05/02/2014
Le 6 février 1934 vu et vécu par l'Action française. (1ère partie : une République en crise ?)
Quatre-vingts ans après, le Six Février 1934 reste une date symbolique, repérée et annoncée comme telle par les historiens, mais aussi effrayante pour les bien-pensants de la République, encore agitée comme un épouvantail par l’actuel gouvernement et ses partisans, qu’ils soient politiciens, ministres ou journalistes : pour preuve les récents propos de M. Valls dans le Journal du dimanche, comparant les manifestants hostiles à la politique familiale hollandiste à ceux qui firent trembler (à défaut de pouvoir le renverser…) le régime de la IIIe République en ce triste hiver 1934. Les partisans du « pays légal » des années 30 à aujourd’hui, n’ont eu de cesse, jusqu’à nos jours et encore plus cette dernière année troublée, d’en maquiller les causes et d’en travestir le sens, parfois même dans les manuels scolaires, au mépris de la vérité historique et de la simple honnêteté intellectuelle. Ainsi, les événements du 6 février sont-ils souvent présentés comme une tentative « fasciste » de coup d’Etat des « ligues d’extrême-droite », sans beaucoup plus d’explications. Parfois, toute trace de celle qui fut à l’origine des manifestations, l’Action française, a-t-elle disparu...
Aussi, retracer l’histoire de l’Action française, à travers son journal et son mouvement, pour cette période de quelques semaines de l’hiver 1934, apparaît nécessaire, pour dissiper quelques malentendus et réparer oublis et injustices.
À la fin de 1933, la France est en crise : crise économique venue d’outre-Atlantique, qui ronge le tissu social du pays, mais aussi crise politique, conséquence d’un système parlementaire facteur d’instabilité ministérielle ; crise morale révélée par les multiples scandales qui éclaboussent régulièrement la classe politique de la IIIe République ; crise de civilisation, enfin, à l’heure où les démocraties et les totalitarismes se font concurrence pour le contrôle des masses, et où technique et consommation assoient de plus en plus le règne de l’argent au détriment des cultures et des personnes.
C’est dans ce contexte lourd d’inquiétudes et de menaces que, le 24 décembre 1933, un article de presse, apparemment anodin, évoque une affaire d’escroquerie découverte à Bayonne et l’arrestation du directeur du crédit municipal de cette même ville, coupable d’avoir émis de faux bons pour des sommes très importantes. Que cet article paraisse dans le quotidien monarchiste L’Action française semble fort logique : après tout, ce journal n’a de cesse de dénoncer toutes les (mauvaises) « affaires » de la république pour mieux la décrédibiliser aux yeux d’une opinion publique pas encore totalement blasée, comme il se veut aussi le chantre de la « réaction nationale » qui doit, en bonne logique maurrassienne, mener à la monarchie.
Cette tactique de dénonciation systématique des maux de la république, en ces années trente, ne manque pas d’aliments tant les scandales qui touchent le régime et ses hommes semblent nombreux. Mais, jusque là, cela ne débouche guère sur autre chose que quelques manifestations de rue, des actions de Camelots du roi et la sempiternelle confirmation de la malhonnêteté inhérente au système idéologico-politique de la démocratie représentative. Pour autant, malgré le peu de débouchés politiques apparents de cette perpétuelle contestation (faute d’un Monk ?), la capacité d’indignation des journalistes et des militants royalistes reste intacte, prête à se manifester à l’occasion, avec le souhait toujours rappelé d’aboutir au renversement de la « gueuse », synonyme (pour les Camelots du roi) de république.
En quelques jours, « le scandale de Bayonne », comme le nomme l’Action française et, à sa suite, la presse populaire, prend des proportions inquiétantes pour le monde parlementaire. Chaque jour amène son lot de révélations, et la liste des escrocs et des corrompus s’allonge. C’est l’Action française qui, grâce à une « taupe » bien placée dans l’appareil d’Etat (au ministère de l’Intérieur lui-même ?), reçoit de nouveaux documents compromettants pour quelques personnalités politiques, et se fait un devoir et un plaisir de les publier. Ainsi reproduit-elle les lettres d’un ministre, Dalimier, conseillant de se procurer les fameux bons du Crédit municipal de Bayonne, et met-elle en cause le magistrat Pressard, beau-frère du président du Conseil du moment, Camille Chautemps : les premiers numéros de l’A.F. du mois de janvier 1934 fourmillent d’accusations et d’explications sur la vaste escroquerie mise en place par un certain Alexandre Stavisky, en fuite depuis Noël.
