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06/09/2014

République en crise...

La République est-elle en phase terminale ? M. Hollande pourra-t-il tenir ? Va-t-on vers la dissolution de l’Assemblée nationale ? La France peut-elle s’effondrer comme la Grèce ? Autant de questions que je ne cesse d’entendre depuis quelques jours, parfois sous la forme d’affirmations péremptoires, le point d’interrogation se transformant de plus en plus fréquemment en un point d’exclamation : au comptoir des cafés, dans la salle des professeurs, sur un bout de trottoir, dans une librairie encombrée où les clients demandent, d’une voix parfois forte, comme provocatrice, le livre de Mme Trierweiler, véritable succès – un peu ambigu et plutôt inattendu - de la rentrée littéraire 2014…

 

Alors ? Je pense que nous vivons, en cette semaine et peut-être en celles qui vont suivre, un véritable emballement et que les Français « se lâchent » dans leurs réactions, comme pour surmonter ce terrible sentiment d’impuissance politique qui les mine et qui les fait de plus en plus douter de la Cinquième République elle-même au point d’en demander une « Sixième », cette dernière n’étant rien d’autre que le retour de la Quatrième, entre parlementarisme et partitocratie… En fait, nous y sommes déjà, comme me le faisait remarquer un collègue : « La Cinquième avec des hommes et des pratiques de la Quatrième »… Heureuse formule pour une réalité qui l’est beaucoup moins !

 

Effectivement, le spectacle actuel rappelle les pires heures de la Quatrième, morte dans la douleur et le déshonneur faute d’avoir surmonté ses contradictions et ses propres principes quand il aurait fallu plus d’audace et de liberté face aux événements d’alors. Aujourd’hui, la monocratie, sinistre village Potemkine d’une autorité défaite par les hommes que le suffrage populaire avait appelé à les représenter, cache de moins en moins les ruines de la Chose publique, et le monocrate du moment, M. Hollande, semble inconscient de sa responsabilité dans cette désolation française qui ne peut que m’attrister, moi le royaliste soucieux de la pérennité et de l’indépendance d’un Etat que je juge nécessaire pour incarner celles de la nation elle-même.

 

Je ne souhaite pas que l’Etat s’effondre car les conséquences en seraient d’abord terribles pour la France et ses habitants, et parce que je ne suis pas partisan de « la politique du pire qui est la pire des politiques » comme le disait avec justesse Charles Maurras, souvent incompris pour ce qui n’était pas frilosité mais, au contraire, souci politique de la France. Mais pour éviter cet effondrement, encore faudrait-il que nos gouvernants et ceux qui aspirent à le devenir prennent conscience que la France ne peut et ne doit plus être le jeu de leurs combinaisons et petits arrangements, et qu’ils retrouvent le sens de l’Etat, celui qui animait un Richelieu ou, même, un Talleyrand. En sont-ils capables ? Personnellement, j’en doute, au regard de leurs discours et attitudes, à droite comme à gauche… D’ailleurs, la droite vaut-elle et ferait-elle mieux que la gauche actuellement aux affaires (sans même penser au mauvais jeu de mots qu’un Cahuzac ou un Thévenoud pourraient susciter…) ? Là encore, je ne suis pas le seul à en douter, au regard des sondages des derniers jours et des déclarations embarrassées des ténors d’une UMP en déroute.

 

Il m’apparaît de plus en plus nettement que la Cinquième République, malgré les fondations monarchiques voulues par son géniteur et premier président, le général de Gaulle, n’est plus à même de relever les défis de la contemporanéité ni de répondre aux attentes de ceux qui, pourtant, croyaient en elle avec une sincérité, voire une foi quasi-religieuse, que je ne moquerai pas, même si j’en soulignerai les limites et les illusions. Je leur dirai que s’ils veulent conserver l’Etat et ce qu’ils appellent, de façon sans doute inappropriée, la République (ce que, pour ma part, je nomme « Chose publique » ou « Cité »), il n’y a d’autre solution que de passer par le moyen institutionnel monarchique, royal, qui redonnera à la magistrature suprême une durée et une indépendance que le quinquennat ne lui permet pas de recouvrer, comme le montrent à l’envi et de façon presque outrancière les deux dernières présidences, si désastreuses qu’elles ne suscitent plus, dans le souvenir comme dans l’actualité, que rejet électoral et dégoût politique…

 

 

 

 

 

03/09/2014

Un président d'hypocrisie...

