28/03/2011
Nous sommes en 1588...
En ce dimanche d'élections, nous étions quelques dizaines de royalistes, jeunes et vieux, à rendre hommage au roi Henri IV, devant sa statue du Pont-Neuf. Quelques nuages chargés de pluie menaçaient, des touristes déambulaient sans prêter beaucoup d'attention à ce cavalier de bronze devant lequel nous nous étions regroupés et chantions, pleins d'ardeur, cet ancien hymne monarchiste du « Vive Henri IV », celui-là même que les soldats de l'empereur Napoléon fredonnaient en pleine retraite de Russie pour se souvenir des temps d'avant-Révolution...
Dans mon petit discours, j'ai évoqué la situation de discorde et les risques communautaristes qui pèsent sur la France contemporaine, tandis que la mondialisation inquiète de plus en plus, et pas forcément toujours à tort, nos concitoyens. « Nous sommes en 1588 », c’est-à-dire à la veille du règne d’Henri IV : temps de confusion et de périls, tandis que l'Etat semble dépassé, hier par les factions religieuses qui se font la guerre, aujourd'hui par les féodalités financières qui s'émancipent trop facilement de leurs devoirs sociaux...
Le roi Henri IV a symbolisé, en son temps, et, mieux encore, incarné le « retour de l'Etat », ce retour préparé par son prédécesseur Valois avec l'appui du « parti des politiques ». Dans des conditions difficiles et malgré des oppositions farouches, il a rétabli ces trois éléments importants qui fondent une société organisée : la concorde, l'union et l'unité.
La concorde, c'est-à-dire la paix entre les différentes composantes religieuses et politiques du royaume qui, sans Etat fort, se déchiraient et, par la même occasion, menaçaient l'existence même de l'ensemble historique et politique français ;
L'union, c'est-à-dire la capacité des Français à se retrouver au sein d'une nation commune, d'un ensemble historique transcendant les identités individuelles et particulières sans les nier ;
L'unité, c'est-à-dire la reconnaissance par tous d'un Etat politique arbitral et « référent suprême », protecteur de l'ensemble et de sa capacité à incarner chacun, vis-à-vis du citoyen voisin comme de l'étranger, même lointain.
Henri IV n'a pas forgé, il a relevé l'épée que lui avait transmis Henri III du fond de son lit de souffrance et de mort, et il l'a maniée mieux que n'avait pu le faire son malheureux prédécesseur qui, dans l'adversité, était toujours resté conscient de ses devoirs d'Etat, contre vents et marées, ce qui n'est déjà pas rien !
Si la Monarchie n'avait pas été, il paraît peu probable que le roi venu du Béarn ait pu agir comme il l'a fait. Mais en devenant « le roi », contre toute attente et malgré son impopularité première près de la majorité catholique du pays, il a « fait le roi » et rétabli l'Etat dans son rôle grâce à sa position d'indépendance et d'arbitre obligé de l'être, d'arbitre-fonction, au-dessus des factions et même au-delà de ses propres amitiés et sentiments.
Aujourd'hui que les féodalités financières semblent dominer notre pays, il n'est pas inutile de poser la question, non pas de l'homme-président (la campagne de 2012 a déjà commencé...), mais de l'Etat-arbitre, des institutions susceptibles d'agir, non en partisan mais en recours, en « liberté » face aux diverses puissances, aux oligarchies qui se jouent de l'Etat et du politique.
Commémorer Henri IV ne doit pas être l'expression d'une nostalgie sympathique mais sans avenir, mais d'une réflexion sur le politique et les institutions françaises...
Si nous sommes en 1588, vivement que l'on en sorte, par en haut et non par des excitations démagogiques : car c'est « par en haut » que les véritables révolutions institutionnelles et les plus profitables pour le Bien commun peuvent se faire...
00:52 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : commémoration, roi, henri 4, union, concorde, unité, arbitre.