(à suivre)
23:22 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 6 février 1934, république, crise, troubles, valls, stavisky, bayonne.
03/02/2014
Le roi nécessaire.
Dimanche 2 février, un banquet organisé par le Groupe d’Action Royaliste réunissait une trentaine de personnes dans un petit restaurant de la capitale, et était l’occasion de faire un point sur l’actualité orageuse de ces dernières semaines : l’ambiance délétère qui, aujourd’hui, empoisonne le paysage politique français, est bien le résultat d’une politique éminemment républicaine qui « divise pour mieux régner », au risque de fracturer gravement le pays tout entier. Entre le sectarisme des uns, actuels possesseurs d’un Pouvoir dont ils se croient éternellement propriétaires, sectarisme qui n’est que le moyen indélicat de couvrir leur échec en matière de lutte contre le chômage, et les colères souvent légitimes (mais pas toutes, néanmoins) mais parfois mal ordonnées des autres (voire, dans quelques cas, fort injustes !), ou les tentations du pire qui, comme le rappelait jadis Maurras n’est jamais que « la pire des politiques », il paraît urgent de « parler politique » et de s’adresser à tous ceux qui s’inquiètent des dérives d’un Minotaure républicain mais ne veulent pas pour autant d’une anarchie mortifère, qu’elle soit « établie » et libérale, ou, au contraire, émeutière et autoritariste.
Justement, le royalisme a un message original qui ne cherche pas à promettre mais à fonder, à refonder même, un pacte civique autour d’un Etat arbitral, fédéral et éminemment politique. Il ne s’agit pas de prendre une revanche sur une République qui, au cours de son histoire, a pu s’incarner en des personnalités fort différentes, d’un Danton corrompu à un de Gaulle détestant l’Argent, et en des idées parfois très antagonistes, de la Terreur liberticide à un conservatisme opportuniste plus prudent, de la Gauche socialiste (ou prétendue telle…) à une Droite libérale-libertaire, etc. mais de créer, d’instaurer un « autre Etat ».
S’il s’agit bien de remplacer la République, il n’est pas question de faire une chasse aux sorcières qui nous renverrait aux années Valls et à ses limitations légales de libertés « au nom de la République » ! La Monarchie n’est pas une « contre-République » car elle ne se définit pas, d’abord, par la négation mais par la fondation et l’affirmation : elle n’aurait d’ailleurs aucun souci à utiliser les compétences de tel ou tel ministre de la République trépassée, ne lui demandant pas un passeport idéologique mais une pratique économique ou politique au service de la France. Oui, même dans ce gouvernement soci(ét)al-libéral dont je trouve l’esprit général détestable pour de multiples raisons (et pas seulement à cause de l’attitude bornée de M. Ayrault et de son hostilité au rattachement de Nantes à la Bretagne, ou de sa mégalomanie aéroportuaire…), il y a des ministres qui auraient leur place dans un gouvernement royal et qui, pour au moins deux d’entre eux, ne se feraient pas prier pour y siéger… Sans doute y aurait-il aussi de nombreuses têtes nouvelles, aujourd’hui marginalisées dans un débat démocratique trop peu ouvert.
S'il y avait un roi, pour ce qui est de la crise, il ne se comporterait ni en magicien ni en charlatan, mais en réaliste et en « imaginatif » : pas de « sceptre magique » mais, parfois, des solutions simples et « de proximité » en exploitant les possibilités d'un véritable aménagement du territoire (vivier d'emplois encore sous-utilisé), rendu possible par l'existence de ce fédérateur-né, statutaire, qu'est le roi. Une grande politique d’Etat, politique royale, impulserait cette réforme territoriale que la République, encore plus bloquante que bloquée, n’ose pas faire, de peur de déplaire aux féodalités locales qui la tiennent.