 

Cela aurait pu rester de l'ordre de l'intime et du ressentiment que l'on n'exprime pas « chez ces gens-là », comme dirait Brel, sur la scène publique, mais, en cette ère de démocratisation à outrance et de transparence obligatoire (« quand on n'a rien à se reprocher, pourquoi ne pas tout dire et montrer les choses ? », dit-on...), les frontières entre vie privée et vie publique semblent irrémédiablement condamnées à tomber : d'ailleurs, elles sont d'abord détruites de l'intérieur, par ceux-là mêmes qui devraient être les « gardiens des secrets », des leurs comme de ceux de leurs proches. Il n'y a plus guère que les monarques qui, en somme, savent garder ceux qu'on leur confie : depuis 1952, date de sa montée sur le trône, la reine Elisabeth a reçu toutes les confidences politiques de ses premiers ministres, de Churchill à Cameron, et elle n'en a jamais rien dit, et chaque premier ministre de Sa Majesté sait que, par principe même, la souveraine ne livrera jamais à la presse ou à un livre de souvenirs le moindre détail de ses rencontres hebdomadaires avec le Chef du gouvernement britannique. Il en va de même en Espagne et en Belgique, monarchies constitutionnelles voisines géographiques de notre République des « révélations »...

 

Ainsi, Valérie Trierweiler, ex-compagne de l'actuel président, a commis un livre que l'on peut résumer par le titre d'une nouvelle de Barbey d'Aurevilly : « la Vengeance d'une femme. », et qui apparaît aussi comme un documentaire, avec tous les risques de désinformation et de manipulation que cet exercice journalistique peut engendrer, au plus proche de la magistrature suprême de l'Etat. On peut n'apprécier ni l'auteur ni le déballage de secrets d'alcôve et ne pas vouloir participer non plus au lynchage médiatique et politique de cette femme qui a eu le malheur de croire, avant les électeurs de la présidentielle de 2012, en un homme qui semble bien avoir trompé l'une et les autres... Personnellement, je suis assez agacé par ces courtisans du Président qui, après s'être jadis inclinés devant celle qui faisait office de Première dame (certains lui devant leur fortune politique, voire ministérielle, preuve que le mélange des genres n'a pas attendu sa répudiation présidentielle pour être pratiqué...), la traitent désormais comme la pire des traînées, manquant à tous leurs devoirs de réserve (et de galanterie) dans certains cas, ou montrant une « indéfectible » - je préfère mettre le terme entre guillemets : les mêmes n'hésiteront sans doute pas, demain et avec un aplomb sans faille, à cracher sur celui dont ils astiquent aujourd'hui les pompes...- loyauté à M. Hollande, au cas où il y aurait encore quelques os à ronger du côté de l'Elysée.

 

