17/08/2008
Nécessité écologique d'Etat.
Les massifs coralliens sont en train de mourir, au grand dam des naturalistes qui observent, impuissants, ce phénomène annonciateur d’un réchauffement climatique dont on ne mesure pas encore les conséquences, mais dont on commence à sentir les premiers effets. Dans le même temps, la banquise fond de plus en plus rapidement au pôle Nord, ouvrant de nouvelles perspectives économiques mais aussi géopolitiques, peut-être dangereuses, si l’on n’y prend garde, pour l’équilibre du monde : en effet, les nouvelles routes ouvertes par cette fonte rapide sont en train de faire de cet espace immense un enjeu géoéconomique et géopolitique de toute première importance, non seulement du fait des richesses qu’il recèle mais aussi des flux de communications qui feront du pôle un nouvel axe majeur de la mondialisation, au risque de l’environnement lui-même.
A quoi sont dus ces changements environnementaux ? Au-delà des variations climatiques naturelles et qui ont toujours existé, la faute en revient aussi aux rejets de CO2 de nos sociétés contemporaines, industrielles et consuméristes… Et cela, ce n’est pas contestable, comme on peut le constater en faisant des prélèvements dans les glaces arctiques : la teneur en CO2 de notre atmosphère est bien supérieure à celle des millénaires passés, et cela tend visiblement à s’aggraver, au risque de provoquer un réchauffement et une acidification des mers, fatales aux barrières de corail…
Doit-on se contenter de geindre sans chercher à réagir ? Certes non ! Et, même si cela peut paraître bien anodin au regard des enjeux et du nombre d’habitants actuels et à venir sur notre planète, il n’est pas impossible d’agir concrètement, individuellement comme collectivement, par le biais de l’Etat français, qui a mandat sur 62 millions de citoyens et dispose d’un espace territorial loin d’être négligeable, sur terre comme sur mer (la France a le deuxième espace maritime du monde, en grande partie grâce à son outre-mer). Encore faut-il avoir conscience des enjeux et des dangers des dérèglements climatiques, et avoir la volonté politique d’en relever les défis.
L’Etat doit, autant qu’il est possible, mettre en place quelques mesures simples et jouer un rôle d’exemplarité sur les autres nations industrialisées, en particulier de l’Union européenne dont la France est présentement présidente jusqu’au 31 décembre prochain.
Développement des énergies alternatives, en particulier dans l’immobilier (panneaux solaires, petit éolien domestique, etc.) ; incitation aux économies d’énergie et à la baisse des consommations industrielles, agricoles comme domestiques ; relocalisation d’une partie de nos industries destinées à alimenter le marché français (par exemple, dans le secteur automobile ou dans la production agricole) ; aménagement des territoires, etc. : la liste n’est pas limitative, bien sûr, mais elle doit être pragmatiquement complétée sans tomber dans une forme « punitive » de l’écologie quotidienne, qui aurait pour résultat de déresponsabiliser les populations et de les inciter à des « fraudes écologiques » néfastes : un effort d’imagination est ainsi nécessaire pour faire de ce qui est urgent et utile une habitude « désirée », et non une contrainte mal vécue. Il n’est pas dit que cela soit toujours ni facile ni même possible (des remises en cause douloureuses sont une étape qu’il sera parfois difficile d’ignorer…), mais il faut tendre, en pensant aux résultats environnementaux à atteindre, à cette écologie pratique et populaire pour ne pas hypothéquer l’avenir « que tout esprit bien né souhaite à sa patrie » selon l’heureuse formule de Maurras.
19:44 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écologie, dérèglement climatique, banquise, éolien, etat.
16/08/2008
La République fautive.
J’étais mercredi après-midi à Paris pour charger ma voiture (la fameuse « roycomobile »…) de journaux et d’affiches monarchistes en prévision de mon séjour en Bretagne. J’en ai profité pour flâner au Quartier latin et le long des quais de la Seine, quelques bouquins sous le bras comme à l’accoutumée, respirant l’air des vacances et la légèreté du moment. Mais toujours à l’affût : un militant ne dort jamais vraiment, dit-on… C’est d’autant plus vrai pour un chouan !
A la sortie d’une bouche de métro, non loin de la tour Saint-Jacques, un militant trotskiste vendait à la criée le journal « Rouge ». Je me suis arrêté pour discuter quelques minutes avec lui, sans cacher mon appartenance à une autre tradition politique que la sienne, ce qui, à défaut de le satisfaire bien sûr, n’eut pas l’heur de le choquer, au contraire : notre discussion, fort sympathique, sans aucune animosité de part et d’autre, porta vite sur les raisons du militantisme plus que sur les clivages politiques classiques. J’appris ainsi qu’il était d’origine berbère, arrivé en France il y a plusieurs décennies sans connaître un traître mot de français et, qu’à l’école, on l’avait d’abord mis au fond de la classe sans lui accorder beaucoup d’importance… Néanmoins, en quatre ans, il s’installait aux premières places de sa classe : en somme, son intégration scolaire s’était nourrie de son exclusion ou de sa marginalisation des débuts… Cette situation n’avait sans doute pas compté pour rien dans son engagement politique : ainsi, la République, si vertueuse dans ses principes pétrifiés au fronton des mairies, n’avait pas su reconnaître en lui les capacités d’inclusion et s’était contentée d’un service minimum qui, en définitive, l’avait prédisposé à s’engager dans les rangs contestataires et « internationalistes ».
