27/04/2009
Sauver les petites villes délaissées.
Lors de mes pérégrinations électorales dans l’Ouest la semaine passée, j’ai été frappé, peut-être plus que d’ordinaire, par la déshérence de certaines petites villes, en particulier Mayenne et Quimperlé, quand d’autres, visiblement, s’en tirent beaucoup mieux, avec des centres animés et apparemment florissants, comme Dinan par exemple. Au moment où il n’est question que de rurbanisation et de redéversement urbain sur les campagnes périphériques, de l’arrivée des retraités parisiens en Bretagne, de qualité de vie dans l’Ouest de la France, comment se fait-il que des villes idéalement placées, dans un cadre fort sympathique, non loin de grands axes de circulation, se trouvent en pareille situation inconfortable ?
En écoutant les personnes du crû, quelques réponses sont avancées : la fermeture des usines locales (délocalisées ou disparues devant les concurrences étrangères) ; l’établissement de grandes surfaces (hypermarchés) à la sortie de ces villes ou l’accès rapide aux grandes zones commerciales de la grande ville proche (ce qui entraîne la mort des commerces de proximité des centres-villes) ; la transformation de la petite ou moyenne ville en cité-dortoir de la grande ville voisine, favorisée là encore par la fluidité des transports permise par les grands axes de communication (principalement les quatre-voies) ; la diminution du nombre d’exploitants agricoles ; le départ des jeunes bacheliers vers les villes universitaires ; etc.
Toutes ces raisons existent, de façon plus ou moins combinée selon les cas : elles posent la question de l’aménagement du territoire et, au-delà, du mode de vie de nos sociétés.
Si l’on prend le cas de Quimperlé qui souffre de plusieurs des maux que je viens d’énumérer, il me semble qu’il y aurait moyen de renverser la tendance par une politique volontaire des pouvoirs publics, non pour tout faire mais pour faciliter la réalisation de projets innovants ou simplement locaux pour rendre vie à une ville qui semble se mourir doucement… Quelques exemples : valoriser l’important patrimoine religieux et historique de la ville, et remettre en activité les rues qui montent vers la « haute ville » en soutenant l’installation de nouveaux commerces ou d’activités artisanales, par une fiscalité attractive et un plan de promotion d’ensemble de la ville.
En fait, il s’agirait aussi de créer des emplois sur la ville et ses environs plutôt que de seulement dépendre des emplois créés sur Lorient ou Quimper : là encore, il serait sans doute utile de penser, pour les secteurs dans lesquels cela s’avère possible, d’engager une politique de « télétravail » qui maintienne le plus possible les populations sur place au lieu de leur imposer des déplacements quotidiens vers un bureau lointain… Cette politique commence à faire de plus en plus d’émules en région parisienne : alors, pourquoi pas dans les provinces ? Cela permettrait d’autres rythmes de travail, moins perturbants pour l’équilibre et la vie des familles, et mieux intégrés à la vie locale.
Ce ne sont que quelques pistes de propositions, bien sûr, et il faudrait des dizaines de pages pour développer tous les projets possibles pour rendre à ces petites villes délaissées une véritable vie et non une simple et fragile survie. J’insiste sur deux points : d’abord, ne pas tout attendre des autres et prendre, soi-même, au sein de son cadre local, des initiatives ; d’autre part, et comme je l’ai déjà évoqué plus haut, tout cela ne peut véritablement fonctionner que si les pouvoirs publics et en particulier l’Etat ont conscience des enjeux et soutiennent, ou facilitent (administrativement parlant), ces initiatives. Mais, au-delà, il est vraiment urgent de repenser un aménagement du territoire (ou, plus exactement, « des territoires ») au niveau national, qui est la bonne échelle pour ce genre d’exercice.
J’ai aussi parlé, au début de cette note, du « mode de vie de nos sociétés » tant il est vrai qu’il s’agit sans doute d’opérer une véritable révolution sociétale qui mette en cause l’actuelle société de consommation, individualiste et distractionnaire, non pour revenir à l’âge de pierre mais pour recréer une sociabilité plus conviviale, moins tournée vers le « moi » et plus vers le « nous »… Au-delà du seul combat politique, il s’agit bien là, comme le soulignait Bernanos, d’un « combat pour la civilisation », celle qui place les personnes et le Bien commun avant les seuls intérêts financiers ou égoïstes… Mais, il est vrai que l’on retrouve vite la piste de l’action politique car c’est par ce moyen que l’on peut rendre possible ce qui est nécessaire et qu’un Etat qui s’enracine dans la « longue durée », dans le respect de la simple loi naturelle de la suite vitale des générations, peut permettre ce que la République ne peut même plus promettre, coincée qu’elle est entre deux élections et par les jeux de clientèle, peu propices à penser le long terme… Là encore, « avantage à la monarchie » !
23:57 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : aménagement du territoire, quimperlé, ville, commerce de proximité, artisanat, télétravail.
25/04/2009
La fidélité contre l'idolâtrie.
En réponse à un jeune Rennais avec lequel j’ai eu une longue et intéressante discussion ce matin sur le marché des Lices et qui s’inquiétait des risques de « dérive absolutiste » des royalistes et de la Monarchie :
André Malraux a commis dans les années d’avant-guerre une préface pour un livre du royaliste Charles Maurras puis a poursuivi ensuite une carrière d’écrivain et d’homme politique qui l’a apparemment éloigné de la tradition monarchiste. Cela ne l’a pas empêché de dire ce qui suit et qui apparaît bien comme la reconnaissance de tout l’intérêt qu’une Monarchie incarnée en un Prince peut avoir : « Tout homme actif et pessimiste a été ou sera fasciste sauf s’il a derrière lui une fidélité ». Le dernier morceau de phrase a toute son importance, et montre un bon sens certain et une connaissance non moins certaine de l’Histoire de France !