Mais ce qui me frappe et me choque, c'est ce que l'ancienne favorite a révélé (vérité ou mensonge ? Le doute persiste, mais...) sur l'état d'esprit de son ancien amant à l'égard des pauvres : l'expression « Les sans-dents » prêtée à l'actuel Président est terrible, effroyable même ! Bien sûr, il ne sera sans doute jamais prouvé qu'il a prononcé cette formule, mais je sais trop bien que (sauf quelques notables exceptions) « chez ces gens-là », le mépris des pauvres est bien réel : j'aurai bien des anecdotes à raconter sur cela, en particulier sur ces gens de la « bonne Gauche », emplis de grands principes (y compris dans leurs livres, et je pourrai citer quelques noms un peu connus parmi ceux que j'ai cotoyés en d'autres temps...) et peu soucieux, une fois retournés à leurs foyers ou à leurs salons, de les mettre en pratique pour eux-mêmes. Cela fait partie de la nature humaine, dira-t-on, et ce n'est pas faux, sans doute : mais ce que je reproche à ces gens-là dont les dents rayent souvent le parquet et la langue humidifie les chaussures des Puissants, c'est leur grande hypocrisie ! Jusque là, j'avais tendance à accorder quelque sympathie (à défaut de crédit...) à l'homme Hollande, avec lequel il m'est arrivé une fois, dans les années 1990, de discuter de la situation des quartiers et des écoles des Mureaux, situation qu'il connaissait bien et qu'il regrettait, avec un certain fatalisme d'ailleurs : j'ai, ce jour de septembre 2014, l'impression fortement désagréable de m'être « fait avoir » (sentimentalement parlant, pas politiquement, bien sûr!), et j'en conçois, non de la surprise, mais bien plutôt de la colère !

 

En même temps, je ne me faisais guère d'illusions sur la réalité des discours comme celui du Bourget au début 2012 (celui qui fustige la Finance, discours dont j'avais salué, en son temps, le refus de céder aux féodalités de l'Argent ; discours qui, en soi, n'est pas foncièrement mauvais mais qui n'a été qu'un discours, justement, et un discours de candidat, destiné à s'attirer les bonnes grâces électorales ; un discours trompeur dont la forme, plutôt bienvenue, cachait un fond plus saumâtre : de quoi alimenter un peu plus ma méfiance à l'égard de la République électorale et de la démocratie « émotionnelle »...). Je sais trop bien aussi, en étudiant l'histoire politique et sociale des derniers siècles en France, que la Révolution a ouvert l'ère de l'Argent et de sa main-mise sur l'Etat et la politique, et que, dès ses débuts, elle a méprisé et écrasé les pauvres qu'elle a écartés de la citoyenneté tout en les privant des ressources que l'Eglise pouvait mettre à leur disposition : il faudra d'ailleurs, un jour, étudier comment le triomphe de la propriété privée inscrite dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen d'août 1789, a permis de marginaliser un peu plus les pauvres et de « légitimer » (sans légitimité ni justice...) la répression à leur égard quand ces derniers avaient le malheur de ne pas apprécier leur écrasement et de vouloir le faire savoir !

 

Pour en revenir à la formule supposée de M. Hollande, je peux ajouter que j'ai connu, aux Mureaux comme à Rennes, des pauvres qui, effectivement, n'avaient plus de dents : ils n'étaient pas tous vieux, loin de là, et ils semblaient accepter ce qui, pourtant, les empêchait souvent de se nourrir correctement et les forçait à avaler sans mâcher, avec des conséquences désastreuses sur leur santé générale. La formule hollandiste a au moins le mérite de nous rappeler que, malgré l'égalité gravée aux frontons de notre République cinquième du nom, nous ne sommes pas égaux devant la santé et devant l'accès aux soins, en particulier dentaires : malgré le droit de chacun d'être soigné en France, beaucoup de nos concitoyens n'osent plus franchir le seuil d'un cabinet médical ou dentaire, comme s'ils avaient renoncé, puisqu'ils sont financièrement démunis, à user de ce droit ! Certains semblent avoir intégré le discours officieux mais latent dans notre société de « gagneurs » que, si l'on est pauvre, c'est de sa faute et c'est une faute ! Discours terrible et trop souvent réducteur, qu'un Saint Louis a, d'avance, dénoncé en nommant les miséreux « Nos seigneurs les pauvres » et qui, à la suite du Christ selon les évangiles, lavaient les pieds de ces malheureux en s'inclinant devant eux...

 

 

 

28/08/2014

La République fatiguée...

