08/10/2008
Nationalisme, au-delà de Barrès.
Lundi soir, j’étais invité à débattre du thème « Peut-on être royaliste en 2008 ? » sur Radio-Courtoisie, aux côtés de mon vieil ami Michel Fromentoux, rédacteur en chef de L’Action française. Apparemment, le thème a intéressé les auditeurs, si l’on en croit le nombre important de messages de ceux-ci, dont certains lus à l’antenne : parfois, on y retrouvait les arguments mille fois ressassés par les nationalistes républicains, abrités derrière la figure tutélaire de Maurice Barrès. Cet écrivain de la fin du XIXe siècle, « inventeur » du mot de « nationalisme », est resté fidèle à l’institution républicaine malgré la forte dialectique maurrassienne, et cela au nom d’un « réalisme » pourtant battu en brèche par la pratique et qui a permis au régime républicain de perdurer, parfois sans amour particulier des Français, résignés…
Depuis un siècle, l’Histoire a été cruelle pour ceux qui se veulent barrésiens et a, à l’envi, montré que les craintes de Maurras sur l’avenir de la nation en République, étaient malheureusement fondées : il suffit de constater comment, aujourd’hui, la France a perdu une grande part de son influence dans le monde, souvent chassée par les Anglo-Saxons ou par les Chinois (comme en Afrique), et comme essoufflée de vivre. Or, elle aurait pu jouer un autre rôle en ce XXe siècle désormais de plus en plus lointain et elle aurait quelque chose à dire (et à faire !) dans ce grand remue-ménage de la mondialisation : d’ailleurs, le général de Gaulle, sans doute, assuma la tâche d’un « régent de France », mais qui n’aurait pas eu le temps ni réussi à rendre le Pouvoir à son légitime prince. Quand on voit comment la volonté d’un homme, attaché à l’héritage capétien, a réussi à changer le cours de l’Histoire et à rendre un visage à une France qui semblait condamnée à n’être plus qu’une « province européenne » ou une « colonie de l’américanosphère », on se dit que tout cela aurait pu s’enraciner s’il avait osé fonder une nouvelle Monarchie royale avec le comte de Paris. Mais, cela n’a pas été, et il ne sert à rien de rêver : la Monarchie n’est pas faite, le Roi reste « l’absent »…
Maurras avait qualifié la Monarchie qu’il souhaitait de « nationalisme intégral » par une curieuse référence aux mathématiques, en soulignant combien il était le moyen institutionnel nécessaire pour permettre à la France « de manœuvrer et grandir » : en somme, faire du nationalisme, réflexe souvent hâtif et désordonné, une forte raison qui appelait la condition, l’exigence monarchique. Mais Maurras n’a pas réussi à convaincre Barrès et les nationalistes républicains furent, finalement, peu nombreux à franchir le pas et à conclure à la Monarchie : les mêmes aujourd’hui, s’ils saluent Maurras, le font de loin, de plus en plus loin.
Pourtant, tout ce que veulent conserver les nationalistes (je parle des nationalistes politiques ou de ceux que Taguieff nomme, reprenant un terme créé par Pierre Boutang, le fils spirituel de Maurras, « les nationistes ») ne peut l’être par un système républicain qui, aujourd’hui, n’est même plus sûr de vouloir se défendre, et qui se réfugie dans une Union européenne confortable, sans ambition autre que de profiter du banquet économique et consumériste et de « sortir de l’Histoire ». C’est d’ailleurs assez normal, la République ayant longtemps vécu sur l’élan créé par la Monarchie des siècles passés, fondatrice des formes de l’Etat et de la nation en France : mais le carburant, amassé par les capétiens et consumé par les Républiques et autres Empires césariens, est en cours d’épuisement…
Du coup, les nationalistes républicains se crispent sur des attitudes et des réflexes qui ne sont pas toujours compris de nos contemporains et qui décrédibilisent toute velléité un peu farouche de défendre la nation : or, un nationalisme bien compris (mais peut-être le terme lui-même apparaît-il trop connoté aujourd’hui pour garder quelque efficacité que ce soit) doit se rappeler la fameuse formule de Jacques Bainville, si méconnue alors qu’elle mériterait de figurer sur les banderoles des nationalistes conséquents : « Le peuple français est un composé. C’est mieux qu’une race. C’est une nation. »
D’où ma défense des musulmans français qui, d’ailleurs, m’a été hier reprochée par l’animateur de l’émission comme une « naïveté » quand j’y vois, au contraire, une prise en compte des réalités françaises contemporaines et des traditions nationales capétiennes elles-mêmes.
