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16/08/2011

Dette publique : les erreurs de la République...

La question de la dette est devenue ces jours derniers la préoccupation majeure du gouvernement si l'on suit sa communication et ses annonces, en attendant le plan d'austérité dévoilé officiellement le 24 août. En fait, cette question n'est pas récente mais, durant des décennies, elle a été occultée pour des raisons plus démagogiques et politiques que proprement économiques et sociales.

 

Quand Martine Aubry accuse l'actuel président d'être responsable d'un tiers de la dette publique actuelle, elle oublie de préciser que cette fameuse dette de l'Etat est d'abord née dans les années 70, au moment de la crise issue du choc pétrolier de 1973 et sur le simple fait que le budget de l'Etat n'a plus jamais été en équilibre depuis lors, et donc que les gouvernements successifs de la République, depuis la présidence Giscard d'Estaing, n'ont cessé de creuser le « trou », avec une grande constance...

 

La République a été proprement irresponsable, au travers de ses politiciens et par son principe même, puisqu'elle ne vit qu'au rythme des élections et des « promesses obligatoires », de cette politique clientéliste qui, par exemple, a permis la naissance de la plupart de ces fameuses niches fiscales aujourd'hui menacées mais qui, durant tant d'années, ont privé l'Etat de nombreuses ressources financières. Cela étant, il serait peu crédible d'accuser ces niches de tous les maux car certaines sont tout à fait utiles et leur poids réel reste minime au regard de la dette globale.

 

La politique clientéliste se marque beaucoup plus par l'accroissement démesuré du nombre des fonctionnaires dans les premières années de la présidence Mitterrand (330.000 entre 1981 et 1986) ou par la mise en place des « 35 heures » due à Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry, sans que soit saisie pour autant l'occasion d'une véritable politique d'ensemble crédible d'aménagement du territoire et de redéploiement des emplois utiles correspondant à ce grand chantier en définitive négligé, par paresse ou par esprit routinier... Mais, par la création de ce grand nombre de postes de fonctionnaires, il s'agissait de complaire à quelques intérêts syndicalistes ou politiciens locaux et, en tout cas, électoraux, à défaut de rendre plus efficaces les structures et les postes déjà existants : quel gâchis ! Idem pour les « 35 heures » et autres mesures, subventions en tout genre : la République s'est faite Etat-nounou, avec un endettement spectaculaire à la clé et instillant dans la population un état d'esprit peu favorable à l'initiative, à l'effort ou encore à l'imagination, toutes choses pourtant nécessaires pour maintenir un pays en bonne santé économique et sociale !

 

Il serait fastidieux de faire la liste des « petits arrangements » que la République, à travers ses présidences et gouvernements successifs, a pratiqué au risque d'aboutir à ce grand dérangement que l'on voit aujourd'hui et cette dépendance, là encore liée à la politique même de la République, à l'égard de marchés de plus en plus exigeants et de plus en plus lointains, démocratiquement parlant.

 

L'irresponsabilité pratiquée par la République est sa grande... responsabilité ! Responsabilité devant les citoyens, certes, mais aussi devant l'histoire et devant les générations à venir qui, si l'on ne fait rien, seront à vie débitrices des marchés et des puissances du moment... Ce destin dramatique peut encore être évité : encore faut-il une volonté politique forte et, surtout, durable ! Une République qui s'abandonne régulièrement à quelques politiciens de rencontre et qui se plie aux désirs des jeux boursiers peut-elle sauver notre pays ? Cela semble peu probable parce que c'est peu crédible...

 

Une nation, c'est une « famille de familles », avec des devoirs et des responsabilités « familiales » : le meilleur moyen de rendre à l'Etat l'esprit de responsabilité et de service, c'est encore et toujours de mettre à la magistrature suprême de l'Etat, non un simple homme, fût-il « le meilleur » ou « providentiel », mais une famille à travers son « chef » du moment, son « représentant » comme on le dit aujourd'hui, et qui pensera la politique au-delà de sa propre vie humaine, n'étant que le maillon d'une longue chaîne de transmission familiale. « Le roi est mort, vive le roi » est cette formule qui garantit que le souverain ne pense pas qu'à lui mais aussi à ceux qui suivront et qu'il a tout intérêt à faire pour le mieux s'il ne veut pas « ruiner l'avenir » qui est aussi l'avenir de sa propre progéniture et de sa famille...

 

Oui, il faut le rappeler incessamment : alors que la République déresponsabilise ceux qui s'en veulent les maîtres au détriment souvent des citoyens et de leur « long avenir », la Monarchie, elle, n'a pas le choix : si elle oublie que son « aujourd'hui » n'est qu'un moment de son enracinement perpétuel et qu'elle néglige le « lendemain », elle a de fortes chances d'être déracinée... Cette conscience forte du temps qui est au fondement de la Monarchie est le meilleur moyen de préserver et de préparer l'avenir et d'en amortir, autant que faire se peut, les chocs.