 

La dernière crise gouvernementale a montré les limites d’une Cinquième République quand elle est gouvernée comme sous la Quatrième : l’indécision à la tête de l’Etat, l’instabilité politique et ministérielle, la grogne parlementaire au sein même de la majorité en place, le désaveu électoral répété à chaque élection, partielle ou générale, etc. Cela sent la fin de règne, comme l’on dit communément, alors même qu’il faudrait un Etat solide et, à sa tête, une magistrature suprême sûre d’elle-même et assurée du lendemain pour mieux affronter les immenses défis du moment ! Ainsi, le chômage, véritable fléau social, ne cesse-t-il de s’étendre à toutes les parties du territoire et à toutes les couches et générations de la société, au risque de défaire la cohésion nationale et d’inspirer des attitudes sécessionnistes au cœur du « vivre-ensemble », entre communautarismes et individualisme de masse : or, le Pouvoir actuel semble dépassé et impuissant et ne promet même plus un retournement prochain de la situation, comme si les jeux (fatals) étaient faits !

 

 

 

Cette crise discrédite un peu plus la parole politique, alors que c’est encore cette dernière qui peut limiter les abus de l’économique et éviter l’abandon du social à la fatalité d’une mondialisation qui n’a plus grand-chose d’heureux. Elle discrédite aussi une République qui a épuisé toutes ses capacités sentimentales à être aimée pour ses réalisations et ses résultats : ses politiciens, de droite comme de gauche (mais quel sens donner désormais à ces notions si vagues et si bousculées ?), ne suscitent plus que railleries et ressentiments, de façon parfois injuste mais qui traduit bien le discrédit, non seulement de la classe politique mais aussi du système qu’elle est censée animer et arbitrer…

 

 

 

Certains, par dépit, se réfugient dans l’idée d’une Sixième République dont on a quelque mal à comprendre ce qu’elle apporterait positivement de plus (ou de moins…) et ce qu’elle a de différent avec feue la Quatrième ou, pour les quelques robespierristes nostalgiques du Front de Gauche (ils n’y sont pas majoritaires, d’ailleurs), avec une Première dont les conséquences ne furent guère heureuses, ni pour la France ni pour les Français, ni pour la République elle-même qui mit plus de cinquante ans à s’en remettre, la Seconde (celle de 1848) évitant soigneusement de trop ressembler à celle qui l’avait précédée…

 

 

 

Il faudrait bien plutôt revenir à l’esprit qui avait présidé à l’établissement de la Cinquième, cet esprit monarchique qui voulait l’indépendance de l’Etat pour assurer l’indépendance de la France, et qui ne voyait les partis et les idéologies que comme des éléments du jeu politique mais non comme les acteurs principaux de la scène politique et de la décision d’Etat, réservée dans ses principales orientations à la magistrature suprême de l’Etat. Mais, ce que la Cinquième avait de monarchique, avec la tentation et le risque (pas toujours évités…) de tourner à la monocratie, s’est peu à peu dissous dans une République qui a renoué avec les mauvais côtés de la pratique partisane et qui s’est soumise aux féodalités économiques et financières que le général de Gaulle, lui, n’aimait guère et qu’il voulait, en un réflexe tout capétien, ordonner au service de l’Etat et du pays, et non l’inverse, dont nous voyons aujourd’hui les effets avec la nomination de M. Macron, si peu politique en tant que tel…

 

 

 

Si crise de régime il y a en cette fin de mois d’août 2014, comme l’évoquent certains éditorialistes de la presse parisienne, profitons-en pour poser la question institutionnelle et rappeler que rien ne peut se faire de durable en économie française si la magistrature suprême de l’Etat n’est pas assurée à la fois de la durée et de la continuité (qui n’est pas immobilisme, loin de là), et de l’indépendance statutaire à l’égard des puissances particulières, qu’elles soient économiques et financières ou politiciennes, indépendance qui permet de décider pour l’intérêt commun et non pour celui de quelques uns…

 

 

 

Au regard de l’actualité présente, la Monarchie active, si elle apparaît encore bien lointaine aux yeux de nos contemporains, pourrait néanmoins constituer une réponse crédible aux enjeux et aux défis d’un monde qui n’a pas cessé sa course pour regarder la ruine de la République hollandiste…