Tout nationaliste conséquent, et je sais que je m’adresse alors à une petite part, peut-être fort réduite, du public nationaliste, doit « faire France » avec les habitants, anciens ou récents, de notre pays. Il ne s’agit pas d’ouvrir la France à tous les vents mais de la faire aimer à ceux qui, de par l’Histoire lointaine ou proche, s’y trouvent, et s’y trouvent bien. Le vrai nationalisme français est d’abord une déclaration d’amour à la France, une passion qui n’est pas jalousie mais envie de vivre en commun, de regarder dans la même direction… L’amour, un terme trop peu employé en politique, malheureusement… Il est, en tout cas, à la base de mon « nationalisme », et ne se conçoit, pour s’inscrire dans la durée, dans cet avenir que je souhaite à mon pays, que par la fidélité au Roi !
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06/10/2008
Crise financière : le libéralisme en difficulté.
La crise financière qui est en train de dérouler ses effets sur les pays occidentaux n’est pas exactement une surprise, et je suis d’autant plus agacé d’entendre, ce dimanche soir encore, des journalistes comme Apathie (sur RTL, au Grand jury) feindre l’étonnement devant les récents événements et l’effondrement d’une part du système financier états-unien et européen : de qui se moque-t-on ?
De multiples avertissements ont, ces dernières années, été lancés, dans une indifférence presque totale, et je n’ai pas été le dernier à évoquer la possibilité d’une crise qui ne soit pas que conjoncturelle mais systémique, même si je ne savais pas quelles formes exactes elle allait prendre, ni quand elle allait survenir. Idem sur le plan géopolitique et militaire, d’ailleurs…
A force de jouer les éternels Cassandre, rôle ingrat et nécessaire mais qui ne ferme pas forcément la porte à l’espérance, une certaine fatigue teintée d’amertume peut parfois m’envahir : le danger serait de se réfugier dans une sorte de retraite méprisante et désabusée, impolitique et donc totalement négative. Or, faire de la politique, c’est refuser le fatalisme et chercher les voies institutionnelles d’une « sortie de crise », qu’elle qu’en soit le domaine.
Il me semble que l’Etat a un rôle à jouer dans l’économie, non pour la diriger mais pour lui éviter de défaire ce qui doit être préservé, que cela soit l’environnement ou de justes rapports dans la société : le comte de Paris disait jadis que « la mission du Pouvoir est de rendre les gens heureux » et, au-delà d’une formulation qu’il faut, à mon avis, préciser, cela fait sens. J’avoue que, pendant longtemps, une stricte lecture maurrassienne me faisait rechigner à user du terme « bonheur » considéré comme trop moral ou trop vague pour être vraiment autre chose qu’une nuée, une abstraction saint-justinienne qui avait fait tant de mal dans l’Histoire, en particulier durant la Terreur ou au temps de l’Union soviétique… Mais, en fait, lorsque le comte de Paris écrit la formule évoquée, il ne s’agit pas pour lui de parler d’un « mythe » ou d’user d’une facilité de langage, démagogique, mais de rappeler que l’Etat a pour devoir d’assurer le bien-être de ses citoyens ou, du moins, de le préserver du pire, de la défaite ou de la misère, de la toute-puissance des forces économiques et des injustices sociales qui résultent d’une application trop stricte de la « liberté économique », celle du « renard libre dans le poulailler libre » qui oublie les règles de l’équilibre de toute société.
L’Etat français, aujourd’hui encore et malgré la République, est conscient de cette tâche qui lui revient, non seulement de droit mais de devoir et de légitimité, et le président Nicolas Sarkozy, dans son discours de Toulon, rédigé par le gaulliste social Henri Guaino, a pris le contrepied de ce qu’il avait dit quelques semaines auparavant, au risque même de contredire la lettre et l’esprit du traité de Lisbonne dont il se veut le « père » (de façon un peu exagérée, d’ailleurs) et qui est de stricte orthodoxie libérale…
Il est d’ailleurs significatif que les propos récents de M. Guaino (expliquant qu’il ne fallait pas hésiter, en cas de besoin, à passer par-dessus les critères de Maëstricht), après avoir été dénoncés par les caciques de l’UMP le jour même, ont été « adoptés », à peine 48 heures après, par les responsables européens réunis à Paris samedi 4 octobre (jour du 50ème anniversaire de la Constitution française…) et confortés par les diverses annonces des Etats européens ce ouiquende… Pied de nez au libéralisme !
Avoir eu raison trop tôt (mais je n’étais pas le seul, évidemment, à prévenir des risques d’un libéralisme sans garde-fou ni freins) ne me console pas vraiment, parce que, lorsque ce qui est annoncé arrive, c’est encore Cassandre qui est accusée d’avoir attiré le malheur sur la cité et que les retournements de veste, bruyants à défaut d’être complètement sincères, couvrent les paroles des justes augures.
