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13/08/2010

Une messe à Lancieux.

Je profite de mon séjour en Bretagne pour lire, en particulier les ouvrages qui se sont accumulé ces derniers mois sur mon bureau et à ses pieds, et pour me promener, de la Côte d’émeraude à la Mayenne, de Rennes au Finistère, retrouvant des chemins anciens que mes jeunes années ont empruntés. Ainsi, mardi matin, sous une pluie battante, j’arpentais le marché de Lancieux et, comme à chaque fois, j’ai poussé la porte de l’église dans laquelle j’accompagnais ma grand-mère ou mon père le dimanche. A ma grande surprise, la voix du prêtre qui officiait était fortement accentuée : ce n’était plus l’accent chantant et légèrement traînant du recteur Castel, le prêtre de mon enfance, mais un autre accent qui arrondissait les mots et semblait les amplifier, leur donner une forme et une force étranges, presque magiques. Surprenant et réjouissant, aussi… Car, qu’au cœur de l’été, en un jour qui n’était pas un dimanche, une messe réunisse une bonne vingtaine au moins de paroissiens autour de l’autel, que ceux-ci soient attentifs et chantent de tout leur cœur des prières et des louanges à Dieu et à ses saints, c’est, en ces temps si peu aimables à l’Eglise catholique, une bonne nouvelle pour le croyant que je suis !

 

D’autant plus qu’aucun mot sur la porte de l’église n’annonçait cette messe quotidienne, et que c’est le policier municipal, celui que nous appelions le garde champêtre il y a quelques années encore, qui m’avait indiqué cet office inattendu alors que je m’inquiétais, quelques quarts d’heure avant la cérémonie, de voir close la porte habituellement toujours ouverte… Je n’y vois pas un signe du destin, mais bien une heureuse surprise et un signe d’espérance : dans une société qui ne pense le plus souvent qu’à consommer, qui oublie trop fréquemment le service des autres mais aussi ses particularités historiques et sa personnalité, cette simple messe m’a semblé très symbolique et réconfortante.

 

Mais il y avait un autre symbole : le prêtre qui officiait avec tant de ferveur, qui évoqua en quelques mots la question du malheur et de ses leçons comme des moyens de le surmonter, cet homme d’Eglise qui faisait vivre la parole de Dieu dans cette petite église bretonne de la Côte d’émeraude était d’origine noire-africaine. C’est son accent que j’avais entendu avant que de l’apercevoir et qui m’avait tant surpris ! Mais sa présence m’a aussi rappelé que l’un de mes copains d’enfance à Lancieux était de la même couleur mais n’avait aucunement l’accent que l’on prête aux personnes d’origine africaine. Je me souviens aussi que sa couleur, étonnante à l’époque dans ce petit village encore agricole et pêcheur, alors très « France profonde », n’a jamais, à ma connaissance, été un motif d’exclusion ou de raillerie : le racisme nous était, aux enfants que nous étions, inconnu et n’avait aucune raison d’être.

 

A l’heure où certains font des différences de couleur ou d’origine des motifs de repli communautaire et des arguments de revendications parfois fort agressives et dangereuses pour l’unité française elle-même, ce prêtre était la preuve vivante que le langage d’amour et d’espérance est encore possible et qu’il est même nécessaire aujourd’hui pour surmonter les défis du monde contemporain.

 

En écrivant cela, je ne tiens pas un discours religieux en tant que tel mais bien plutôt je me permets de faire un rappel politique, au sens le plus fort de « politique », celui qui naît au cœur de la Grèce antique, c’est-à-dire la vie de la Cité, son organisation, ses valeurs, ses fondements… Partisan d’une Monarchie royale d’abord politique et sans référence au « droit divin », je n’oublie pas que, sans la conscience du sacré d’une part, de la doctrine sociale de l’Eglise d’autre part, la Monarchie se priverait d’une partie de sa force et, sans doute, de sa légitimité, ce qui serait, pour le moins, regrettable !