Pensait-il à Bernanos ou à Maurras en écrivant ceci ? En tout cas, Malraux a raison dans son propos en signalant combien la fidélité (ce que l’on appelle aussi la loyauté ou le loyalisme) envers un souverain qui est, au-delà de lui-même, la continuation de ceux qui l’ont précédé et le trait d’union avec ceux qui suivront, est le meilleur rempart contre l’idolâtrie totalitaire, et, tout simplement, contre l’idolâtrie elle-même.
La Monarchie n’est pas non plus la République « bling-bling », cette République qui entretient un véritable culte de la personnalité du locataire de l’Elysée, ne serait-ce qu’à travers la pipolisation de la vie politique française depuis quelques années…
20:19 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fidélité, monarchie, république, idolâtrie, malraux, maurras, bernanos.
23/04/2009
Le piège de l'abstention.
Je poursuis actuellement ma campagne monarchiste pour les élections européennes en sillonnant les routes de Bretagne : lundi sur la Côte d’émeraude ; mardi dans le Morbihan et le Finistère ; hier mercredi à Dinard et, bien sûr, à Rennes… Mais il faut être franc : les élections européennes, malgré leur proximité (dans un peu plus de six semaines), n’intéressent pas nos concitoyens ni, d’ailleurs, les partis politiques qui font des campagnes « a minima ». Même chose pour la presse qui, dans la plupart des cas, ne consacre que (très) peu de lignes aux débats européens, et encore ! Et ce soir, regardant d’un œil distrait les informations télévisées, là encore, pas un mot sur les européennes !
Pourtant, si l’on regarde le fonctionnement des institutions françaises et européennes, il faut bien constater qu’une grande partie des lois adoptées par le Parlement français n’est que l’adaptation de directives européennes : entre 70 % selon un responsable socialiste entendu l’autre jour à la radio et 80 % selon les affiches des souverainistes aperçues à Rueil-Malmaison… Ainsi, sans forcément s’en rendre compte, notre pays ne s’appartient plus totalement, législativement parlant. Cette « dépossession » est-elle une bonne chose ? J’en doute mais je constate qu’elle ne semble pas effrayer la classe politique de notre pays, bien plutôt tétanisée par l’idée que l’on puisse remettre en cause une construction européenne qui apparaît « dans le sens (unique ?) de l’histoire », mais qui se fait, en fait, au nom de « l’économique d’abord » (au risque d’imposer au politique des critères qui ne sont pas autre chose que « libéraux »)…
Or, la politique ne peut être l’acceptation de ce que certains comprennent comme une fatalité inéluctable : car la politique cela devrait être la décision, celle qui s’applique aux puissances économiques, celle qui arbitre et tranche au-delà des intérêts particuliers et partisans !
Si les élections européennes sont abordées avec tant de discrétion par les grandes forces partisanes politiques, n’est-ce pas parce que « l’Europe légale » à laquelle elles appartiennent (bon gré mal gré) ne tient pas trop à ce que les électeurs des 27 nations de l’Union européenne bouleversent les équilibres politiques du Parlement européen, Parlement aujourd’hui largement acquis aux principes de cette « dépossession » des citoyens au profit d’une « volonté générale » qui s’imposerait à tous, parlements nationaux comme populations des 27 pays ?
Il ne faut pas y voir un complot, mais bien plutôt une simple stratégie profitable aux intérêts d’abord économiques qui dominent par le biais des groupes de pression (qui se livrent à ce que d’aucuns nomment le « lobbying ») les institutions européennes, et principalement le Parlement et la Commission de Bruxelles. Ce n’est que la reprise de la stratégie de la « Constituante » de 1789 dont les premières mesures visèrent à émanciper les élus et leurs exercices parlementaires de ceux qui les avaient désignés pour les états-généraux (toujours au nom de la fameuse « volonté générale » qualifiée alors de « souveraineté nationale »…), et à éloigner les peuples de France de la politique législative active par la limitation du suffrage : si les procédés sont différents aujourd’hui, l’intention reste la même. Et Bruxelles est si loin, l’Europe si complexe, nous dit-on, sourire en coin…
Ainsi, en permettant à l’abstention d’être la plus visible des attitudes électorales, la Démocratie européenne, cette « Europe légale » dont je me méfie fortement, se donne les mains libres pour agir et légiférer au nom de tous, y compris des « absents du suffrage » : or, en Démocratie, peu importe le nombre d’abstentionnistes, ils ne comptent pas, ils ne pèsent aucunement, ils sont invisibles et n’ont plus le droit à l’expression dans les institutions parlementaires. Ils sont le vide que ceux qui se sont exprimés par le suffrage comblent, la Démocratie, comme la nature, ayant horreur du vide et ayant vocation à le nier…
L’abstention est, en fait, un allié de « l’Europe légale ». Mais elle n’est pas la seule, et son contraire n’est pas forcément son ennemie, bien évidemment.
Il n’est pas facile de surmonter ce dilemme, mais il faut trouver (et prendre) les moyens de penser à des institutions qui organisent différemment l’Union européenne, permettant à « l’Europe réelle » de se réaliser sans, pour autant, céder à la démagogie ou à la facilité, ce qui serait la pire des impasses et entraînerait, à terme, la perte même de ce que veulent conserver les Etats et les peuples constitués en nations.
01:26 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : élections européennes, abstention, europe légale, europe réelle, piège, bruxelles.