La crise n’est pas finie, et elle n’est qu’une transition, un vaste transfert de richesses des classes moyennes du Nord vers celles, émergentes, de Chine et d’Inde, entre autres, comme je l’ai déjà dit maintes fois, sur ce blogue comme dans des discussions avec mes élèves ou mes collègues : le rôle de Cassandre, aujourd’hui, s’achève, et doit laisser la place aux actions concrètes des Politiques, à ceux à qui il revient de forger les boucliers mais aussi les épées de demain, à ceux qui doivent, l’espérance au cœur, agir pour les générations qui s’annoncent et celles qui sont encore lointaines. Dans son histoire, notre pays a traversé de multiples épreuves, il survivra à cette crise, sans doute : mais, le « mettre en Monarchie » aurait comme vertu d’inscrire le long terme dans l’Etat, élément nécessaire de tout amortissement et de toute résolution de crise et condition de la justice sociale, garantie par la loi nationale plus sûrement que par les règles d’une Union européenne, aujourd’hui percluse de libéralisme comme d’autres le sont de rhumatismes…
00:31 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : crise financière, libéralisme, union européenne, guaino, cassandre, social.
03/10/2008
Une boucherie en centre-ville des Mureaux.
J’ai longtemps pris mon café dans un petit bar du centre des Mureaux, à l’époque où Julien Auroux, actuel responsable versaillais d’Alliance Royale, venait m’y rencontrer pour discuter des idées monarchistes et travailler à leur promotion dans cette ville des Yvelines, connue, malheureusement, pour ses problèmes récurrents de violence urbaine. Aussi, je ne peux m’empêcher, lorsque je parcours les pages départementales du « Parisien », de prêter attention aux nouvelles de « là-bas ». Et, cette fois, c’est pour y lire une nouvelle intéressante et même plutôt réconfortante : l’annonce de la prochaine réouverture d’une boucherie en centre-ville, soutenue et même impulsée par la Mairie « divers Gauche » dirigée par François Garay.
« La ville a acquis ce fonds de commerce après le dépôt de bilan du charcutier en septembre 2006. En avril dernier, elle a racheté les murs, avec un seul objectif : faire revivre un commerce de bouche dans ce magasin.
Sa politique vise à défendre le petit commerce du centre face aux grandes surfaces. Un plan de bataille qui s’applique en trois phases : un moratoire sur l’implantation des grandes surfaces, une aide financière pour les jeunes commerçants et une offre plus importante en centre-ville.
Le candidat - déjà choisi pour gérer cette charcuterie -, qui devra s’acquitter d’un loyer annuel de 12 000 euros, profitera des deux derniers points. (…)
Le maire, François Garay (DVG), concède qu’il s’agit d’un pari, mais aussi d’une opportunité pour mettre en œuvre ses idées sur le sujet. « Les Mureaux subissent, comme dans la plupart des villes françaises, une relative désertification de leur centre-ville par les commerces de proximité. Notre action vise précisément à en réinstaller dans les meilleures conditions possibles, afin qu’ils soient pérennes. » »
Effectivement, même si ce projet reste coûteux (plus de 500 000 euros), il s’agit d’un investissement qui peut s’avérer, à plus ou moins long terme, profitable et qui montre que, lorsqu’une municipalité ne se contente pas de geindre mais prend des initiatives audacieuses, elle peut fonder une autre forme de politique et d’économie locales, sur la base d’un aménagement raisonné du territoire urbain, et pour la revitalisation concrète des quartiers par ce fameux commerce de proximité qui reste un élément importante de la sociabilité villageoise comme urbaine. Il n’y a pas de fatalité qui verrait toujours le triomphe des grosses structures et de la grande distribution mais, le plus souvent, un renoncement (quand ce n’est pas une pure et simple complicité…) de certaines municipalités qui vont à la facilité et privilégie ainsi des chaînes plutôt que les commerces à taille humaine.
La politique de la Mairie des Mureaux mérite d’être, en ce domaine, saluée, même s’il faut souhaiter qu’elle se donne aussi les moyens de la pérenniser par une vision à long terme et par une restructuration des marges de la ville pour mieux les intégrer au centre-ville ou, au moins, créer une « attraction positive » du centre-ville à l’égard des populations parfois en mal d’enracinement et souvent trop sensibles à une certaine forme de repli communautaire : là aussi, la présence de commerces de proximité qui tisse des liens entre les habitants d’une cité, la réactivation d’une sociabilité « villageoise » en son cœur peuvent avoir des conséquences éminemment positives… Il faut en prendre le pari et en cultiver, intelligemment, l’espérance !
23:32 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : boucherie, les mureaux, commerce de proximité, mairie, aménagement du territoire.