 

Je vais retourner à la messe quotidienne de ce prêtre et je tâcherai de converser quelques minutes avec lui, sans doute dans un café proche puisque le presbytère vient d’être vendu, signe des temps… Sans doute aussi lui dirai-je mes espérances politiques dans lesquelles je vois certaines possibilités d’un « ordre social chrétien » (tel que l’a évoqué La Tour du Pin) sans que cela ne fasse de l’Etat un « obligé de l’Eglise », ce que la Monarchie française n’a d’ailleurs jamais autorisé dans son histoire multiséculaire…

 

27/07/2010

Trente ans !

J’ai trente ans ! Enfin, trente ans de royalisme… Depuis ce samedi 26 juillet 1980 et cette lettre glissée à la Poste de Saint-Lunaire, avec, sur son enveloppe, le nom de Pierre Juhel (le dirigeant du mouvement d’Action Française) qui, étrange « intersigne » (diraient certains), décédait d’une longue maladie ce même jour : je n’ai pas vu dans cette coïncidence autre chose qu’une… coïncidence, autant qu’il m’en souvienne.

 

Trente ans de royalisme, de militantisme, de réflexion, de foi politique… Que de souvenirs, même si beaucoup sont effacés par l’accumulation d’actions, de discussions, d’épreuves, d’échecs et de (quelques…) succès ! Trente ans durant lesquels quatre présidents de la République se sont succédé, de Giscard d’Estaing à Sarkozy, plus d’une douzaine de premiers ministres, sans compter les scandales, des diamants offerts par l’empereur Bokassa à Giscard au financement douteux du microparti de Laurent Wauquiez par des industriels délocalisateurs au Royaume-Uni. Le communisme s’est effondré, le socialisme s’est amendé en libéralisme de gauche, le gaullisme est devenu commémoratif tandis que l’Union européenne est devenue le « nouvel horizon indépassable » (sic !) de la politique française… Jacques Martin et Jean Yanne sont morts, Giscard pas encore mais Lady Di, si…

 

En trente ans, mon royalisme ne s’est pas démenti mais il n’est plus forcément le même qu’en cet été 80 : il a mûri, ses thématiques se sont sans doute diversifié et approfondi, et j’ai fait ce devoir d’inventaire qui me fait, aujourd’hui, préférer le Bernanos de « La France contre les robots » au Maurras de « la revanche de Dreyfus »… Du Maître de l’Action Française, j’ai gardé quelques éléments qui en font une référence majeure dans mon Panthéon personnel, mais je peux dire aussi que, si je suis devenu royaliste grâce à Maurras et à ses fortes raisons, c’est aussi malgré Maurras que je le suis resté !

 

« La vraie tradition est critique », l’importance du « moyen politique » et du « levier institutionnel » (le fameux « Politique d’abord ! »), le « fédéralisme national » et la Monarchie active forment mon héritage « maurrassien ». Mais la lecture de Georges Bernanos, de Simone Weil, de Bertrand de Jouvenel (avant même que je ne me penche sérieusement sur Maurras), de Georges Balandier, et de beaucoup d’autres venus de tous les horizons politiques ou philosophiques, a irrigué un royalisme que j’ai toujours voulu actif, combatif et éminemment politique et « contemporain » : la nostalgie, si elle peut parfois exister et, même, m’envahir sentimentalement, ne fait pas une politique et en serait plutôt le tombeau.

 

Trente ans après ma découverte, par hasard, de l’hebdomadaire d’Action Française « Aspects de la France » (aujourd’hui redevenu « L’Action Française »), je suis plus royaliste que jamais, sans doute plus marqué par les questions sociales et environnementales qu’à l’époque de mes années d’études, mais toujours farouchement attaché à l’idée d’une France libre de son destin, utile au monde et nécessaire à l’histoire.

