21/12/2011
Une crise peut en cacher une autre...
Nous étions quelques uns en ce début d'après-midi de lundi à distribuer des tracts du Groupe d'Action Royaliste (le GAR, pour les intimes...) dans les rues de Paris. Le texte de ceux-ci portait sur la crise actuelle, avec pour titre « Une crise peut en cacher une autre » qui signalait le caractère multiple de ce que l'on nomme, par facilité parfois plus que par réflexion « la Crise »... J’avoue avoir participé à sa rédaction, et voici ce texte, avec quelques rapides commentaires.
« Depuis 2007, les pays européens subissent une grave crise née aux Etats-Unis : elle frappe les économies et les sociétés, fragilise notre pays et appauvrit les populations tout en menaçant les emplois et assombrissant l'avenir... ». La crise des subprimes de 2007, puis la crise bancaire consécutive à l'effondrement de la banque américaine « Lehman Brothers », a, en fait, entrer le monde entier dans un cycle de crises dont les populations sont trop souvent les premières et les principales victimes, bien plus encore que les banques elles-mêmes, sauvées la plupart du temps par l'argent public d'États déjà fortement endettés.
« Crise de la zone euro, crise de l'euro, crise de la dette, autant de noms pour une crise multiforme qui révèle aussi les faiblesses et les errements de la Société de consommation, trop énergivore et trop gaspilleuse pour ne pas être condamnée ! ». Les matières premières, surexploitées qu'elles soient renouvelables ou non, s'épuisent de plus en plus vite, d'autant plus que nos sociétés ne veulent en rien diminuer leur consommation énergétique et que les puissances émergentes ne pensent qu'à rattraper les pays du Nord dans cette frénésie de consommation, de « consumation »... D’où une véritable surenchère entre puissances consuméristes qui se traduit aussi par de multiples tensions sur le plan économique mondial et qui ne profite guère aux populations les moins aisées, y compris des pays anciennement industrialisés d’Europe…
« Crise qui accélère le basculement du centre de gravité du monde, enrichissant et fortifiant les nouvelles puissances que sont la Chine, l'Inde, le Brésil... ». C’est la fameuse « transition » dont je parle régulièrement dans mes interventions, orales comme écrites, et qui préfigure, peut-être (restons prudent, l’Histoire nous rappelle souvent à l’humilité…), la multipolarité économique et politique de demain et, donc, la fin de « l’hégémonie occidentale ».
« Mais cette crise est aussi l'occasion pour l'Union européenne et les gouvernements libéraux et sociaux-démocrates d'imposer, au-delà des mesures d'austérité, une véritable destruction des politiques sociales et la privatisation souvent abusive des services publics, au risque de rompre les équilibres sociaux et d'aggraver les injustices actuelles, souvent scandaleuses, entre les classes les plus privilégiées et les classes moyennes et populaires. ». Souvent, la Crise a bon dos et elle marque surtout un rapport de forces plus favorable aux Marchés financiers qu’aux simples travailleurs, qu’ils soient ouvriers, agriculteurs ou employés, principales victimes d’une mondialisation qui a cessé, au regard de nos concitoyens, d’être « heureuse »…
« Mais, derrière la crise économique, il y a une crise politique, celle d'un État incapable de s'opposer aux puissances financières et aux oligarchies économiques quand il le faudrait. Alors qu'un État actif, volontaire, fort, serait nécessaire pour relever les défis contemporains, la République s'enfonce dans l'incertitude et l'impuissance, cédant aux injonctions de l'Allemagne et des Agences de notation ! La République est aujourd'hui en campagne électorale permanente, ce qui aggrave encore la situation et affaiblit un peu plus le crédit de l'État ! ». Il n’est pas facile pour la magistrature suprême de l’Etat d’avoir de l’autorité et de l’efficacité quand la démagogie malheureusement consubstantielle à la période électorale brouille le message de l’Etat : il suffit de lire les propos de M. Sarkozy quand il ironise sur les propositions de son concurrent M. Hollande et, inversement, d’entendre ceux de M. Hollande quand il dénonce, à tort ou à raison d’ailleurs, les projets sarkoziens, sans que, dans l’un ou l’autre cas, l’intérêt national (mais aussi européen) soit la première préoccupation des deux candidats… Et ce qui est vrai pour eux deux l’est malheureusement aussi pour la plupart des prétendants à l’Elysée ! Triste situation, du fait de la conception élective, mais aussi électoraliste, de la magistrature suprême de l’Etat…
« Pour affronter la crise économique, pour réindustrialiser notre pays, lui redonner des forces et de l'espérance, lui permettre d'utiliser au mieux ses nombreux atouts : il faut un État solide, sûr de lui, enraciné dans le pays et dans la longue durée ; un État qui protège et qui soutient les initiatives des Français ; un État qui se préoccupe du souci environnemental et prépare la grande mutation énergétique du XXIe siècle. ». En somme, la Monarchie « à la française » !