Ce n’est pas la première fois, loin s’en faut, que je rencontre cette histoire et ce cas de figure : j’en veux énormément à la République de n’avoir pas rempli, ou pas assez (car il y a aussi de beaux cas d’intégration qui sont le fait de l’école, ne le méconnaissons pas !), ses devoirs « nationaux », en particulier depuis les années soixante. Sans doute est-ce aussi dû à cet état d’esprit hérité de Jules Ferry qui magnifiait les valeurs de la République au détriment des cultures provinciales (et de celles étrangères à la métropole au temps des colonies : pensons à la fameuse déclaration de Ferry sur les « races inférieures »…) ainsi qu’au détriment de l’histoire de France, au risque de brouiller l’image et la réalité de la nation française, diverse et pourtant unie autour d’un Etat auquel, en République, il manquait (et manque toujours) un principe d’incarnation autre que celui d’une Marianne en plâtre visible sur les couvertures des manuels scolaires ou dans les salles municipales… La décomposition de cette République et de son autorité après Mai 68, conjuguée à l’imposition de la société de consommation (par nature mondialisée et antipolitique), a amoindri la faculté d’incorporation individuelle des enfants, qu’ils soient « de souche » ou d’installation plus récente en France, par l’école.
D’autre part, la mise en avant de plus en plus prégnante de « l’Europe » a aussi troublé l’intégration à la « seule » France, ravalée de plus en plus à un rôle de province administrative d’une Europe (voire d’un Occident…) destinée à être le « nouvel horizon d’expression du politique », au dessus des réalités d’Etat et nationales des citoyens, au risque de fragiliser l’équilibre intérieur de notre pays : à voir trop grand, on oublie que la force des espaces politiques ne tient pas seulement (voire rarement) dans leurs dimensions mais dans leur volonté et leurs capacités à penser le concret et à rayonner. Et cela passe par le politique, par l’Etat et son exercice pratique, mais aussi par sa capacité ontologique à être et durer, à transmettre et à « parler au monde », à être un passage du singulier à l’universel… La République semble l’avoir bien oubliée…
Voilà ce que je n’ai pas eu entièrement le temps de dire à mon interlocuteur d’un instant : car, il n’est pas impossible de le penser, son engagement n’est peut-être pas autre chose qu’un regret de n’avoir pas été accueilli, par une nation à laquelle il participe désormais, autrement que comme un « passager ».
La nécessité d’un « nationalisme d’inclusion » ne m’en paraît ainsi que plus urgente, pour éviter les malentendus qui poussent certains de nos nouveaux compatriotes dans les rangs de mouvances politiques ou religieuses peu compatibles avec les traditions et les nécessités françaises…
15:47 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : république, nationalisme d'inclusion, intégration, école.
14/08/2008
La Monarchie politique.
Quelques avantages du mode de transmission héréditaire de la Monarchie : l’indépendance de la magistrature suprême de l’Etat mais aussi l’autonomie du politique à l’égard des féodalités de l’économique. Le roi ne doit rien à personne, n’étant l’élu de personne et n’ayant pas été obligé de se construire une clientèle et de faire appel à des puissances financières pour accéder au pouvoir. Cela lui donne une grande liberté, une indépendance à l’égard des féodalités politiques (en particulier les partis), qui, certes, n’empêche pas leur jeu parlementaire ou démocratique, mais en limite les effets sur l’Etat et sa représentation. Si le roi n’a pas à être omniprésent dans la vie politique du pays, il est le gardien des institutions, l’incarnation de l’Etat et sa représentation diplomatique : son indépendance est une chance pour le pays, même si elle peut parfois être mal comprise et qu’elle ne le garde pas entièrement des pressions de l’Opinion et de ses représentants, ne serait-ce que par la nature même des modes de communication et de discussion politique contemporains. En tout cas, son indépendance statutaire lui permet aussi de porter la parole du politique face à l’économique, en particulier quand ce dernier cherche par tous les moyens à s’affranchir de ses devoirs sociaux : le roi peut jouer un rôle important de médiateur politique entre les principaux acteurs de la scène économique et sociale, et rappeler, à l’instar du comte de Chambord et du pape Jean-Paul II que « l’économique doit être au service des hommes, et non l’inverse ». Mais il est vrai qu’il faudra au souverain de « l’Instauration » faire preuve d’une grande fermeté et volonté, et que la nouvelle Monarchie, dans les premières années de sa mise en place, devra quérir une part de sa légitimité dans la capacité à garantir la justice sociale.