Là encore, le roi n'a pas toutes les solutions mais sa présence en permet plusieurs à la fois, puisqu'il symbolise l'unité du pays, assez fortement pour permettre toutes les initiatives provinciales, locales, nationales possibles : on retrouve là la notion de « levier monarchique » rendu possible par l'indépendance du roi, « né roi » donc libre des jeux électoraux et des pressions patronales ou syndicales...
17:59 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : crise, république, colère, désordre, état, monarchie, politique.
29/01/2014
La première dame et la reine.
Le feuilleton vaudevillesque qui s’est déroulé sous les yeux du monde entier et qui a mis en scène le président de la République, sa favorite officielle et sa maîtresse, a révélé bien des choses, et pas seulement sur la nature profonde d’un homme « dépourvu d’affect », selon des propos attribués à son ancienne compagne des années dernières : en fait, le plus intéressant est ce débat sur le rôle de première dame et sur sa nécessité ou son inutilité dans notre pays.
La manière dont les médias ont, d’une certaine façon, tissé le linceul de la première dame et, au-delà, de son rôle près du chef de l’Etat, rôle non officiel et pourtant loin d’être négligeable (pour le meilleur comme pour le pire, d’ailleurs…), de cette fonction qui n’est reconnue par aucun texte de la République, n’est pas une manière heureuse ni judicieuse. Pour une fois, je reconnais au publicitaire Jacques Séguéla une certaine raison quand il affirme dans Le Figaro du lundi 27 janvier que « On assassine la fonction de première dame de France dans un esprit « bonnet phrygien » alors que cette fonction apporte de l’imaginaire à la République. »
Je suis intimement persuadé que l’Etat a besoin d’une « figure annexe », d’un complément et d’un supplément d’âme que le chef de l’Etat ne peut incarner à lui seul dans la rudesse de sa fonction, et que la première dame apporte par ses attentions, ses sourires et sa présence active ou symbolique auprès des œuvres caritatives, entre autres : elle assure une sorte de régence symbolique en remplacement de la reine d’antan…
« Tous les grands pays du monde ont leur première dame ! Si les conjoints des premiers ministres espagnols ou britanniques sont inconnus, c’est qu’un roi ou une reine permet de développer l’imaginaire. », poursuit Séguéla : c’est en somme ce que disait, d’une autre manière, Régis Debray quand il écrivait « Il manque à la République une famille royale ».
En fait, tout le psychodrame des dernières semaines montre bien que la France ne se remet pas vraiment de ne plus, de ne pas être une monarchie : l’absence d’une famille qui incarne, au plus haut sommet symbolique de l’Etat, le pays et ses familles, créé une frustration profonde, sans doute inconsciente, et que la première dame, aujourd’hui femme ou favorite de président, tend (tendait ?) à apaiser un peu, comme l’a jadis prouvée Bernadette Chirac, femme peu commode mais qui tenait « son rang » et jouait un rôle d’ambassadrice informelle de la France qu’il faudra bien, un jour, étudier pour mieux l’expliquer.
La République souffre de n’avoir qu’un « homme-chef » à sa tête quand la monarchie, elle, avait une « famille-chef » dans laquelle la reine était une pièce maîtresse, à la fois femme et mère de roi, indispensable à la monarchie et à sa pérennité : « Pas de reine, alors pas de roi », expliquait souvent Vladimir Volkoff dans les rassemblements monarchistes auxquels il participait.
La reine n’était pas qu’une première dame, elle était l’avenir même de la famille royale qu’elle portait en son sein : elle n’était donc pas que la femme du chef de l’Etat mais la condition de l’inscription de l’Etat dans la longue durée, par les moyens les plus naturels qui soient, l’amour et l’enfantement…
Bien plus qu’une première dame présidentielle, la reine était la dame de France, parfois jusqu’au sacrifice suprême. Et si j’en parle ainsi au passé, c’est en espérant, demain, en reparler au présent…
00:13 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : reine, première dame, monarchie, chef de l'état, frustration, figure.