L’accueil fait à notre distribution de tracts, à la sortie du métro Odéon, a été fort sympathique, et quelques brèves discussions ont prouvé que les royalistes, lorsqu’ils savent se présenter et, avec le sourire, dialoguer avec autrui, peuvent être attentivement écoutés et, j’espère, entendus !
09:59 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : crise, mondialisation, monarchie, euro, société de consommation.
09/11/2011
La transmission héréditaire en monarchie.
De multiples questions sont posées au royaliste que je suis, en particulier sur ce que serait la Monarchie ré-instaurée, ou en quoi elle serait différente de l'actuel régime en place : il est vrai que, au début du quinquennat, certains voyaient en M. Sarkozy un monarque que, pourtant, il n'a jamais été ni ne peut prétendre être, au regard même de l'histoire et de la tradition monarchique française. La monocratie n'est pas la Monarchie !
Rappelons quelques éléments simples : tout d'abord et contrairement à ce que l'on pourrait croire par une trop rapide lecture des institutions, la Monarchie n’est pas forcément l’antithèse de tout ce qui fait une République aujourd’hui, bien sûr, mais elle a des fondations et souvent des fondements, des raisons d’être et d’agir différentes, ne serait-ce que par définition : quand la République (comprise ici dans un sens restrictif, historiquement et politiquement, et particulièrement dans notre pays) est « l’absence de Roi » (suivant la formule d’Anatole France), la Monarchie se caractérise, au regard du cas français et des exemples européens, par la règle de la transmission héréditaire de la magistrature suprême, du père au fils dans la meilleure configuration, règle résumée par deux formules que les légistes français ont souvent rappelée : « Le roi est mort, vive le roi ! » et « le roi ne meurt jamais », cette dernière formule rappelant que « l’Etat demeure toujours » (Louis XIV sur son lit de mort), au-delà de la mort physique de son dépositaire du moment.
Ce mode de transmission du Pouvoir est à la fois le plus simple, le plus naturel, mais aussi le plus contesté aujourd’hui dans notre société politique et par l’idéologie dominante d’un individualisme qui s’accommode mal d’une règle et d’une autorité qui lui échappent, celles-ci ne devant rien, dans leurs applications, à la volonté individuelle pure. Car le choix des électeurs n’est pour rien dans la montée sur « la première place », symbolisée longtemps par le trône, d’un homme qui s’est apparemment juste donné la peine de naître, et de « naître roi » avant que de le devenir concrètement, statutairement, politiquement. La naissance est à la fois l’argument fort et même principiel des monarchies, et son handicap dans l’Opinion publique : mais il est la base de l’autorité monarchique.
En fait, la naissance, aujourd’hui comme hier et sans doute demain, échappe aux jeux de clientèle et de concurrence pour la magistrature suprême : le futur roi n’a pas choisi de « naître roi », mais il n’est pas libre, dans une Monarchie « à la française », de renoncer aux responsabilités que cela impose. A partir de sa naissance, alors que la vie suit son cours et avant que la mort ne « libère » le trône de son prédécesseur, souvent de son propre père, le Dauphin (puisque c’est ainsi qu’on le nomme en France) est entretenu dans cette ambiance particulière qui fait de lui celui qui « attend », sans être pressé (car un fils n’espère pas la mort de son père…), et qui est préparé (et se prépare) à la tâche politique de régner : il apprend le métier de roi sans savoir, d’ailleurs, s’il l’exercera un jour, mais plus encore, quand il l’exercera. Dans cette situation, aucun choix, ni pour le roi ni pour le Dauphin ! Mais, paradoxalement, c’est cette absence de choix, c’est le fait de s’en remettre à la nature et à la vie familiale, à la filiation, qui permet la plus grande liberté à la Monarchie, à la magistrature suprême de l’Etat en monarchie.
Certains, malicieusement, m'objecteront que le président actuel semble avoir poussé son fils à prendre des responsabilités politiques dans un réflexe dynastique qui pourrait se retrouver dans les arguments évoqués plus haut : mais, justement, il s'agit là, dans une République de plus en plus oligarchique, d'une tentation liée à une conception « clientéliste » et « privatisée » du Pouvoir et non à une notion de Pouvoir comme « service public ». Quand la République et la monocratie pensent d'abord à « se servir », la Monarchie est là, d'abord et par principe même, « pour servir » : la nuance est d'importance...
00:35 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : monarchie, autorité, transmission, hérédité, roi.
31/07/2011
Le collectif se construit aussi avec du symbolique : l'avantage royal.
La IIIe République est morte de la défaite de juin 1940 et, depuis, la France vit dans ce trouble né des suites de l'Occupation, ressassant ses échecs et ses fautes, dans une sorte de cauchemar sans fin... Pourtant, la France n'est pas morte à ce moment-là et la légitimité de l'Etat s'est trouvée prise dans ce constant débat entre Créon et Antigone, entre « l'Etat français » de Vichy et « la France libre » de Londres (en fait de Brazzaville, puis d'Alger, capitales successives de la France Libre), débat qui ne s'est pas totalement clos à la Libération.