Néanmoins et quoi qu’il soit, la Monarchie offre indéniablement plus de possibilités qu’une présidence piégée par le calendrier électoral et obligée de se méfier du temps quand la Monarchie, par son principe même, n’est pas limitée par des échéances démocratiques.
Cela signifie-t-il que le roi peut faire n’importe quoi ? Bien sûr que non, et l’histoire montre à l’envi que les souverains qui se sont succédés en France, quels que soient leurs qualités ou leurs défauts, ont su généralement rester attentifs à leurs devoirs d’Etat envers le pays comme envers les peuples de France. D’ailleurs, leur intérêt bien compris était de faire en sorte que le royaume se porte plutôt bien, au risque de grever l’avenir et, en particulier, celui de leurs propres héritiers : être roi, c’est aussi exercer un métier, une charge, et non se contenter de paraître ou de parader... Le prestige monarchique n’est pas le « bling-bling » républicain du mari de Carla Bruni !
De plus, en France (mais pas forcément dans les autres pays aujourd’hui monarchiques), la Monarchie se doit d’être « active » et de savoir s’engager sur de grands chantiers à long terme : elle n’est pas un régime d’opérette mais un élément essentiel de la vie politique du pays, non qu’elle prenne toutes les décisions, mais parce qu’elle joue un rôle d’arbitrage sur les grands dossiers après avoir entendu, autant que faire se peut, tous les points de vue et étudié tous les aspects du sujet et les perspectives possibles, aussi différentes soient-elles. La magistrature suprême de l’Etat n’a pas non plus à faire le travail des ministres ou des partis politiques, ni à s’immiscer dans la vie parlementaire qu’elle surplombe par son rôle de garante des institutions, mais elle se doit de rappeler, lorsque la nécessité s’en fait sentir, les grands principes de l’Etat et d’ordonner la diplomatie, dont le roi reste le principal acteur et l’incarnation de la France.
De par son statut, la Monarchie, symbole de l’Etat libre des pressions de tout genre et « trait d’union » entre les provinces, peut engager une plus grande décentralisation sans remettre en cause l’unité nationale, tout comme elle peut accorder une plus grande place aux communautés dans la vie politique en les intégrant au jeu institutionnel sans tomber dans les communautarismes figés et agressifs : c’est, d’une certaine manière, ce que rappelaient les rois de l’Ancien régime lorsqu’ils évoquaient « les peuples de France » sans, pour autant, tolérer les remises en cause de l’unité du royaume. En fait, dans le monde globalisé contemporain qui uniformise les modes de vie et, dans le même temps, maximalise les « petites différences » (stratégie du consumérisme actuel : diviser pour mieux régner…), la Monarchie peut jouer un rôle protecteur des identités locales et nationale par l’incarnation même d’un enracinement et d’une histoire qui ne se résumeraient pas au seul présent… Le roi peut être ce point de repère qui manque tant pour signifier « la France », autant comme Etat que comme nation. D’ailleurs, à ce propos, le roi n’a pas à faire un tri dans l’Histoire de France : il en est l’héritier et le rappel, et il est autant celui des rois que des régimes qui se marquaient par « l’absence de roi » ; il n’a pas de « querelle à venger », il assume toute l’Histoire de France !
La Monarchie n’est pas « le régime parfait » et elle ne revendique pas l’être, consciente qu’elle est avant toute une institution faite par des hommes, pour des hommes, pour tous les êtres de sang et de chair dotés d’une conscience qui se rattachent, d’une façon ou d’une autre, à la France, et non une simple abstraction logique et froide : son caractère profondément, intimement même (ne serait-ce que par son mode de transmission), humain l’entraîne à prendre les personnes telles qu’elles sont et à « faire de la politique », fondée sur les réalités plus que sur les seules idées ou idéologies, ce qui ne l’empêche évidemment pas d’avoir des idées ou de débattre de celles-ci sans préjugés.
Comme le souligne Maurras, la Monarchie ne constitue que « le moindre mal et la possibilité du bien » : elle n’est pas un remède miracle, et les monarchistes ne sont pas non plus les charlatans d’une monarchie dont les rois seraient les gourous… Mais elle est cette nécessité pour faire vivre la France, pour en poursuivre l’œuvre dans un monde qui a besoin d’elle comme le soulignait en son temps Georges Bernanos, pour assurer la défense des « petits » face à « l’économie sauvage », pour donner à notre pays mieux qu’un homme, une famille ! Nécessaire, et au plus vite, faut-il souhaiter, possible…
01:06 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : monarchie, arbitrage, indépendance, politique.