22/03/2011
Les urnes de la colère ?
Les élections cantonales ont été marquées par une forte abstention et par la montée du Front National : deux symptômes du « malaise démocratique », peut-être même de cette « fatigue démocratique » que j'évoque régulièrement depuis 2005, et plus encore depuis la dernière présidentielle.
Cette situation devrait alarmer les grands partis sur la désespérance qui s'exprime ainsi, et cela de façon désormais chronique, quand elle ne se traduit pas par des émeutes ou des coups de colère qui laissent toujours quelques traces sur le mobilier urbain et dans les esprits des protagonistes et des témoins. Mais rien ne bouge dans notre « bonne République » (l'expression est ironique, bien sûr !), et les réactions post-électorales le prouvent à l'envi : que les responsables socialistes, par exemple, nous rejouent l'éternelle ritournelle du « front républicain » confine au ridicule, voire à l'insupportable ! Je n'ai guère de sympathie pour le Front National, mais je ne méconnais pas les raisons qui motivent ceux qui se font ses électeurs, et je ne crois pas qu'elles soient insignifiantes, loin de là : on aurait tort de ne pas entendre cette plainte qui se transforme en colère, voire en rage, encore réservée aux urnes (mais pour combien de temps ?), mais je doute que la République et ses partis, véritables féodalités politiciennes dont les suzerains sont souvent des intérêts économiques et financiers, soient en mesure ou aient la volonté de répondre aux questions soulevées par la colère des urnes...
En veut-on des preuves ? Après le refus électoral du Traité constitutionnel européen en mai 2005, la classe politique majoritairement européiste a cherché à culpabiliser les opposants à ce traité, à les diaboliser, et cela sans entendre le cri de déception des Français à l'égard de la construction européenne et de ses aspects antisociaux. Pis : ce Traité rejeté par le corps électoral français mais aussi par celui des Pays-Bas, fut imposé par un vote du Congrès sans repasser par la voie référendaire, ce qui a soulevé l'indignation de nombreux électeurs, comprenant que leur vote ne comptait guère aux yeux de la République et de la classe politique institutionnelle... Cela a laissé des traces et explique que de nombreux électeurs ont depuis déserté les urnes, ou que les sondages d'opinion laissent entendre que les Français ressentent « un recul de la démocratie », du moins de celle qui se veut plus directe que représentative !
Autre exemple : après les émeutes de l'automne 2005, combien de promesses ont été faites et de grands discours prononcés sur « l'urgence » à traiter les « maux des banlieues » ? Qu'en a-t-il été, depuis ? Rien, rien de concret, ce qui explique largement le sentiment toujours plus prononcé d'un abandon éprouvé par les classes populaires et moyennes de cette France des quartiers, quasiment abandonnés au règne des bandes et des maffias...
Et si l'on remonte à 2002, à cette double semaine de « la lutte contre le fascisme » de l'entre-deux-tours de la présidentielle, se souvient-on des grandes déclarations de cette même classe politique, de ces mêmes appels au « front républicain », de ses promesses de « faire vivre la démocratie », de traiter enfin la question sociale, etc. ? Et après ? Rien, rien que la routine républicaine et la poursuite du train-train politicien, comme avant et comme d'habitude...
J'ai gardé les coupures de presse de cette quinzaine de 2002 : cela représente sept boîtes archives, et je viens de les ressortir et d'en secouer la poussière avant de les rouvrir. Et là, au travers des multiples articles de l’époque, je retrouve les mêmes réflexes, les mêmes déclarations de principes, les mêmes hypocrisies : rien n'a changé en 9 ans... sauf le prénom du symptôme ! Décidément, la République a la mémoire courte ou cette forme d'alzheimer politique qui finira par l'emporter, un jour ou l'autre !