La question n'a pas épargné les autres pays européens pris dans la tourmente de la guerre, et il n'est pas inintéressant de noter que les Monarchies voisines de la France ont eu des réactions contrastées, entre un roi des Belges qui reste en son château et qui se trouvera accusé d'un attentisme coupable en 1945 et un roi d'Angleterre George VI, popularisé cette année par le film « Le discours d'un roi », qui apparaîtra comme l'âme de la résistance à l'invasion, préférant subir (en son palais et au milieu de la population) les bombardements allemands de sa capitale que de se réfugier à la campagne : cela confortera aussi la monarchie britannique pourtant secouée, quelques années auparavant par l'abdication du frère de George VI.
Les Monarchies étaient-elles mieux placées pour résister au nazisme que les Républiques ? Par rapport à la République française et ses spécificités, sans doute : la Monarchie a un avantage certain par rapport à la République, c'est l'incarnation concrète de l'Etat, de son unité, des peuples comme des personnes, par une famille « à aimer », et cet amour symbolique n'est pas anodin en période troublée. Alors que de Gaulle eut tout à créer, à susciter, les familles royales avaient déjà ce capital sentimental et symbolique qui permettent la reconnaissance d'une légitimité (sans forcément la fonder, car elle « est » déjà, dans la plupart des cas et au regard de l'histoire de l'Europe et de ses dynasties) : « La France était à Londres avec de Gaulle dès le 18 juin », affirme Bertrand La Richardais dans « Royaliste » (Numéro 976, 11-25 octobre 2010), « comme les Pays-Bas étaient à Londres avec leur reine exilée, et la Norvège avec son roi, et le Luxembourg avec sa grande-duchesse... Ces têtes couronnées peuvent paraître pittoresques ou dérisoires lorsque tout va bien. Elles sont salutaires lorsque survient une tragédie nationale. » Les derniers attentats meurtriers sur le sol européen, de mars 2004 à celui d'il y a quelques jours en Norvège, ont rappelé ce rôle important des familles royales autour desquelles les autorités politiques comme civiles se rassemblent dans les cérémonies du deuil, dans ces moments où les peuples se serrent les coudes pour affronter « le pire » et « les lendemains du pire », et où c'est la figure de « l'unité » qui compte le plus face aux terrorismes qui, eux, visent à diviser et désarmer. Un président, aussi populaire soit-il, n'a sans doute pas la même reconnaissance des populations, parce que sa magistrature même n'est qu'un moment entre deux élections et qu'il n'a pas, sauf exception, cet enracinement dans le temps et dans l'histoire qui dépasse le temps court de la magistrature élective. Même de Gaulle, pourtant incarnation d'une légitimité d'abord historique avant d'être démocratique (ministérielle ou électorale), n'a pas, de son vivant, connu la même reconnaissance que, par exemple, le roi Juan Carlos après le coup d'Etat post-franquiste manqué de février 1981 qu'il a, seul et de par sa position et sa légitimité, fait échouer.
Pour en revenir aux situations tragiques dans lesquelles les nations peuvent être plongées par les guerres, on constate que les têtes couronnées sont, malgré un Pouvoir parfois très discret (voire pratiquement sans effets politiques), des traits d'union entre tous ceux qui, dans le pays, sont soumis à « l'imposition étrangère » : « Autrement dit : le collectif se fabrique avec du symbolique qui assure le lien lorsque tout paraît perdu. Cela s'incarne tout simplement lorsqu'une personne incarne une dynastie. », poursuit La Richardais. Au-delà de l'unité, le monarque représente ce symbolique qui permet « le collectif » dans une nation, qui en forge le creuset, ce que l'on pourrait qualifier « d'identité nationale » sans tomber dans l'identitaire exclusif et d'exclusion.
Aujourd'hui, à l'heure des incertitudes et des peurs liées à la mondialisation, la Monarchie apparaît comme cet élément visible, car incarné et enraciné dans le temps par la transmission héréditaire, de la nation et de sa longue mémoire, rassurante car justement « intemporelle » et « inactuelle », c'est-à-dire « éternelle », sans doute plus souvent dans le ressenti que dans la réalité historique elle-même d'ailleurs...
Néanmoins, cela suffira-t-il toujours à désarmer des populismes qui, désormais, se veulent « plus nationalistes que la nation », dans une réaction de « nationalisme d'urgence » maladroite et parfois trop fiévreuse pour être raisonnable, voire parfois un nationalitarisme identitaire qui confond « ethnie » et « peuple »... Il y aurait évidemment beaucoup à dire et écrire sur ces faits et tout nationalisme d'urgence n'est pas forcément condamné à ces dérives éthiques ou à ces pièges mortifères que sont l'isolationnisme et l'ethnicisme.
En tout cas, les Monarchies d'Europe sont à un tournant mais elles sont sans doute mieux armées que notre République à laquelle il manque, comme l'affirmait Régis Debray, « une famille royale » pour assurer et assumer le symbolique nécessaire à la reconnaissance d'un « collectif national » dont de Gaulle fut la dernière, et incomplète malgré ses efforts, représentation politique d'Etat...
15:25 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : collectif, symbolique, monarchie, nationalisme, nation, populisme.