 

De plus, une Monarchie politique active telle qu'elle se doit d'être dans notre pays, au regard de son histoire et de sa conscience politique propre, peut rendre au Politique une légitimité nécessaire pour limiter les excès de l'Economique et d'une « Fortune anonyme et vagabonde » qui voudrait imposer ses règles abusives aux Etats et aux peuples : « la politique de la France ne se fait pas à la Corbeille » est une formule gaullienne qui résume bien ce que doivent être et ce que sont la pensée et la pratique de la Monarchie face aux Marchés !

 

 

 

 

15/08/2011

Economistes...

Dans les débats actuels sur la crise de la zone euro, il me paraît fort étrange que les économistes invités par les rédactions des radios et télés soient toujours les mêmes, formant un petit aréopage d'à peine une dizaine de personnes, et qui partent pratiquement tous des mêmes présupposés et participent presque tous de la même pensée, non pas unique en tant que telle, mais plutôt dominante... Du coup, la voix des économistes hétérodoxes n'est guère audible, éloignés qu'ils sont des micros officiels, à de rares exceptions près.

 

Ainsi, je regrette de ne pas entendre la voix de Jacques Nikonoff qui vient pourtant de publier un gros livre fort documenté de plus de 450 pages intitulé d'un provocateur « Sortons de l'euro ! » et sous-titré « Restituer la souveraineté monétaire au peuple ». On peut ne pas être d'accord avec le titre ou les idées et propositions émises par l'économiste, mais il serait bon, au moins et pour la dignité du débat public, de pouvoir entendre exposer et développer les arguments hostiles (ou seulement peu favorables) à la monnaie unique. Tout comme on aimerait entendre Jacques Sapir, dont le livre sur « la démondialisation » n'est pas insignifiant, loin de là, pour comprendre les processus actuels et leurs conséquences autant que leurs perspectives. Idem pour Paul Jorion ou Frédéric Lordon, et nombre d'autres...

 

La presse écrite, quant à elle, est souvent plus ouverte que les médias audiovisuels, comme le démontre le dernier numéro de « Marianne » paru le 13 août et qui ouvre ses colonnes à quelques voix discordantes dans le concert des économistes, ce qui permet d'avoir une vision moins manichéenne des événements actuels et des enjeux, mais aussi de rompre, parfois, avec « l'économiquement correct ». Mais les télés, qui restent le vecteur principal de l'information pour le plus grand nombre, sont imperméables à ces voix « différentes »...

 

Cette situation déséquilibrée, malgré des apparences de pluralisme que revendique les grands médias à défaut de l'appliquer réellement, rappelle quelques mauvaises habitudes et attitudes des gardiens de « l'économie officielle » qui, durant plus de vingt ans, ont marginalisé le seul Prix Nobel d'économie français, Maurice Allais parce que celui-ci ne se contentait pas des dogmes dominants mais évoquait quelques idées peu compatibles avec le libre-échange sans frein triomphant depuis les années 90... Sans doute est-il encore temps de le relire ! Mais, au-delà, d'en tirer quelques leçons pour la suite : la crise reste devant nous, et il importe de ne pas s'abandonner au fatalisme, même en économie...

 

 

 

11/08/2011

La crise n'est pas finie...

La nouvelle crise financière qui est en train de dérouler ses effets sur les pays occidentaux en plein mois d'août n’est pas exactement une surprise, et feindre l’étonnement devant les récents événements et l’effondrement d’une part du système financier états-unien et européen serait faire preuve de cynisme ou de naïveté de la part des analystes et des hommes d'affaires qui ont tant participé à ce « système de crise », voire à ce que l'on pourrait nommer de façon plus simple « le Système », fait de globalisation, technophilie et société de consommation.

 

De multiples avertissements, ces dernières années mais aussi bien avant 2007 et la crise des « subprimes », ont été lancés dans une indifférence presque totale, et je n’ai pas été le dernier à évoquer la possibilité d’une crise qui ne soit pas que conjoncturelle mais aussi structurelle, même si je ne savais pas quelles formes exactes elle allait prendre, ni quand elle allait survenir en tant que telle : désormais, il est possible de prendre 2007 ou/et 2008 comme point de départ.

 

A force de jouer les éternels Cassandre, rôle ingrat et nécessaire mais qui ne ferme pas forcément la porte à l’espérance, une certaine fatigue teintée d’amertume peut parfois m’envahir : le danger serait de se réfugier dans une sorte de retraite méprisante et désabusée, impolitique et donc totalement négative. Or, faire de la politique, c’est refuser le fatalisme et chercher les voies institutionnelles d’une « sortie de crise », qu’elle qu’en soit le domaine.

