentielle (et qui trouve sa place dans la stratégie pour 2012), autre élément de la promotion et du maintien du pouvoir en place, qui infirmeront le propos de Georges Balandier, tout comme le poids de plus en plus important du budget du SIG (Service d’information du gouvernement, chargé de diffuser la « bonne parole » gouvernementale et présidentielle…), passé de 6,2 millions d’euros dépensés en 2007 à 27 en 2009, soit 4 fois plus en seulement 2 ans ! Là encore, cela confirme un argument qu’avancent régulièrement les monarchistes, celui que c’est bien l’argent qui fait les élections et particulièrement la présidentielle, parfois plus sûrement que les électeurs, d’ailleurs de plus en plus contestataires (lors des premiers tours principalement) ou abstentionnistes. Une République si dépendante, dans son fonctionnement démocratique même, de l’Argent et des jeux d’influence des féodalités financières, peut-elle alors promouvoir et pratiquer concrètement une véritable équité sociale ? Au regard des dernières affaires en cours, des fonds levés à Londres par le ministre Wauquiez près de spéculateurs pour financer son « parti-écran » aux multiples magouilles du Parti socialiste en Provence, des affaires ( le pluriel n’est-il pas de mise, effectivement ?) Woerth (mari et femme)-Bettencourt (mère et fille) aux puissants du fameux « Premier cercle » des donateurs de l’UMP, je doute fort que la République trouve la force de trancher les liens qui la relient à l’Argent-Suzerain…