La France souffre de cette amnésie et de cette absence de volonté politique qui caractérisent un régime républicain en pleine décomposition démocratique : on peut le regretter, et c'est mon cas. Cela renforce mon royalisme institutionnel et ma proposition d'une magistrature suprême de l'Etat qui « ose l'avenir » en s'incarnant dans une lignée familiale, royale. Non pour maintenir le « désordre établi », mais pour refonder des « démocraties locales », ces fameuses « républiques françaises » qui doivent être les interlocuteurs et les contre-pouvoirs nécessaires de l'Etat central.
En somme, une Monarchie du service public de la France et de ses citoyens !
00:16 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : démocratie, front national, front républicain, cantonales, monarchie, votes.
20/03/2011
Libye : quand la République se fait (presque) capétienne...
Jeudi dernier, j’étais en colère devant l’immobilisme des démocraties et l’hypocrisie de la diplomatie mondiale face aux agissements de Kadhafi, et je me rappelais l’impuissance des démocraties dans les années 30 face à la montée des totalitarismes, impuissance qui faisait dire au royaliste Georges Bernanos, sur la même ligne politique que J.R.R. Tolkien d’ailleurs, que « les démocraties sont les mères des totalitarismes » puisqu’elles les laissent prospérer souvent jusqu’au pire, comme l’histoire nous l’a tragiquement démontrée au XXe siècle...
Et pourtant ! Le soir même, par la voix d’Alain Juppé, la France réussissait à obtenir l’aval de l’ONU pour imposer au dictateur libyen le respect des règles les plus élémentaires d’humanité à l’égard de ses opposants. Et, pour faire appliquer ces règles simples, la France, suivie par le Royaume-Uni mais aussi les Etats-Unis, envoyait samedi ses avions de combat frapper les infrastructures militaires du régime kadhafiste. Une fermeté inattendue et tardive (trop ?), sans doute, mais bienvenue pour rappeler aussi que la diplomatie n’est pas qu’une question de principes et de beaux discours mais une pratique politique parfois musclée qui use du moyen militaire pour parvenir à ses fins.
Sur ce coup-là, la République n’a, pour l’heure, pas démérité, et il serait injuste de ne pas le reconnaître. Mais, sa réaction, justifiée au regard de l’attitude brutale de celui qui avait humilié notre pays à l’automne 2007 en venant planter sa tente au cœur de Paris, doit pouvoir s’inscrire dans la durée et ouvrir les perspectives d’une nouvelle Union pour la Méditerranée, une Union qui, désormais, doit sans doute se passer de la présence des Etats de l’Union européenne non-méditerranéens et en particulier de l’Allemagne, si ambiguë face à Kadhafi et si peu solidaire d’une France qui est pourtant son principal partenaire au sein de l’Union européenne.
Après son « coup d’éclat » (qui a montré, a contrario, l’inutilité de la « Politique étrangère et de sécurité commune » de l’Union européenne, cette PESC tragiquement inefficace, voire même néfaste de par le spectacle de division et de mutisme qu’elle a mis en scène ces dernières semaines), la France a le devoir d’assumer jusqu’au bout son action diplomatique : si la République, quand elle se veut gaullienne (en fait, capétienne…), rompt avec la « malédiction des années 30 », elle n’en reste pas moins limitée par son système politicien même, au risque de stériliser ses meilleures intentions et intuitions.
Là encore, renouer avec une politique du long terme et de l’équilibre nécessite d’enraciner l’Etat dans la « longue durée » et la « mémoire sélective » (c’est-à-dire sans la rancune ou les préjugés) : l’histoire récente (et moins récente, d’ailleurs) nous incite à la prudence et nous préserve de l’illusion. Malgré ce beau sursaut diplomatique, il est à craindre que la République n’ait pas le souffle nécessaire pour mener à bien, au-delà du simple problème libyen, une véritable politique étrangère digne de ce nom, indépendante et équilibrée.
14:36 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : libye, kadhafi, guerre, bombardements, diplomatie, méditerranée.