 

Bien sûr, la Monarchie n’est pas faite et, si j’en garde la forte espérance, sa proximité n’est pas encore avérée : cela n’enlève rien à sa nécessité et à l’ardente obligation d’accélérer la date de son recours, de son secours pour notre pays. Sera-t-elle telle que je la pensais il y a trente ans, solution « miraculeuse » à tous les maux de la France ? Non, bien sûr : mais elle sera, je le pense, le moyen institutionnel de « refaire France », à l’intérieur des frontières du pays comme sur la scène internationale. Et ce n’est pas rien !

 

Trente ans de royalisme, mais j’aimerai ne pas en fêter encore trop de décennies : car, comme je l’ai dit mille fois à la fin d’articles ou de réunions publiques, « il ne s’agit pas de mourir royaliste mais de vivre en Monarchie ! ».

 

A suivre ? Bien sûr, à suivre, encore quelques temps, tant qu’il me restera un souffle de vie… Et, toujours, ce cri multiséculaire de la fidélité créatrice, « vive le roi ! »…

 

 

24/07/2010

General Motors, à Strasbourg : l'insupportable silence de l'Etat !

En début de semaine, les ouvriers de l’usine strasbourgeoise de General Motors Company ont été appelés à se prononcer par référendum sur le gel de leurs salaires pendant deux ans, l’abandon de six jours de RTT (sur seize), la suppression de l’intéressement jusqu’en 2013 : l’enjeu était de diminuer les coûts de main-d’œuvre pour « sauver les 1.150 emplois » de l’usine menacée, par la multinationale états-unienne, d’être purement et simplement (et rapidement) fermée pour être réimplantée là où les coûts de production seraient moins élevés… Ainsi, les ouvriers, d’habitude écartés des décisions de l’entreprise, étaient-ils conviés à légitimer eux-mêmes une rigueur censée les sauver, en sacrifiant une part de leurs revenus !

 

Dans cette affaire, plusieurs éléments sont choquants : d’abord, le fait que ce sont toujours les ouvriers qui sont « la variable d’ajustement » et que les multinationales, dans la recherche d’un profit qui intéresse d’abord les actionnaires et non les travailleurs eux-mêmes, font peu de cas des conditions sociales de leurs salariés, et se réfugient derrière les « contraintes de la compétitivité » pour excuser ce qui est, le plus souvent, le résultat d’une certaine cupidité actionnariale ou patronale mais aussi parfois le résultat d’erreurs de gestion et de stratégie industrielle !

 

Ensuite, l’absence de l’Etat français dans cette affaire : bien sûr, nous ne sommes pas, et heureusement, dans une économie étatisée mais l’Etat a un rôle majeur, éminemment politique, qui est de protéger ceux qui sont ses citoyens, et en particulier de veiller à ce que les intérêts des plus faibles ne soient pas oubliés par les puissants, quels qu’ils soient, financiers ou industriels ! Or là, au moment même où l’Etat serait nécessaire, dans son rôle d’arbitre économique et de garant de l’équité sociale, il est silencieux, invisible, craignant sans doute que la Commission européenne (toujours au nom de son dogme fondamental de la « concurrence libre et non faussée »…) ne le tance s’il intervenait et s’il rappelait ses obligations sociales à cette entreprise étrangère qui voudrait bien appliquer des règles déjà pratiquées dans des pays où le Droit social reste embryonnaire…

 

Ce silence de l’Etat est un vrai scandale, non pas économique, mais social et politique ! Il montre aussi la faiblesse actuelle, l’impuissance même d’une République qui n’est plus libre et n’ose s’affranchir, quand il le faudrait bien, des règles édictées par les féodalités financières et industrielles, par cette « fortune anonyme et vagabonde » qui se moque des frontières, des pouvoirs publics, des citoyens…

 

« On finira bien par restaurer la Monarchie, un jour, contre la dictature et contre l’anarchie », affirmait Eugène Ionesco dans les années 70 : oui, contre la dictature des féodalités multinationales et contre l’anarchie d’une économie sauvage, voire barbare, il faudra bien, le plus tôt possible, instaurer en France une Monarchie royale, politiquement libre et socialement juste. Non pour faire des miracles mais pour faire respecter la décence sociale et avancer la cause des hommes, tout simplement !