 

Dans le cas spécifique et au regard de son histoire et de sa culture politique, il me semble indéniable que l’Etat a un rôle à jouer dans l’économie, non pour la diriger mais pour lui éviter de défaire ce qui doit être préservé, que cela soit l’environnement ou de justes rapports dans la société : le comte de Paris disait jadis que « la mission du Pouvoir est de rendre les gens heureux » et, au-delà d’une formulation qu’il faut, à mon avis, préciser, cela fait sens. J’avoue que, pendant longtemps, une stricte lecture maurrassienne me faisait rechigner à user du terme « bonheur » considéré comme trop moral ou trop vague pour être vraiment autre chose qu’une nuée, une abstraction saint-justinienne qui avait fait tant de mal dans l’Histoire, en particulier durant la Terreur ou au temps de l’Union soviétique… Mais, en fait, lorsque le comte de Paris écrit la formule évoquée, il ne s’agit pas pour lui de parler d’un « mythe » ou d’user d’une facilité de langage démagogique, mais de rappeler que l’Etat a pour devoir d’assurer le bien-être de ses citoyens ou, du moins, de le préserver du pire, de la défaite ou de la misère, de la toute-puissance des forces économiques et des injustices sociales qui résultent d’une application trop stricte de la « liberté économique », celle du « renard libre dans le poulailler libre » qui oublie les règles de l’équilibre de toute société.

 

L’Etat français, aujourd’hui encore et malgré la République, est conscient de cette tâche qui lui revient, non seulement de droit mais de devoir et de légitimité, et le président Nicolas Sarkozy, dans son discours de Toulon de 2008, rédigé par le gaulliste social Henri Guaino, avait alors pris le contrepied de ce qu’il avait dit quelques semaines auparavant, au risque même de contredire la lettre et l’esprit du traité de Lisbonne dont il se veut le « père » (de façon un peu exagérée, d’ailleurs) et qui est de stricte orthodoxie libérale… Son actuelle et indéniable activité politique face à la crise de la zone euro et sa proximité avec la chancelière allemande (proximité qui peut, sur certains points, être fort critiquable) montrent que deux Etats actifs et volontaires sont plus efficaces et plus engagés que les institutions officielles de la Commission mais aussi de la BCE, sans même parler du Parlement européen qui poursuit tranquillement ses vacances...

 

Il est d’ailleurs significatif que les propos récurrents de M. Guaino expliquant qu’il ne fallait pas hésiter, en cas de besoin, à passer par-dessus les critères de Maëstricht  (propos qui, jadis, firent scandale !) forment désormais la réalité concrète de la politique des deux grandes puissances de la zone euro. Pied de nez au libéralisme, d'une certaine façon !

 

Avoir eu raison trop tôt (mais je n’étais pas le seul, évidemment, à prévenir des risques d’un libéralisme sans garde-fou ni freins) ne me console pas vraiment, parce que, lorsque ce qui est annoncé arrive, c’est encore Cassandre qui est accusée d’avoir attiré le malheur sur la cité et que les retournements de veste, bruyants à défaut d’être complètement sincères, couvrent les paroles des justes augures.

 

Depuis plus de trois ans qu'elle est apparue visible, la crise n’est pas finie, et elle n’est, en fait et au-delà des péripéties multiples et quotidiennes, qu’une transition, un vaste transfert de richesses des classes moyennes du Nord vers celles, émergentes, de Chine et d’Inde, mais aussi, comme le montrent les déclarations des hauts responsables chinois (qui se payent le luxe de tancer les Etats-Unis et l’Union européenne pour leurs déficits…), un transfert de direction politique et économique des Etats occidentaux (désarmés et de plus en plus dépendants des oligarchies financières) aux Etats du « Sud conquérant », entre autres, comme je l’ai déjà dit maintes fois, sur ce blogue comme dans des discussions avec mes élèves ou mes collègues : le rôle de Cassandre, aujourd’hui, s’achève, et doit laisser la place aux actions concrètes des Politiques, à ceux à qui il revient de forger les boucliers mais aussi les épées de demain, à ceux qui doivent, l’espérance au cœur, agir pour les générations qui s’annoncent et celles qui sont encore lointaines. Dans son histoire, notre pays a traversé de multiples épreuves, il survivra à cette crise, sans doute, et cela même si l'euro monnaie unique disparaît, ce qui n’est pas tout à fait impossible  : mais, le « mettre en Monarchie » aurait comme vertu d’inscrire le long terme dans l’Etat, élément nécessaire de tout amortissement et de toute résolution de crise et condition de la justice sociale, garantie par la loi nationale plus sûrement que par les règles d’une Union européenne, aujourd’hui percluse de libéralisme comme d’autres le sont de rhumatismes…